Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux que soit présentée aujourd’hui au Sénat la proposition de loi de Mme la députée Cécile Rilhac.
Cette proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d’école est l’occasion pour moi de rappeler une nouvelle fois, devant la représentation nationale, l’engagement remarquable de ces directeurs depuis le début de la crise sanitaire.
Si nous pouvons afficher aujourd’hui une maîtrise des chaînes de contamination dans les écoles, et ce depuis plusieurs mois, avec un nombre de cas de contamination stable et un nombre très bas de fermetures de classes et d’écoles, ciblées par territoire, et si nous pouvons nous enorgueillir que notre pays soit l’un des seuls au monde à laisser les écoles ouvertes, nous le devons à tous nos professeurs, et tout particulièrement aux directrices et directeurs d’école.
Ceux-ci ont en effet eu un comportement remarquable depuis un an, que ce soit pendant la période de confinement, lorsqu’il fallait aller à la rencontre des familles, durant le déconfinement, quand il était nécessaire de s’adapter, ou encore aujourd’hui, pour que se poursuive l’instruction des élèves.
C’est en effet grâce à eux et à nos professeurs que nous pouvons proposer un modèle, celui de l’école de la République, qui correspond à nos racines les plus profondes. C’est un motif de fierté collective et de gratitude envers nos professeurs, nos directrices et nos directeurs d’école.
Ces directeurs, dès l’annonce de la fermeture des écoles en mars dernier, se sont mobilisés pour maintenir le lien avec les familles. Ce sont encore eux qui, dès le 11 mai dernier, ont permis à nos écoles de rouvrir, en respectant l’exigence du protocole sanitaire qui s’appliquait.
Ce sont eux aussi qui, depuis septembre, veillent à l’application de l’ensemble des mesures sanitaires et mettent en œuvre les mesures d’accompagnement personnalisé qui s’imposent pour beaucoup d’élèves. Il y aurait mille et un exemples à donner de l’ampleur de leur travail et de leur engagement de chaque jour. Les parents d’élèves le savent, qui les voient agir au quotidien.
D’année en année, les missions et les responsabilités des directrices et directeurs d’école se sont considérablement accrues. Aujourd’hui plus qu’hier, ils doivent dialoguer avec les parents d’élèves, les collectivités, porter le cadre de l’institution et le garantir, accompagner les évaluations nationales et les évolutions pédagogiques.
Ces évolutions exigent des compétences plus importantes au quotidien, un positionnement plus fort dans notre institution, des responsabilités plus grandes et mieux reconnues.
Ces évolutions sont nécessaires. Et cette conviction, mesdames, messieurs les sénateurs, a toujours été la mienne.
Depuis mon arrivée au Gouvernement, vous le savez, j’ai fait de l’école primaire la priorité de mon ministère. Malgré la baisse constante des effectifs dans les classes – moins 195 000 élèves depuis 2017, ce qui doit, je le dis souvent, nous alerter sur les enjeux démographiques –, ce sont 7 500 postes qui ont été créés dans le premier degré depuis quatre ans, et 2 616 lors de la dernière rentrée.
Dès l’été 2019, j’ai souhaité que le chantier de l’amélioration de la situation des directrices et des directeurs d’école fasse partie de l’agenda social du ministère. Comme vous le savez, nous avons ainsi conduit une phase de diagnostic qui a reposé, pour partie, sur une consultation en ligne à laquelle les deux tiers des directeurs ont répondu.
Nous avons rendu publics les résultats de cette consultation, qui nous a permis de mesurer l’ampleur de l’attente de nos directrices et directeurs d’école. Les travaux ont été engagés, et les premières réponses ont été apportées. Depuis septembre dernier, en effet, plusieurs évolutions permettent d’améliorer l’exercice de leurs missions. J’en évoquerai les principales.
En premier lieu, afin de leur donner plus d’autonomie dans l’exercice de leur métier et d’alléger leurs tâches administratives, j’ai souhaité qu’ils aient la pleine responsabilité de la programmation et de la mise en œuvre des 108 heures annuelles de service dans le cadre réglementaire existant.
Cette mesure s’est accompagnée d’une rationalisation du nombre et du calendrier des enquêtes, ainsi que d’une recherche d’amélioration de leurs outils numériques de gestion. Tout cela contribue à alléger le carcan administratif et à redonner aux directeurs d’école les marges de manœuvre nécessaires, pour leur permettre de se recentrer sur l’essentiel, à savoir le pilotage de leur école.
En deuxième lieu, j’ai souhaité que les directrices et directeurs d’école soient plus et mieux entourés, afin qu’ils ne se sentent plus isolés dans leur travail quotidien.
