Mes chers collègues, nous continuons notre cycle d'auditions relatives au projet de rapprochement entre Veolia et Suez avec l'audition de Mme Dominique Senequier, présidente du fonds d'investissement Ardian.
Par contraste avec le fracas de la bataille médiatique à laquelle se livrent depuis plusieurs mois les protagonistes de ce feuilleton économique, vous êtes restée jusqu'à présent plutôt en dehors du feu des projecteurs et des tribunes de presse. Nous sommes donc heureux de vous recevoir pour échanger au sujet de vos projets pour Suez, comme nous l'avons fait avec le fonds Meridiam.
Veolia, qui a annoncé l'été dernier son intention d'acquérir son principal concurrent, Suez, n'a cessé de présenter son projet de fusion comme le seul à même de garantir que Suez reste français face aux risques de la concurrence chinoise et d'éventuelles cessions à des acteurs étrangers. Dans ses dernières communications, M. Antoine Frérot oppose souvent un projet industriel français à un projet financier américain.
Depuis plusieurs mois, le « nerf de la guerre » est donc l'existence d'éventuelles offres ou d'éventuels projets alternatifs à ceux présentés par Veolia. Est-il possible d'imaginer un avenir pour Suez qui ne passe pas par une fusion avec Veolia, une prise de contrôle étrangère ou une vente à la découpe à Meridiam ou à d'autres concurrents ?
C'est en réponse à cette question qu'Ardian est entré par deux fois dans le dossier Veolia-Suez depuis l'été, d'abord en septembre dernier, où le fonds d'investissement que vous présidez a fait connaître son intérêt pour les 29,9 % de Suez visés par l'offre d'achat de Veolia auprès d'Engie. Vous avez finalement renoncé à déposer une offre concurrente, expliquant vouloir donner du temps aux discussions. Il y a un mois, vous avez finalement déposé avec le fonds américain Global Infrastructure Partners (GIP) une lettre d'intention portant un projet alternatif pour le groupe Suez. Est-ce un projet industriel, un projet financier ? Vous nous le direz.
Pourriez-vous tout d'abord nous éclairer sur les raisons qui ne vous ont pas permis, à l'automne, de déposer l'offre que vous avez finalement remise en janvier ? Est-ce en raison de l'absence d'un partenaire tel que GIP, de difficultés à mobiliser les financements nécessaires ou, tout simplement, par manque de temps ?
Ce calendrier nous interroge sur le cadre dans lequel s'est déroulé l'examen par Engie de l'offre de Veolia. En effet, l'ultimatum qui a été déposé par Veolia dans un délai d'un mois ne semble pas avoir permis l'émergence d'offres alternatives, qui étaient pourtant à portée de main, amenant un blocage de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois, et un durcissement des positions respectives. Un délai minimal serait-il souhaitable dans ce type de situation ?
En outre, l'État aurait-il pu endosser un plus grand rôle pour faire jouer la concurrence et accompagner des offres alternatives telles que celle d'Ardian ? Je crois que vous aviez d'ailleurs informé le ministre de l'économie que vous travailliez sur une proposition. Comment a-t-elle été reçue ? Estimez-vous qu'un soutien de la Caisse des dépôts et consignations ou de Bpifrance aurait pu permettre de constituer plus rapidement une offre alternative à celle de Veolia ?
J'en reviens aux événements les plus récents. Alors que beaucoup présentaient l'offre d'Ardian et GIP comme une opportunité de sortie par le haut du blocage dans lequel se trouvaient Veolia et Suez, l'OPA lancée lundi dernier semble refermer la porte à tout dialogue et abandonner tout semblant d'amicalité, sur laquelle les uns et les autres s'étaient pourtant engagés.
Quelles sont les conséquences concrètes du lancement anticipé de l'OPA sur votre offre de rachat de participations au capital de Suez ? Pourriez-vous nous indiquer si votre projet impliquait lui aussi une OPA sur une partie du capital du groupe ou s'il s'agissait uniquement de racheter les 29,9 % anciennement détenus par Engie ?
Enfin, les négociations amorcées avec Veolia avaient-elles permis de quelconques avancées ?