Un mot sur le contexte particulièrement difficile que nous traversons : le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) est entièrement mobilisé sur un double front, la crise sanitaire tout à fait extraordinaire et le renforcement de la pression terroriste ; les réunions du conseil de défense et de la sécurité nationale se succèdent à un rythme inégalé - j'y étais encore juste avant de vous rejoindre. À ce travail interministériel de gestion de crise s'ajoute un effort pour réviser la planification, que nous avons engagée sans attendre la fin de la crise sanitaire et qui devra s'enrichir des différents travaux en cours, en particulier ceux de la commission d'enquête sénatoriale. Sans parler des tensions internationales, qui appellent des travaux d'analyse et de prospective, en particulier sur les menaces cybernétiques, mais nous y reviendrons.
Le budget du programme 129 est modeste à l'échelle de l'État, comme l'est le budget de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». En 2019, nous avons exécuté 290 millions d'euros au titre des autorisations d'engagement (AE) et 277 millions d'euros au titre des crédits de paiement (CP) ; cette année 2020, si particulière, nous devrions parvenir à exécuter notre budget qui, après mise en réserve, atteint 293,9 millions d'euros en AE et 262,7 millions d'euros en CP - la baisse en CP est liée à des transferts techniques d'équivalents temps pleins (ETP) vers le ministère des armées.
La situation sanitaire a eu des effets budgétaires : les missions à l'étranger ont quasiment toutes été suspendues, des exercices ont été reportés du fait du confinement. Néanmoins cette moindre consommation de crédits nous a permis de compenser les surcoûts liés à l'achat d'équipements de prévention sanitaire et de protection de nos agents, ainsi que de matériels informatiques sécurisés pour le télétravail.
Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit, pour le SGDSN, un budget de 313,2 millions d'euros d'AE et de 285,5 millions d'euros de CP, sans compter les probables mises en réserve. Le schéma d'emploi avait autorisé pour 2020 la création de 55 emplois au SGDSN (42 emplois à l'ANSSI et 13 emplois au Groupement interministériel de contrôle (GIC)). La situation prévisionnelle des entrées et sorties projetées au 31 décembre 2020 aboutit à la pleine réalisation de ce schéma d'emploi, malgré les circonstances que nous connaissons, qui rendent plus difficiles les recrutements. La loi de finances initiale pour 2021 prévoit la création de 62 équivalents temps plein (ETP) pour l'ensemble du périmètre du SGDSN, conformément au plan qui était prévu ; l'ANSSI bénéficiera encore de 40 emplois supplémentaires. Cette progression devrait se poursuivre en 2022 avec un accroissement de 67 ETP pour l'ANSSI, et encore de 50 ETP en 2023, correspondant au renforcement de l'Agence et au développement de l'opérateur des systèmes d'informations interministérielles classifiées. Le plafond d'emplois est ainsi fixé pour 2021 à 1 069 ETP.
Nous prévoyons, pour l'an prochain, l'installation d'une partie de l'ANSSI à Rennes, nous provisionnons pour ce faire 33,5 millions d'euros en AE et 9,5 millions d'euros en CP. Face à une cybermenace plus forte, nous avons décidé d'engager un effort important pour piloter la transformation numérique de l'État, pour doter les armées et les services de renseignement de moyens d'action adéquats et assurer la sécurité des systèmes d'information les plus importants de l'État, mais aussi des entreprises françaises, qui font face à des attaques de plus en plus nombreuses et importantes. Les bâtiments de l'Hôtel national des Invalides et de la tour Mercure, dans le 15e arrondissement de Paris, étant bien remplis, nous avons décidé de délocaliser une partie des effectifs à Rennes, où se trouve déjà la Direction générale de l'armement (DGA) et l'état-major des armées, ainsi que des organismes qui travaillent dans le domaine de la cybernétique. Cette délocalisation va renforcer les synergies entre les parties civile et militaire. Nous allons aussi ouvrir une deuxième antenne en Île-de-France au sein du Campus cyber, auquel participent quelque 54 entreprises.
La fermeture de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ), ensuite, décidée par le gouvernement précédent dans le cadre d'une rationalisation, s'est traduite par une économie de 5 millions d'euros de subvention pour charge de service public et de 1,5 million d'euros pour le SGDSN, du fait du transfert de missions vers le ministère de l'intérieur - l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP), en particulier, a été rattaché au service statistique du ministère de l'intérieur, lequel présente toutes les garanties d'indépendance, étant dirigé par une administratrice générale de l'INSEE. Les actions comme les enquêtes de victimisation et les programmes de formation dispensés par l'INHESJ, très appréciés, vont être poursuivis au sein d'un service à compétence nationale créé le 26 septembre au sein du ministère de l'intérieur et vers lequel nous transférons 26 agents.
Nous allons avoir un travail considérable pour gérer ce que vous qualifiez de « surchauffe », monsieur le président - et je peux vous assurer que nous sommes très mobilisés. D'ores et déjà, nous travaillons à la refonte du plan Pandémie, en prenant en compte les retours d'expériences et les analyses, dont celles de votre commission d'enquête, et nous réfléchissons à une révision globale de la planification de crise. Nous avons un très bon plan Pandémie grippale, nous l'avons utilisé au début de la crise sanitaire, mais nous avons vite rencontré ses limites puisque, contre la grippe, il tend à la vaccination de la population et à l'achat de matériels manquants à l'étranger, alors que nous ne disposons pas de vaccin contre la covid-19 et, la pandémie étant générale, la tension était partout sur l'accès aux matériels. Ces tensions sur l'accès aux matériels de protection font reconsidérer la localisation de la production de ces matériels, leur stockage, et au-delà même la coopération entre l'État et les collectivités territoriales, tant il est clair que les préfets et les élus locaux doivent pouvoir travailler ensemble dans la gestion de la crise et sur la suite.
Nous devrons également, l'an prochain, renforcer nos moyens de lutte contre la cybercriminalité, suivre de très près le Brexit, lequel peut entraîner une situation de crise difficile à gérer, et, bien sûr, continuer de suivre la situation internationale, avec ses tensions nationalistes, et ses sujets de protection de notre pays, en particulier la menace terroriste endogène et exogène. Je dois également mentionner l'intelligence économique et la protection de nos entreprises contre certaines menaces. Sur tous ces sujets, vous pouvez pleinement compter sur la mobilisation complète des militaires et des fonctionnaires civils du SGDSN.