Intervention de Martine Filleul

Réunion du 11 mars 2021 à 14h45
Lutte contre le plastique — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Martine FilleulMartine Filleul :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai le plaisir de vous présenter le texte que la commission a élaboré pour cette proposition de loi visant à lutter contre la pollution plastique.

J’en salue la première signataire, ma collègue Angèle Préville, auteure du rapport de l’Opecst consacré à ce sujet primordial. Je salue également les membres de notre commission qui avaient contribué à améliorer la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC. Je me réjouis d’avoir retrouvé sur cette proposition de loi le même état esprit volontariste et constructif. Je remercie notamment pour leur sens du dialogue la rapporteure de la loi AGEC, Mme Marta de Cidrac, et le président de la commission, M. Jean-François Longeot. Je forme le vœu que nous travaillions dans le même état d’esprit transpartisan lors de l’examen à venir du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dit projet de loi Climat et résilience.

À titre liminaire, je veux rappeler que la commission a adopté un amendement tendant à changer l’intitulé de la proposition de loi de manière à mieux l’articuler avec son objet : la lutte contre la pollution plastique, plutôt que la lutte contre le plastique. Ce texte vise bien à s’attaquer à la pollution induite par ce matériau, plutôt qu’à cette matière elle-même.

Cette précision faite, j’évoquerai les articles de la proposition de loi initiale, ainsi que les amendements sur ces articles qui ont été adoptés en commission.

L’article 1er vise à renforcer le cadre juridique relatif aux fuites de granulés de plastique dans l’environnement, introduit dans l’article 83 de loi AGEC sur l’initiative du Sénat. Les rejets annuels dans l’environnement de ces granulés sont estimés, à l’échelle européenne, à 25 000 tonnes. Il est donc urgent de prévenir la fuite de ces granulés qui s’accumulent sur nos littoraux, dans nos mers et dans nos océans.

Afin de s’adapter à la rédaction de l’article 83 de la loi AGEC et de tenir compte du projet de décret d’application, la commission a adopté un amendement de réécriture de l’article 1er visant à contraindre les sites concernés à déclarer annuellement les pertes et fuites de granulés et à mettre en place des systèmes d’information par voie d’affichage afin de les prévenir.

L’article 2 vise à interdire l’ajout intentionnel de microbilles de plastique dans les détergents. Je rappelle que les rejets annuels de ces plastiques s’élèvent à 36 000 tonnes à l’échelle européenne. Afin de laisser un délai raisonnable aux producteurs pour retirer les produits mis sur le marché et modifier leurs procédés de fabrication à grande échelle, un amendement a été adopté visant à prévoir une entrée en vigueur légèrement différée au 1er juillet 2022.

L’article 3, quant à lui, vise à assimiler les lâchers intentionnels de ballons de baudruche en plastique à l’abandon de déchets dans l’environnement. Le code de l’environnement permet d’ores et déjà de l’assimiler à un tel abandon de déchets. Pour autant, la commission a estimé nécessaire de clarifier le droit en vigueur ; elle a donc adopté cet article.

Enfin, l’article 4 prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport au Parlement sur les impacts sanitaires, environnementaux et sociétaux de l’utilisation dans l’industrie textile de fibres de plastique pouvant être à l’origine de microfibres dans l’environnement.

J’en viens maintenant aux éléments de débat additionnels qui ont nourri nos travaux en commission.

La commission a tout d’abord introduit un article encadrant l’usage des granulés de plastique utilisés sur les terrains de sport synthétiques. Ces granulés se dispersent dans la nature à raison de 50 kilogrammes par terrain et par an, soit un rejet de 16 000 tonnes à l’échelle européenne !

Deux solutions sont proposées dans un rapport de l’Agence européenne des produits chimiques (AEPC) qui devrait paraître très prochainement : une interdiction ou la mise en place de mesures techniques de confinement au niveau des terrains de sport. Ces solutions seront prochainement soumises à l’arbitrage de la Commission européenne et des États membres.

Les mesures de confinement proposées n’offrent qu’une garantie limitée en matière environnementale, en comparaison avec une restriction d’usage. De surcroît, rien n’indique que ces mesures de confinement seront moins coûteuses à mettre en place pour les collectivités territoriales. Enfin, des alternatives aux granulés de plastique pourraient être développées à l’échéance visée, sous la forme de liège ou de noyaux d’olives broyés.

C’est pourquoi la commission a adopté un amendement visant à ce que l’emploi de ces granulés soit interdit pour les nouveaux terrains de sport mis en service à compter du 1er mars 2026. Nous invitons le Gouvernement à retenir cette position dans le cadre des négociations qui se dérouleront dans les mois à venir au niveau européen. Cette position est suffisamment pragmatique pour donner une perspective aux collectivités territoriales, car elle s’appliquera uniquement aux nouveaux terrains de sport.

Notre commission a débattu d’un sujet d’actualité très important, l’explosion de la quantité des déchets de la restauration livrée. Producteur de 600 millions d’emballages à usage unique par an, le marché de la restauration livrée connaît une forte croissance – +30 % –, accélérée encore par la pandémie de covid-19.

Le Gouvernement, pour répondre à ce problème, a annoncé en février 2021 la signature d’une charte pour les acteurs du secteur, afin de réduire les déchets d’emballages. Si cette initiative peut être saluée, il est permis de s’inquiéter en raison du caractère non contraignant de la charte, ainsi que de son manque d’ambition à moyen terme. Il faut accélérer, notamment sur la question des contenants réemployables.

Ce sujet pourra faire l’objet d’approfondissements dans le cadre des travaux que nous mènerons sur le projet de loi Climat et résilience.

En conclusion, cette proposition de loi pragmatique et volontariste non seulement s’inscrit dans la continuité de la loi AGEC, mais dresse des perspectives pour les débats que nous aurons ultérieurement.

J’espère que nous saurons nous saisir tous ensemble de cette occasion !

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