Monsieur le président, monsieur le ministre des solidarités et de la santé, mes chers collègues, encore inconnue il y a moins d’un an, la covid-19 a donné lieu à une crise sanitaire inédite dont l’ampleur semblait à l’époque davantage dystopique qu’envisageable.
Nous sommes réunis ce jour pour un débat non sur la crise dans son ensemble, mais sur les conclusions du rapport de la commission d’enquête. La constitution de celle-ci s’inscrit pleinement dans le rôle de contrôle de l’action du Gouvernement par le Parlement et relève bien de notre responsabilité vis-à-vis des Français. Cette mission est essentielle et nous y sommes évidemment favorables.
Cette commission d’enquête a réalisé un travail qu’il faut souligner et que les sénateurs de notre groupe saluent : 133 personnes ont été auditionnées au cours de quarante-sept entretiens. Ces cent deux heures de travail ne permettent pourtant pas d’établir un constat exhaustif de la gestion d’une crise sanitaire mondiale aussi unique.
Comment contrôler l’action du Gouvernement face à une épidémie qui faisait encore hier 439 victimes en vingt-quatre heures ? Comment critiquer des mesures sans le recul nécessaire à une analyse raisonnée et sans même pouvoir établir de comparaisons efficaces ? Il y a un an tout juste, le bilan humain de la covid-19 dépassait celui du syndrome respiratoire aigu sévère, le SRAS, avec 814 décès confirmés. Mondialement, aujourd’hui, on dénombre 2 millions de victimes.
Un an de vagues, de reprises, d’accalmies et maintenant de variants. Douze mois de gestes barrières à s’approprier, douze mois de vie sociale à l’arrêt. Plus de 3 millions de cas détectés et 2 millions de doses de vaccins administrées.
Aussi, prenant acte des conclusions du rapport et bien que cet exercice soit indispensable, nous émettons une forte réserve quant à la temporalité de cette publication.
Cette situation exceptionnelle aura forcément causé certains écueils, il serait utopique de prétendre le contraire. Pour autant, le temps du bilan arrivera, mais plus tard, lorsque les hôpitaux auront enfin un répit et que les chiffres de la contamination ne rythmeront plus nos vies. Alors, l’analyse sera efficace et essentielle, mais pas maintenant. Ce temps long nous oblige à ne pas porter de jugement trop hâtif. Ce temps long force à l’humilité.
Il faut rappeler que la commission d’enquête a commencé ses travaux durant les vacances d’été, alors que les courbes étaient au plus bas. Elle les a poursuivis pendant la campagne des élections sénatoriales. Les faits démontrent aujourd’hui que nous ne partageons plus certaines des certitudes que nous avions hier. Les pays vus comme exemplaires au regard des stratégies qu’ils ont déployées lors de la première vague ne le sont plus actuellement : la situation de nos voisins outre-Rhin s’est malheureusement aujourd’hui dégradée.
Mes chers collègues, si la comparaison se révèle souvent utile en matière de gestion de crise sanitaire, elle n’est pour autant pas une science exacte. La fascination pour d’autres pays qui feraient mieux que nous dans tel ou tel secteur, mais qui, dans le même temps, ont fermé leurs écoles depuis huit ou neuf mois ne doit pas nous faire perdre de vue l’essentiel.