Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, quarante ans après la mise en place des premières zones d’éducation prioritaire, le constat est sans appel : 70 % des élèves socialement défavorisés ne sont pas scolarisés en réseau d’éducation prioritaire, tandis que la Cour des comptes dresse un bilan plutôt décevant de ces politiques.
La politique d’éducation prioritaire fait l’objet de nombreuses critiques : notamment un cadre trop rigide ou des effets de seuil qui rendent toute modification de la carte scolaire très difficile. Dès lors, une refonte globale semble nécessaire.
En 2019, nos collègues Laurent Lafon et Jean-Yves Roux avaient réalisé un travail de fond, que je salue, sur cette problématique de l’éducation prioritaire, avec la mission d’information sur les nouveaux territoires de l’éducation.
Ils constataient qu’un grand nombre d’élèves, pourtant défavorisés, étaient exclus des dispositifs de REP, et plaidaient alors pour une politique de l’éducation prioritaire définie aux niveaux académique et départemental, avec des critères territoriaux, en concertation avec les élus.
Cette recommandation trouve son application avec le dispositif des contrats locaux d’accompagnement, qui seront le socle de votre expérimentation, madame la secrétaire d’État.
Ce dispositif, qui se veut plus adaptable aux situations locales, permettra de répondre aux écueils des politiques actuelles, en ciblant deux catégories d’établissements : d’une part, des établissements à la lisière des réseaux d’éducation prioritaire ; d’autre part, des établissements ruraux isolés et ne relevant pas des politiques de la ville, dont les besoins sont spécifiques.
Cette expérimentation pourrait être une première réponse à la problématique des écoles dites « orphelines », soit 500 établissements. Ils cumulent toutes les caractéristiques des REP, c’est-à-dire un nombre élevé d’élèves boursiers, des parents issus de catégories socioprofessionnelles défavorisées et un taux de redoublement important.
Ces établissements ne peuvent intégrer ces réseaux d’éducation prioritaire, car leur collège de rattachement recrute une population mixte. Ce sont donc quelque 51 000 élèves qui ne peuvent bénéficier des compensations propres à l’éducation prioritaire, par exemple le dédoublement des classes de CP et de CE1.
Ce dispositif est pourtant efficace pour des élèves en apprentissage de la lecture et de l’écriture. Et ces établissements sont tout à fait identifiés par les élus locaux.
En intégrant une dimension territoriale à son élaboration, cette expérimentation permettra également de mieux prendre en compte les besoins spécifiques des écoles situées en zones rurales, grandes absentes des statistiques.
Certains territoires, particulièrement en zone isolée ou subissant une crise industrielle ou postindustrielle, voient se cumuler des difficultés sociales qui peuvent avoir des effets scolaires. Et ces dernières ont été aggravées par la crise sanitaire que nous traversons.
Dès lors, comment comprendre les fermetures de classes annoncées dans ces territoires, notamment pour les communes de moins de 5 000 habitants ? Ce sont justement ces territoires qui doivent bénéficier d’une attention particulière.
Par exemple, dans la commune vendéenne de Petosse, où je me trouvais la semaine dernière et qui fonctionne en regroupement pédagogique intercommunal avec la commune du Langon, une fermeture de classe est annoncée, alors qu’elle accueille un public connaissant des difficultés sociales et d’apprentissage.
Vous l’aurez compris, madame la secrétaire d’État, si l’idée est de rebattre les cartes pour coller au mieux aux besoins réels des établissements, nous soutiendrons votre expérimentation. Celle-ci ne pourra atteindre ses objectifs qu’en concertation avec les acteurs locaux, et avec des moyens humains.
J’y serai particulièrement attentive, puisque, sur les trois régions choisies pour l’expérimentation, la région Pays de la Loire a été retenue, donc la Vendée, avec des établissements situés sur l’île d’Yeu, à L’Île-d’Elle, à Fontenay-le-Comte, à La Châtaigneraie ou à Chaillé-les-Marais.