Intervention de Caroline Cayeux

Délégation aux Collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 28 janvier 2021 à 9h30
Table ronde sur l'actualité des collectivités territoriales avec la participation de mm. christophe bouillon président et loïc hervé président délégué de l'association des petites villes de france apvf mme caroline cayeux présidente de villes de france vf et m. michel fournier président de l'association des maires ruraux de france amrf

Photo de Caroline CayeuxCaroline Cayeux, présidente de l'association Villes de France (AVF) :

Je tiens à saluer mes anciens collègues sénateurs que j'ai quittés pour redevenir maire de Beauvais et présidente de son agglomération. Je vous rappelle que l'Association Villes de France représente 600 villes de 20 000 à 100 000 habitants qui rassemblent environ 20 millions de Français.

La situation sanitaire préoccupe évidemment au plus haut point mes collègues maires, qui se demandent si, après un couvre-feu à 20 heures, puis à 18 heures en raison de la propagation du virus, l'apparition de variants du coronavirus encore plus contagieux va amener le Gouvernement à décider un troisième confinement. Comme mes collègues présidents d'associations d'élus locaux, nous allons participer à la visioconférence que le Premier ministre va animer ce soir et je forme le voeu qu'il saura nous écouter. L'absence de perspectives est devenue très anxiogène pour nos concitoyens. Elle inquiète les décideurs économiques, les décideurs publics, mais aussi, au plus haut point, le monde de la culture et de la restauration. Nous avons besoin de voir le bout du tunnel.

Sur ce volet, nous sommes des relais de confiance auprès de nos concitoyens. Si l'État et ses administrations essaient de rassurer les maires en travaillant avec eux, c'est à nous de rassurer nos administrés. Nous avons été constamment en première ligne avec eux depuis le mois de mars dernier. Comme je suis élue de l'Oise, la crise s'est même déclarée le 15 février 2020 avec la détection d'un cluster et les premiers plans d'actions. C'est dire si le temps est long pour les habitants de ce département.

Sur le terrain, le couple maire-préfet a été salué pour son efficacité et son dynamisme. Je me souviens avoir travaillé presque quotidiennement avec le directeur de l'hôpital de Beauvais et le préfet de l'Oise. Quant aux agences régionales de santé (ARS), elles ont été fondées dans le cadre de régions plus raisonnables en taille et l'on constate, quand l'une d'elles couvre un espace allant de Chantilly à Lille, que cela crée de la distance, alors que les élus veulent de la proximité.

À chaque étape de la crise sanitaire, Villes de France a soumis au Gouvernement et aux parlementaires un certain nombre de propositions, comme pour le « Ségur de la Santé », le plan de relance ou, plus récemment, sur la réouverture des commerces dits « non essentiels » ou sur la distinction entre les commerces de proximité et les grandes surfaces.

La vaccination est actuellement notre seule option pour en finir avec l'épidémie. Curieusement, au moment où il y a eu un déclic positif dans l'esprit de la population pour se faire vacciner, on réalise que nous n'aurons pas de doses de vaccins en nombre suffisant. À titre d'exemple, la maire de Saint-Quentin, dans l'Aisne, a reçu hier un appel de son ARS lui signifiant de ne plus prendre aucun rendez-vous de vaccination pour le mois de février...

Il s'avère aussi que tous les départements et territoires ne sont pas logés à la même enseigne. Certains voient leur campagne de vaccination mise à l'arrêt et les maires concernés, qui ont fait l'effort d'ouvrir des salles de vaccination, doivent à présent expliquer et faire accepter la situation à leurs administrés. De plus, ils ignorent si les charges afférentes à la mise à disposition de ces locaux seront assumées par l'État. Dans certains départements, l'ARS a pris la décision de supprimer des plateformes de réservation en ligne du fait de l'absence de vision sur l'approvisionnement des doses. Ces aléas cristallisent l'inquiétude de nos concitoyens et suscitent chez les élus de terrain sinon de la désespérance, au moins une lassitude. Dans un tel contexte, nous souhaitons de la lisibilité, de la cohérence et de la clarté, et à tout le moins de la transparence dans les informations.

Alors que la crise sanitaire a mis à mal le moral de nos concitoyens et notre économie, le plan de relance de 100 milliards d'euros initié par le Gouvernement avait trouvé un écho très favorable parmi les maires et les présidents d'intercommunalité. Nous sommes donc très attentifs à sa concrétisation territoriale. Les villes moyennes pourraient jouer un rôle important, encore faudrait-il que leurs élus soient plus associés en amont au processus de pilotage.

La relance va passer, pour les villes moyennes, par le programme « Coeur de ville », comme il passera pour les petites villes par le programme « Petites villes de demain ». Ce sont des outils importants mais, après une première phase d'études et d'ingénierie, nous devons pouvoir mobiliser des fonds lors de la phase de mise en oeuvre du plan de relance, afin d'être en mesure d'en bénéficier. Or nos capacités d'action sur le plan financier ne sont pas à la hauteur de ce que nous espérions, d'autant que nous avons été financièrement mis à mal lors de la crise sanitaire par la perte de nombreuses recettes de fonctionnement qui ne sont pas prises en compte dans l'indemnisation Covid prévue par l'État. C'est regrettable, car nous portons près de 70 % de l'investissement public local, dont dépendent de nombreuses entreprises de travaux publics. En outre, les critères d'éligibilité du filet de sécurité sont trop exigeants pour que les villes moyennes puissent en bénéficier.

Enfin, nous n'attendons pas du projet 4D le « grand soir », et nous l'avons dit à Jacqueline Gourault. Il est vrai que le volet de « décomplexification » est aussi difficile à prononcer qu'à mettre en oeuvre. Nous avons cependant fait des propositions de simplification à ce titre lors de plusieurs auditions. En matière de décentralisation, nous avons affirmé le principe d'une compétence déléguée sur un pouvoir de police dédiée. En matière d'urbanisme, nous avons proposé que les intercommunalités puissent prendre la compétence du plan local d'urbanisme (PLU) sans aborder un plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) global. Sur le volet santé, nous aimerions avoir un rôle plus décisionnel en tant que présidents du conseil de surveillance des hôpitaux. En matière de déconcentration, nous croyons beaucoup au couple maire-préfet, car il s'agit d'un circuit court, opérationnel et décisionnel, étant entendu que c'est au plus près du terrain que les meilleures décisions sont prises, à l'écoute de nos concitoyens. C'est aussi un moyen de lutter contre une bureaucratie qui devient de plus en plus pesante.

Nous appelons à une véritable différenciation territoriale, car toutes les collectivités n'ont pas les mêmes besoins et n'avancent pas toutes à la même vitesse. Cela se constate en matière de politique de logement, où la carte des grands zonages nationaux mérite d'être revue à l'aune de chaque situation locale, comme c'est le cas dans le cadre de l'expérimentation du Pinel breton, qui commence à faire ses preuves et mériterait d'être généralisé.

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