L'accompagnement à la sortie de la pauvreté est en quelque sorte un angle mort de ma thèse. Ce que je peux dire, c'est que les personnes en situation de pauvreté ou de précarité développent tout un ensemble de pratiques et de stratégies pour se maintenir dans une trajectoire ascendante, ce qui montre, en creux, la faiblesse de l'accompagnement institutionnel et social qui leur est proposé.
Les propos des personnes en situation de pauvreté témoignent de difficultés de coordination entre les institutions ou de difficultés à s'y retrouver. Les cases des documents administratifs ne correspondent pas à la complexité des situations. Associé aux problèmes d'inclusion numérique, cela peut créer du non-recours aux droits.
Il y a, effectivement, des injonctions contradictoires liées au travail. Les personnes en situation de pauvreté ou de précarité peinent à entrer sur le marché du travail, faute de ressources nécessaires pour y parvenir, telles qu'un réseau familial ou des diplômes.
Par ailleurs, on assiste de plus en plus à la formation d'un halo de la pauvreté, avec une partie de la population non pauvre au sens monétaire mais qui se sent pauvre et une autre partie pauvre au sens monétaire mais qui, grâce à un soutien familial par exemple, ne se considère pas comme pauvre.
La stagnation des salaires et l'augmentation du coût de la vie, et notamment des dépenses pré-engagées dans le revenu disponible, font que des ménages se retrouvent étranglés et rejoignent ainsi ce halo de la pauvreté. Ils s'inscrivent dans des processus de privation qui limitent leur participation pleine et effective à la société et à la citoyenneté.
Il me semble important de mettre en rapport les indicateurs d'état et les indicateurs de dynamique. Ce n'est pas du tout pareil d'être pauvre une année donnée et de l'être de façon durable. La formation de ce halo de la pauvreté provient aussi de l'absence de reconnaissance, du déni dont les personnes en situation de pauvreté sont victimes.
Le halo de la pauvreté est également en rapport avec les gilets jaunes et la multitude de visages qui nous y avons vus : travailleurs, jeunes actifs, familles monoparentales, retraités, étrangers... On constate une inadéquation entre la pauvreté monétaire et la pauvreté subjective. Il est important d'y prêter attention.