Intervention de Jean Hingray

Réunion du 10 février 2021 à 15h00
Fonctionnement des universités en temps covid et malaise étudiant — Débat organisé à la demande du groupe écologiste – solidarité et territoires

Photo de Jean HingrayJean Hingray :

Madame la ministre, « on veut un amphi, pas un psy ! » Cette phrase-choc, rappelée par mon collègue et ami Pierre-Antoine Levi, devrait être complétée par : « On veut un vaccin, c’est plus sain ! »

Il faut ouvrir au plus vite nos universités. Trop de destins, trop d’histoires, trop de vies, trop d’avenirs sont en jeu. Des artistes, des chercheurs, des entrepreneurs, des praticiens en herbe sont en pleine régression, en pause prolongée. Tous sont en souffrance, beaucoup à l’agonie, en détresse, précarisés, hors sol, désorbités, sacrifiés. On préfère faire l’aumône d’un psy plutôt qu’offrir un vaccin. Demandez aux parents et aux grands-parents ce qu’ils pensent de cette catastrophe annoncée !

Il ne s’agit pas d’opposer une classe d’âge à une autre, une génération à une autre. Le serment d’Hippocrate ne fait pas de priorité entre un patient âgé et un jeune patient. Mais le serment d’Hippocrate constitue-t-il l’alpha et l’oméga de la conduite d’une nation ? Ne faut-il pas introduire un délit de non-assistance à génération en danger ? Surtout quand il faut compter sur elle pour prendre le relais, financer nos retraites, fonder des familles, inventer, créer et aller de l’avant ?

Il n’y a pas que des décideurs politiques pour lancer l’idée d’une vaccination des étudiants comme prélude à la réouverture des universités et comme témoignage du prix que nous attachons à la jeunesse de notre pays. J’entends de grands médecins plaider pour une vaccination des étudiants. Le professeur Didier Sicard, ancien président du Comité consultatif national d’éthique, l’a proposée. Le professeur Jean-Luc Dumas, ancien doyen de la faculté de médecine de Bobigny, le rejoint.

Cette stratégie de vaccination des étudiants est d’autant plus pertinente que le vaccin AstraZeneca ne semble pas adapté aux plus de 65 ans, comme le précisent les autorités de santé allemande et autrichienne. L’agence du médicament italienne recommande un « usage préférentiel » pour les 18-55 ans, et cette barre des 55 ans a également été retenue par le chef de l’unité de coordination anti-covid en Bulgarie.

Le vaccin n’est pas contre-indiqué pour les plus de dix-huit ans. Bien au contraire : son taux de couverture est excellent !

Qui nous reprocherait de passer aux actes en faveur d’une vaccination étudiante ? Pas les 2, 7 millions d’étudiants, ni leurs familles, ni la communauté pédagogique et encore moins le monde économique ! Mais qui demain ne nous le reprocherait pas si nous n’agissions pas aujourd’hui ? Imaginez l’ampleur d’un tel procès : il pourrait renvoyer notre avenir « façon puzzle » dans tous les coins de l’Hexagone.

Bien entendu, être vacciné ne signifie pas abandonner les gestes barrières individuels. Nous saurons le rappeler aux intéressés, et ils sauront prendre des engagements.

Si le distanciel est devenu une modalité, voire une consigne, luttons de toutes nos forces pour que le présentiel demeure un acquis. C’est aussi la condition de la santé mentale de toute une génération en danger.

La raison et la science nous permettent d’espérer. Il ne manque que le courage pour franchir le pas et, pour beaucoup, dont je suis, quitter cette zone d’inconfort qui consiste à laisser notre jeunesse dans les limbes, morts-vivants dans l’antichambre la vie !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion