Intervention de Marie-Christine Saragosse

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 20 janvier 2021 à 9h30
Audition de Mme Marie-Christine Saragosse présidente-directrice générale de france médias monde

Marie-Christine Saragosse, Présidente-directrice générale de France Médias Monde :

Mme Joëlle Garriaud-Maylam, en effet, le COM est court - deux ou trois ans -, ainsi que la loi le permet. Le précédent était de cinq ans, celui d'avant de trois ans. La vraie question est toutefois l'avenir de la redevance, j'y reviendrai.

Nos perspectives de ressources propres augmentent : un des indicateurs montre qu'elles passent de 11,4 millions d'euros à 12,8 millions d'euros. C'est beaucoup, dans la mesure où il n'existe pas de marché publicitaire international, où nous sommes multilingues, où la problématique de chaque pays est spécifique. Il n'existe pas de régie internationale compétente en toutes langues et en tous territoires et les marques, très souvent, n'ont pas de stratégie mondiale ; c'est un marché difficile dans lequel le privé ne se risque pas, alors que les grands médias internationaux plurilingues sont souvent financés sur fonds publics. Pourtant, nos ressources propres augmentent.

Les subventions des bailleurs de fonds ont, elles, plus que doublé, en raison de l'impact de l'AFD sur le financement du projet Afri'Kibaaru et de l'Union européenne. Nous sommes allés chercher des ressources-relais pour ces projets, compte tenu de la baisse de la redevance. Toutefois, les financements par projet doivent sans cesse être renégociés, et ne nous permettent pas d'agir dans la sérénité.

Il en va de même s'agissant d'InfoMigrants, dont les budgets sont négociés tous les deux ans. Nous venons d'obtenir confirmation du soutien de la Commission européenne pour 2021-2022. Ce projet représente 76 millions de contacts annuels en 2020, dans une population mobile et difficile à toucher. La Commission européenne semble contente et nous a demandé de lancer un nouveau développement en bengali. Avec InfoMigrants, nous luttons contre les infox et contre les passeurs et nous faisons de la sensibilisation aux valeurs et aux modes de vie européens. Cependant, comme pour les autres projets, et contrairement à ce que finance la redevance, sa reconduction n'est jamais garantie.

En ce qui concerne Arte, la partie du COM relative aux coopérations prioritaires n'indique pas, c'est vrai, que nous coproduisons dix grands reportages. Arte apprécie que ses équipes soient arrimées à notre direction de la sûreté, et nous remportons des prix ensemble, ce n'est peut-être pas assez dit. La commission pourrait utilement suggérer une rédaction sur ce point.

Monsieur Guérini, s'agissant des coûts de structure et de la masse salariale, le premier élément à intégrer - ce n'est pas facile - est que la masse salariale ne constitue pas pour nous un coût de structure, car nous avons plus de 60 % de journalistes. Il s'agit donc d'un coût de programmes. La masse salariale représente 55 % des dépenses du groupe, mais pas 55 % des coûts de structure, car nous produisons directement nos contenus en multilingue. Sans masse salariale, il n'y aurait pas de contenu. C'est pourquoi l'État ne nous a pas attribué le même indicateur concernant l'allocation de nos ressources au contenu, mais un indicateur d'efficience qui rapporte les dépenses au nombre de contacts hebdomadaires et qui est en baisse, car nos dépenses diminuent alors que nos contacts hebdomadaires augmentent. D'autres médias rendront compte de leurs dépenses de programmes : Arte et France Télévisions achètent des programmes, mais ce n'est pas notre cas. Il y avait une contradiction à nous demander de diminuer notre masse salariale tout en augmentant nos dépenses de programmes, que l'État a levée en nous imposant d'autres indicateurs.

Il existe une autre contradiction apparente : les effectifs baissent en équivalents temps plein alors que la masse salariale augmente un peu en valeur, de 0,4 % par an. Précisons que, en 2020, nous avons créé un revenu de solidarité pour les non-permanents. Ainsi, les correspondants à l'étranger dont la situation était parfois très difficile durant la pandémie bénéficient d'un revenu de sécurité.

Nous avons joué un rôle d'anticorps social sur notre propre budget, sans faire appel au chômage partiel. Beaucoup d'intermittents n'ont pas travaillé en 2020, mais nous leur avons maintenu un revenu minimum.

Quelque 70 % de nos personnels sont des journalistes ; or la Convention collective nationale des journalistes prévoit qu'ils perçoivent une prime d'ancienneté qui représente 1 % de leur salaire de base par an. C'est une mesure réglementaire qui contribue au glissement de la masse salariale à effectifs constants. Notre masse salariale glisse cette année de 1,7 million d'euros, mais pour économiser 1,5 million d'euros, nous devrions supprimer quinze postes... Pendant le confinement, nos personnels ont peu posé de congés : nous avons donc dû provisionner et cela impacte aussi notre masse salariale. Nos effectifs baissent en raison du plan de départ, mais nous allons néanmoins créer des postes dans deux secteurs : d'abord, dans les fonctions support - technique, ressources humaines, achats - pour répondre à la demande de nos tutelles qui considèrent que nous avons trop sacrifié nos coûts administratifs au profit des coûts de contenus ; ensuite, dans le numérique en 2022 - community managers et développeurs. Il est difficile d'isoler les effectifs qui contribuent au numérique, car nous travaillons tous sur cette dimension et tous nos contenus se déclinent en numérique, dans un but éditorial cohérent et multilingue.

La francophonie est la matrice de notre stratégie. Depuis que je suis arrivée, nous ne tenons plus aucune conférence de rédaction en anglais...

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