Intervention de Dominique Senequier

Commission des affaires économiques — Réunion du 17 février 2021 à 8h30
Travaux du comité de suivi veolia-suez — Audition en commun avec la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable de Mme Dominique Senequier présidente d'ardian

Dominique Senequier, présidente d'Ardian :

Merci de votre écoute et de votre disponibilité.

En 2005, j'ai déjà eu l'honneur de m'exprimer devant le Sénat à propos de la privatisation d'EDF lorsque j'occupais mes fonctions au sein du groupe Axa private Equity, devenu depuis le groupe Ardian. Depuis, nous sommes devenus une société de gestion indépendante internationale et majoritairement détenue par ses 750 collaborateurs, dont plus de la moitié travaille à Paris.

Ardian est comparable aux autres sociétés de gestion françaises que sont Amundi, BNP Paribas Asset Management ou encore AXA Investment Managers. À ce titre, Ardian est soumis à toutes les réglementations et aux autorités de supervision nationales, comme l'AMF en France, la Securities and exchange commission (SEC) aux États-Unis, la Financial conduct authority (FCA) à Londres, et quelques autres autorités, puisque nous comptons au total quinze bureaux dans le monde.

Nous nous sommes développés, depuis 24 ans, dans de très nombreux secteurs, et notamment celui des infrastructures. Nous gérons aujourd'hui, comme vous l'avez dit, près de 90 milliards d'euros, ce qui fait de nous - de très loin - le premier acteur européen et le cinquième mondial, les quatre premiers étant américains.

Nous gérons des capitaux qui nous sont confiés par des investisseurs : principalement des fonds de retraite étrangers, car il existe peu de fonds de pension en France investissant à très long terme, des sociétés d'assurance et des fonds souverains. Mon activité m'amène à beaucoup voyager, à ouvrir de nouveaux bureaux dans le monde et je suis très fière de dire que notre société et nos dirigeants sont français. Chaque fois que nos entreprises réussissent à l'étranger, je me réjouis qu'elles portent haut l'excellence du savoir-faire français. Nous sommes les champions de l'accompagnement d'entreprises françaises dans leur développement.

Je suis très heureuse qu'Ardian ait contribué à l'émergence de ces champions européens et mondiaux d'origine française comme Kersia, leader international de la sécurité alimentaire, CLS, spécialisée dans le développement de soutiens dédiés à l'étude, la protection de notre planète et la gestion durable de ses ressources, ou encore Cérélia, magnifique société implantée dans le nord de la France, leader européen de la fabrication de pâtes à tarte et de produits boulangers.

Pour cela, nous investissons massivement dans les entreprises que nous accompagnons, dans leur développement, le renforcement de leurs unités de production, ou encore par l'identification d'opportunités et de relais de croissance.

Nous nous appuyons sur tous nos réseaux de partenaires publics et privés, sur les collectivités locales lorsqu'il y a lieu, sur des sociétés d'acteurs industriels ainsi que des entrepreneurs de très grande qualité.

Notre accompagnement de long terme se traduit par des créations d'emplois - 26 000 en l'espace de quelques années -, et par le partage de la valeur créée avec les salariés des entreprises que nous accompagnons, domaine dans lequel nous avons été pionniers. En 2008, nous avons été le premier acteur du capital-investissement à mettre au coeur de notre activité le partage de cette valeur avec les salariés. Nous avons aussi été l'un des premiers acteurs à insérer dans nos critères d'investissement l'amélioration des impacts environnementaux, sociétaux et de gouvernance de l'entreprise. Nous sommes sur ce point un des leaders mondiaux dans ce domaine.

Cette responsabilité sociétale est au coeur des valeurs d'Ardian, et nous l'appliquons également à notre niveau. À ce jour, plus de 70 % de nos équipes sont actionnaires d'Ardian.

Nous sommes actifs depuis 2005 dans le domaine des infrastructures, dans lequel nous avons ces dernières années considérablement renforcé notre expertise, sous l'impulsion de Mathias Burghardt, qui m'accompagne aujourd'hui.

