Répondre à cette infinité de questions prendrait des heures ; j'ai préféré me limiter à deux questions importantes.
La première est la soutenabilité de la dette : Jézabel Couppey-Soubeyran a indiqué très clairement qu'à ses yeux elle n'était pas soutenable. Je suis d'un avis contraire. Après avoir exposé les divers éléments de réflexion et montré qu'il fallait tenir compte de l'incertitude pour les cinq à dix ans qui viennent compte tenu des taux d'intérêts, de la croissance, de la maturité de la dette et de la possibilité d'augmenter ou non certains impôts, j'arrive à la conclusion que, selon nos hypothèses, la dette est très probablement soutenable. Il n'est donc pas urgent de diminuer ou d'annuler la dette, et une place reste vacante pour engager de nouvelles dépenses pour lutter contre la covid si la situation se dégradait encore.
La seconde question, sur laquelle je ne suis pas d'accord avec Jézabel Couppey-Soubeyran, est l'annulation de la dette. Il faut procéder par étape. En principe, l'annulation d'une partie de la dette aurait des implications majeures, dont des faillites. Mais ce dont on parle, c'est uniquement l'annulation de la dette détenue par la BCE. Et là, je suis totalement perdu par le débat : certains disent que c'est bien, d'autres que c'est mal ; moi, je dis que cela ne change rien ! C'est un point fondamental que j'expliquerai en deux temps.
Imaginons tout d'abord que la Banque de France détienne des obligations du Trésor et décide d'annuler cette dette et les intérêts qui y sont afférents. Cela aboutit à ce que les profits basés sur le paiement des intérêts annulés ne pourront pas être reversés à l'État, et cette perte correspond exactement à la diminution initiale des intérêts. Par conséquent, du point de vue des revenus nets, c'est zéro ! C'est une simple question d'arithmétique.
C'est un peu plus compliqué dans le cas de la BCE. En effet, si elle décidait d'annuler la dette française et que cela diminuait ses profits, l'Allemagne et d'autres pays en profiteraient par des effets de distribution. Cela étant politiquement impossible, la BCE serait contrainte de diminuer la dette de tous les pays dans les mêmes proportions, et on en revient alors au même argument que j'ai avancé précédemment.
Il faut arrêter cette discussion « idiote », si je puis dire - Jézabel Couppey-Soubeyran me pardonnera ce terme. Au mieux, ce débat pourrait avoir des effets psychologiques divers, au pire il n'a aucune raison d'être.
Concernant l'inquiétude des citoyens et des investisseurs, je suis totalement d'accord avec ce qui a été dit : les premiers sont encore dans le mode traditionnel où la dette était considérée comme dangereuse et annonciatrice d'énormes impôts ; les investisseurs, eux, sont confiants et se demandent simplement s'ils vont être payés en temps et en heure. Il y a donc une dichotomie entre les deux. En l'espèce, ce sont les investisseurs qui ont raison et les citoyens qui sont trop inquiets.