Nous avons ainsi augmenté les aides administratives, et 2 500 nouveaux jeunes en service civique sont désormais mobilisés pour les épauler. S’y ajoutent 900 nouveaux contrats de préprofessionnalisation signés ou en cours de signature. Ces contrats permettent à des jeunes qui se destinent au métier de professeur de s’y préparer, tout en renforçant les capacités d’encadrement de l’école.
En complément de ces appuis précieux, sinon indispensables, et dans l’attente du vote de la proposition de loi, nous expérimentons depuis la dernière rentrée une fonction de référent pour les directrices et directeurs d’école.
Placés auprès des directions des services départementaux de l’éducation nationale, ces référents leur apportent écoute et conseils dans l’exercice de leurs missions. Cet accompagnement vient compléter les deux journées de formation minimum désormais accordées aux directrices et directeurs.
Dès la mi-octobre, j’ai confié à Jean-Michel Coignard, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, une mission de suivi sur la mise en place des mesures annoncées à la rentrée 2020.
En troisième et dernier lieu, une indemnité exceptionnelle de 450 euros a été versée à l’automne aux directeurs d’école afin de reconnaître leur rôle fondamental dans la gestion de la crise sanitaire. Il y a quelques jours, cette indemnité de 450 euros a été pérennisée et a fait l’objet d’une publication, ce qui marque une étape supplémentaire, mais non définitive, pour la juste reconnaissance des conditions d’exercice de ces professionnels. Dans le cadre du Grenelle de l’éducation, nous continuerons à revaloriser cette fonction.
Pour en venir aux travaux qui sont encore sur le métier, j’évoquerai la question des décharges et celle des délégations de compétences.
À la rentrée de 2021, comme je m’y étais engagé, un nouveau régime des décharges sera installé. J’ai d’ores et déjà annoncé que 600 emplois supplémentaires seraient consacrés au renforcement des décharges des directrices et directeurs d’école, leur répartition ayant fait l’objet d’une large concertation avec les organisations représentatives.
Enfin, en ce moment même, nous travaillons avec les partenaires sociaux sur la possibilité d’une délégation de compétences des inspecteurs de l’éducation nationale. Comme je l’ai dit à l’Assemblée nationale, j’y suis favorable ; nous en reparlerons sans doute. Les directeurs bénéficieraient alors de marges de manœuvre beaucoup plus grandes, dans une juste adéquation avec leur niveau de responsabilité réel.
Ces réflexions ont été portées dans le cadre du Grenelle de l’éducation. Elles visent à mieux identifier et mieux reconnaître les responsabilités des directeurs d’école.
Mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les évolutions qui sont déjà réalisées et celles qui sont à venir. Je veux croire que cet exposé vous aura montré combien notre ministère a pris à bras-le-corps cette question, dont les enjeux sont intimement liés à la réussite de nos élèves.
L’étape d’aujourd’hui est très importante. La proposition de loi de Mme la députée Cécile Rilhac, que je salue, a pour objet de consacrer, sinon de renforcer, par la loi la plupart des mesures que je viens de vous présenter, qu’il s’agisse de la reconnaissance nécessaire de la fonction de directrice ou directeur d’école, de l’autonomie de ces professionnels, de l’accompagnement matériel et humain auquel ils pourront prétendre et du nouveau régime de décharges dont ils bénéficieront.
Je tiens encore une fois à rendre hommage au travail de Mme Rilhac, qui n’a pas été seulement d’élaboration, mais aussi de concertation. Ces sujets complexes méritent en effet d’être mûris grâce aux discussions avec l’ensemble des acteurs de terrain, auxquels je souhaite m’adresser par votre intermédiaire, mesdames, messieurs les sénateurs ; je veux leur dire notre gratitude et notre reconnaissance, mot que j’utilise dans son sens le plus fort.
Le présent débat et les votes qui vont intervenir sont en effet une manière de rappeler que cette fonction est essentielle et de prévoir les moyens juridiques et matériels qui correspondent à cette reconnaissance.
Cette proposition de loi assied ainsi la place légitime que nous devons donner aux directrices et directeurs d’école dans notre institution, au bénéfice de tout notre système éducatif.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je sais à quel point vous êtes attachés à cette question, sur laquelle certains d’entre vous ont beaucoup travaillé. Des concertations ont également eu lieu au sein du Sénat, et je veux vous en remercier.
Cette proposition de loi peut déboucher sur une loi qui traduirait un consensus : la reconnaissance de cette fonction, exprimée avec force par la représentation nationale. J’accueille favorablement ce texte, que je vous invite à adopter largement à l’issue de nos débats.
Le 15/11/2021 à 13:43, aristide a dit :
Encore un peu plus de hiérarchie à l'école ? Les valeurs de la République, ou comment bien faire la différence entre un subordonné et un supérieur...
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