Nous travaillons aux côtés d'industriels et de collectivités territoriales, en France et en Europe, ainsi qu'aux côtés d'investisseurs dans les domaines des infrastructures environnementales et des télécommunications - des tours pour la téléphonie mobile, de la fibre optique - et des infrastructures de transport, comme les aéroports, les lignes à grande vitesse et les autoroutes. Quelques exemples concrets : Vinci a choisi Ardian pour développer la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux, un des plus grands projets européens d'infrastructure, de l'ordre de 8 milliards d'euros. Nous avons également été choisis par EDF dans un partenariat à 50-50 pour reprendre Géosel à Manosque, deuxième site européen de stockage d'hydrocarbures du groupe Total, site éminemment stratégique pour la France.

Vous vous en souvenez, il y a quelques mois, les départements d'Île-de-France, avec le regretté Patrick Devedjian, ont également fait appel à nous pour proposer au Gouvernement une solution innovante dans le cadre de la privatisation des aéroports de Paris. Nous avons été choisis en particulier pour notre ancrage territorial, notre expérience - nous sommes actionnaires d'aéroports dans toute l'Italie -, notre capacité d'investissement et notre expertise industrielle.

Je vous remercie de nous auditionner aujourd'hui afin que nous puissions vous expliquer notre démarche et vous convaincre de notre ambition pour Suez.

Dans ce dossier, nous distinguons deux phases. La première débute en septembre, lorsque la direction de Suez nous contacte en vue de proposer une offre alternative sur l'ensemble du groupe Suez. Nous avons bien sûr répondu présent, car Suez est une très belle entreprise, l'un de nos rares leaders mondiaux dans ce domaine, avec une vision et un plan stratégique solide et pertinent, « Suez 2030 ». Cette première phase s'est achevée le 4 octobre 2020, lorsque nous décidons de ne pas donner suite à notre lettre d'intention face à la précipitation d'Engie à céder un bloc de 29,9 % de Suez à Veolia.

La seconde phase intervient dès le 17 janvier dernier. Nous avons remis, avec nos partenaires de GIP, une lettre d'intention au conseil d'administration de Suez, en prenant acte du fait que Veolia détenait désormais une part significative du capital de son concurrent.

Cette lettre indique qu'Ardian et GIP sont prêts à accompagner Suez dans le cadre d'une solution négociée entre Suez et Veolia. Avec GIP, nous défendons deux convictions très simples. La première est qu'il n'y a pas de meilleur projet pour Suez que celui que l'entreprise s'est choisi pour elle-même. Tout le monde s'accorde pour dire que c'est une très belle entreprise. Nous pensons qu'elle a les moyens de se développer par elle-même. N'oublions pas que sa capitalisation est de l'ordre de 11 milliards d'euros ce qui, en France, constitue une très belle situation.

Ma seconde conviction est qu'il existe une voie possible pour Veolia et Suez, tous deux puissants, en mouvement et mieux armés pour investir et se développer. En recentrant chacune de ces deux entreprises sur ses points forts, et avec des stratégies industrielles cohérentes, la France pourrait compter sur deux champions mondiaux, moteurs d'innovation et créateurs d'emplois.

Vos collectivités pourraient bien sûr continuer à bénéficier d'une concurrence réelle, synonyme de progrès technologique, de prix plus compétitifs et d'un engagement environnemental redoublé.

Nous sommes toujours prêts à accompagner une solution négociée qui permettrait à Suez de continuer à mettre en oeuvre son plan dans une version adaptée à la nouvelle donne. Nous n'avons pas toutes les réponses aujourd'hui, mais nous sommes rigoureusement attachés à un certain nombre de points essentiels à la construction d'une solution efficace, avec le maintien d'une identité et d'une implantation française forte, la recherche d'une cohérence industrielle autour de l'eau, la définition d'un périmètre qui doit être suffisamment préservé pour être viable, le maintien de l'intégrité de la recherche de Suez et, bien sûr, l'accord des parties prenantes.

Permettez-moi, à ce stade, de donner la parole à Mathias Burghardt pour qu'il vous expose plus en détail pourquoi nous avons aujourd'hui la conviction de pouvoir contribuer à cette solution.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion