Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a un peu plus d’un an, nous votions ici même, au Sénat, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, la loi AGEC. Le groupe socialiste et le Sénat dans son ensemble avaient su rehausser les ambitions de ce texte. Au nom de mon groupe, j’avais défendu un amendement conservé dans la rédaction finale de la loi tendant à introduire un principe général selon lequel toutes les politiques publiques doivent fixer des actions à mettre en œuvre pour lutter contre la pollution causée par les plastiques dans l’environnement et réduire l’exposition des populations aux particules de plastique.
En tant que premier producteur européen de déchets de plastique, la France doit en effet avoir une véritable ambition en matière de lutte contre cette pollution. Sans infléchissement de nos modèles économiques, cette production devrait doubler d’ici à 2050.
La présente proposition de loi, présentée par notre collègue Angèle Préville, dont on connaît la ténacité sur ce sujet, s’inscrit dans cette logique en apportant de précieuses avancées juridiques et en ouvrant une nouvelle séquence au Sénat, en amont de l’examen du projet de loi Climat et résilience. Son récent rapport réalisé au nom de l’Opecst est extrêmement convaincant quant à l’urgence d’une action contre cette pollution massive, qui conduit aujourd’hui les scientifiques à rebaptiser l’anthropocène « plasticocène ».
Fondé sur ce constat aussi troublant qu’accablant, le présent texte contient des mesures concrètes et ciblées qui ont déjà été largement présentées.
L’article 1er vise ainsi à encadrer les pertes et fuites de granulés de plastique industriels, les célèbres « larmes de sirènes » que l’on retrouve quotidiennement sur nos plages jusque sur les bords de la Loire – que je connais bien – et même sur les bords du Der. La disposition proposée est très utile, car elle couvre certains angles morts qui persistent dans le décret en préparation.
Dans la même veine, l’interdiction de l’introduction intentionnelle de microbilles de plastique dans les détergents prévue à l’article 2 est de bon sens. Nous avions d’ailleurs voté cette disposition ici même, mes chers collègues, lors de la première lecture du projet loi AGEC.
Enfin, l’article 4 met en exergue une problématique aiguë qui demeure un impensé industriel : les microfibres de plastique contenues dans les textiles. Cette demande de rapport est un pavé dans la mare pour une industrie qui a longtemps fermé les yeux sur son impact environnemental. Le rapport de l’ONG Changing Markets Foundation publié le 2 février dernier démontre que l’utilisation du polyester dans les vêtements à bas coût a doublé en vingt ans. Le relargage des fibres textiles dans l’environnement est ainsi évalué à l’échelon européen entre 18 000 et 46 000 tonnes par an. Ce que l’on nomme la fast fashion, ou « mode jetable », doit sérieusement prendre en compte cet état de fait.
En conclusion, je tiens à remercier notre rapporteure Martine Filleul de la qualité de son rapport et de ses propositions qui ont encore permis d’améliorer ce texte. L’unanimité avec laquelle notre commission a voté celui-ci est de bon augure et démontre que, sur ces questions, le Sénat est capable de dépasser les clivages partisans pour l’intérêt général.
J’espère que le Gouvernement, par votre voix, madame la secrétaire d’État, se ralliera à ces dispositions très étayées et vitales pour « déplastiquer » progressivement, mais sûrement, notre économie, et surtout notre environnement.