Intervention de Agnès Canayer

Commission mixte paritaire — Réunion du 4 février 2021 à 10h30
Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs

Photo de Agnès CanayerAgnès Canayer, sénateur, rapporteur pour le Sénat :

Le Sénat a abordé ce texte de modernisation de la justice pénale des mineurs dans un état d'esprit très constructif. Nous avions été particulièrement froissés par la méthode employée, du recours aux ordonnances à la circulaire « Canada Dry » du mois de décembre, mais cette réforme était attendue. En effet, elle pallie l'épuisement de l'ordonnance de 1945, qui ne répond plus aux enjeux de la nouvelle délinquance des mineurs, du fait notamment des délais de la réponse pénale et d'un nombre excessif de détentions provisoires de mineurs.

C'est pourquoi le Sénat a considéré qu'il fallait aller au bout de cette réforme, tout en respectant les principes cardinaux de la justice pénale des mineurs posés par l'ordonnance de 1945 et reprise dans celle-ci : la primauté de l'éducatif sur le répressif, ou encore l'atténuation de la responsabilité du mineur en fonction de son âge. À ce titre, nous avons considéré que, si la présomption simple de treize ans était une bonne mesure, qui permettait de se reposer sur la confiance donnée au juge, il fallait en revanche définir le discernement. C'est ce que nous avons fait ; cette définition a ensuite fait l'objet d'amendements en séance.

Un autre principe fort de la justice des mineurs est celui de la spécialisation des juridictions. Nous l'avons poussé jusqu'au bout, considérant que le tribunal de police n'avait pas à être compétent pour les contraventions des quatre premières classes commises par des mineurs. Il s'agit souvent de premières infractions ; les confier à la justice des mineurs permet d'agir très tôt. Quant au rôle du juge des libertés et de la détention (JLD), s'il faut concilier impartialité et spécialisation du juge, il nous a paru préférable au vu de ce même principe de confier cette compétence, préalablement à l'audience de culpabilité, à un autre juge des enfants, voire à un magistrat désigné par le président du tribunal judiciaire.

Les sénateurs ont aussi considéré que la réussite de la réforme dépendra des moyens humains et matériels mis en oeuvre, mais aussi de la fluidité et de l'agilité de la procédure. Le lien entre la magistrature et la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) est crucial. C'est pourquoi nous avons introduit la numérisation du dossier unique de personnalité du mineur, l'obligation de mettre en place à l'audience de culpabilité une date pour la mise en oeuvre des mesures éducatives par la DPJJ et la convocation des parents par tous moyens.

Enfin, conscients des enjeux et soucieux de faire réussir cette réforme attendue, les sénateurs ont considéré qu'il était précipité de prévoir la mise en oeuvre de cette réforme dès le 31 mars prochain. Tous les magistrats ne sont pas prêts ; il reste dix juridictions où le stock d'affaires retardées par la crise sanitaire reste important. Cela aggraverait les difficultés liées à la nécessité du double audiencement dans la période de transition. Les moyens informatiques eux-mêmes ne seront pas prêts à cette date. C'est pourquoi il nous a paru opportun de reporter l'entrée en vigueur de cette réforme au 30 septembre prochain.

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