Intervention de Corinne Imbert

Réunion du 11 mars 2021 à 14h45
Lutte contre les fraudes sociales — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Corinne ImbertCorinne Imbert :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons aujourd’hui l’examen en séance de la proposition de loi tendant à lutter contre les fraudes sociales. Je tiens, tout d’abord, à saluer le travail effectué par notre collègue Nathalie Goulet, auteur du texte, et par le rapporteur Jean-Marie Vanlerenberghe.

Néanmoins, je forme également le vœu que nous puissions travailler à l’avenir sur un texte visant à lutter contre tous les types de fraudes, car chaque fraude est un coup de poignard porté à notre idéal républicain et le symptôme d’une société qui se détourne progressivement de l’intérêt collectif au profit des intérêts particuliers.

La lutte contre les fraudes sociales est un sujet qui revient de manière récurrente sur les bancs de cette assemblée. Pour ne citer que les travaux récents, nous pouvons évoquer la proposition de résolution visant à lutter contre la fraude transfrontalière, déposée par notre collègue André Reichardt et votée par le Sénat, ou encore la proposition de loi tendant à instituer une carte vitale biométrique, déposée par notre collègue Philippe Mouiller et dont la présidente Catherine Deroche a été rapporteure.

Notons également qu’une commission d’enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales, présidée par notre collègue député Patrick Hetzel, a été mise en place à l’Assemblée nationale. Ses conclusions ont été présentées en septembre dernier.

Enfin, je rappelle qu’une proposition de loi visant à améliorer l’accès aux droits et à lutter contre la fraude sociale, déposée par notre ancien collègue Éric Doligé et dont j’étais la rapporteure, avait été discutée en mai 2016 au sein de cet hémicycle. Malheureusement, l’examen de ce texte avait été arrêté à l’issue du rejet de l’article 1er, sur la base d’arguments qui lui faisaient dire ce qu’il ne disait pas.

Je forme donc le vœu que nous puissions aller au terme de l’examen du texte en discussion aujourd’hui afin que le Sénat envoie un signal fort en matière de lutte contre les fraudes sociales. À ce titre, j’ai déposé plusieurs amendements inspirés de mon rapport sur la proposition de loi Doligé, visant à compléter les différents dispositifs présents dans la proposition de loi discutée ce jour.

Les chiffres en matière de fraudes sociales divergent, mais je n’entrerai pas dans ce débat, car bien malin est celui qui peut se targuer de mesurer objectivement le montant total de ce type de fraudes. Le RSA, les aides au logement, les allocations familiales, le minimum vieillesse, les arrêts maladie sont autant de dispositifs concernés par ce phénomène en augmentation permanente.

Quelques chiffres, tout de même, ont pu être vérifiés et sont symptomatiques des défaillances de notre pays à endiguer cette terrible réalité : il y a près de 74 millions de personnes bénéficiaires de prestations sociales, dans un pays qui compte 67 millions d’habitants ; plus de 250 porteurs de la carte Vitale ont plus de 120 ans et plus de 3 millions d’entre eux sont centenaires, voilà qui pourrait faire pâlir le Japon, champion de la longévité et qui aurait pu inquiéter Jeanne Calment dont le record tenait jusqu’alors !

L’enquête sur la fraude aux prestations sociales réalisée par la Cour des comptes à la demande de la commission des affaires sociales du Sénat et présentée en septembre 2020 permet de constater « qu’il s’agit bien d’une atteinte au principe de solidarité et d’un coût financier élevé ».

Le Conseil constitutionnel a lui-même reconnu à la lutte contre la fraude le caractère d’une exigence constitutionnelle. Ne nous trompons pas, il s’agit bien ici de lutter contre la fraude organisée.

À un an de la prochaine élection présidentielle, il faut du courage politique, monsieur le ministre, pour s’attaquer à ce problème épineux et complexe. J’espère que l’exécutif est prêt à assumer ce courage. De nombreuses solutions existent et ne demandent qu’à être mises en place. Ce ne serait que justice, pour la majorité de nos compatriotes, silencieux par pudeur et honnêtes par valeur, ces femmes et ces hommes qui, chaque jour, font honneur à cette nation en se demandant ce qu’ils peuvent faire pour leur pays, et non l’inverse, conformément à la célèbre maxime du président Kennedy.

Je ne sais si ce texte sera inscrit prochainement à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, mais il a le mérite de remettre sur la table cette réalité qui n’est pas digne de notre pays et qui est une offense aux pères fondateurs de la sécurité sociale et aux personnalités politiques qui ont œuvré et œuvrent encore chaque jour en faveur de la solidarité nationale, pour que les plus faibles puissent être accompagnés par la puissance publique.

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