Madame Darcos, vous avez rappelé qu'une aide a été accordée aux libraires en fin d'année sous la forme d'une prise en charge des frais de port. Le public a ainsi pris conscience de l'existence et de l'efficacité des sites internet des librairies. Mais cette aide étant ponctuelle, les libraires ne vont pas pouvoir continuer à honorer les commandes internet, qui ont d'ailleurs beaucoup baissé depuis début janvier, alors que les frais classiques s'appliquent de nouveau.
Concernant l'idée d'une compensation intégrale des frais de port, est-ce à l'État de s'aligner sur la politique prédatrice d'Amazon en la matière ? Nous souhaiterions vivement que les libraires bénéficient d'un tarif de livraison privilégié, afin de supprimer le delta avec Amazon.
Quant à la suppression du rabais de 9 % aux collectivités territoriales, elle est certes ambitieuse, mais nécessaire. Beaucoup de librairies, pas forcément les plus grandes, travaillent avec les bibliothèques. Les plus grandes bénéficient en général de bonnes remises chez les éditeurs. Pour les plus petites librairies, situées dans des lieux plus « sauvages » du territoire français, la négociation avec les éditeurs sera plus compliquée. Mettons qu'une petite librairie obtienne un marché auprès d'une bibliothèque ; si l'on additionne les 9 % de rabais aux 6 % prélevés par la Société française des intérêts des auteurs de l'écrit (Sofia), sachant que la remise accordée aux libraires est de 32 % sur le prix du livre, et vu le travail considérable qu'exige une commande publique, cela laisse peu de marge pour vivre.
Je suis tout à fait prête, néanmoins, à échanger sur les enjeux auxquels sont confrontées les collectivités locales ; il faut trouver une solution pérenne à ce problème structurel.
Je suis très favorable, par ailleurs, à ce que l'on ouvre une discussion sur le soutien aux libraires des petites villes. La distribution physique du livre peut s'avérer très complexe, d'un point de vue logistique, dans certains petits territoires. Accompagner les libraires sur ce plan, cela ne peut que les aider à s'enraciner. Je précise que, venant d'Amiens, j'ai eu plusieurs contacts avec Xavier Bertrand au sujet des aides que la région Hauts-de-France pouvait apporter aux libraires.
J'en viens au pass culture. Dans les librairies tests, l'expérience a été très positive. Le livre est le premier bien culturel que l'on achète avec le pass, et cette opération nous a permis d'accueillir des jeunes que nous ne voyions jamais en librairie auparavant. Il s'agit donc d'un bon dispositif, qu'il faut pérenniser et enrichir.