Intervention de Sonia de La Provôté

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 9 décembre 2020 à 16h05
Audition publique ouverte à la presse d'organisations régionales de professionnels de santé : dr antoine leveneur président de l'urml normandie Mme Isabelle Varlet présidente de l'urps infirmiers libéraux nouvelle aquitaine et M. François Martial président de l'urps pharmaciens nouvelle aquitaine

Photo de Sonia de La ProvôtéSonia de La Provôté, sénatrice, rapporteure :

Je vous remercie. Cet échange portera essentiellement sur la dispensation vaccinale par les professionnels de santé.

Ma première question porte sur la façon dont les choses s'organisent sur le terrain. Une première phase concernera exclusivement les EHPAD. En fonction de l'arrivée des doses, nous allons entrer dans un processus progressif de vaccination, jusqu'à la population générale. Comment les choses s'organisent-elles dès à présent sur le terrain, pour la phase 1 et pour les suivantes ? Comment les vaccins vont-ils arriver en fonction des phases prévues ? Quels sont vos interlocuteurs ? Je voudrais également savoir si vous sentez, ou pas, que nous avons tiré les leçons de ce qui s'est passé auparavant : en 2009 et cette année pendant les deux « vagues » de l'épidémie, avec par exemple les problèmes relatifs aux masques ou aux tests qui ont aussi été de vrais sujets logistiques.

Ma deuxième question porte sur l'acceptabilité de la part des soignants et de ceux qui seront chargés de la vaccination sur le terrain. Il est prévu de faire d'abord appel aux médecins généralistes puis, au fur et à mesure de l'accroissement du nombre de personnes à vacciner, aux infirmiers et aux pharmaciens et peut-être au-delà. Quelle est l'attitude des professionnels vis-à-vis de la vaccination et du vaccin actuellement disponible ? Il y aurait 20 % de sceptiques chez les médecins. Est-ce le cas ? Y a-t-il dans le corps médical la conviction de contribuer quoi qu'il arrive à l'intérêt général et l'envie d'entrer pleinement dans cette opération vaccinale, sachant que cette année ne sera pas forcément comme les années suivantes, puisque nous sommes dans une phase expérimentale et qu'il faut mettre en oeuvre une logistique qui devra être plus rôdée à l'avenir ?

Dr Antoine Leveneur, président de l'Union régionale des Médecins libéraux Normandie. - Je suis d'accord avec ce que vous venez de dire. Les professionnels sont face à deux logiques. Il y a d'abord une logique organisationnelle : comment faisons-nous pour vacciner les Français aujourd'hui ? Nous n'avons pas la main sur tout, vous l'avez compris. Cependant, cela nous oblige à réfléchir à la façon dont nous allons procéder dans les territoires dès le mois de janvier, avec les EHPAD, les résidences seniors, les résidences services, etc. Tout cela sera compliqué. Ensuite, il y a une logique motivationnelle au sein de la profession, parce que nous avons bien compris que nous serons un relais important pour faire adhérer la population à cette vaccination de masse.

En préambule, je voudrais dire que la médecine libérale sera présente. Nous allons nous engager, il n'y pas de problème sur ce point. Cela étant, deux conditions nous paraissent essentielles. Sans surprise, la première condition est la nécessaire information du corps médical sur ces vaccins. Nous ne revendiquons pas de lire l'autorisation de mise sur le marché (AMM) de haut en bas, nous revendiquons le fait d'avoir un avis autorisé des agences compétentes, notamment de l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé), voire de l'Agence européenne du médicament (EMA). Il nous faudrait cela assez rapidement, mais j'ai cru comprendre que ce ne serait pas avant fin décembre, ce qui est déjà un problème. Cette information doit être très claire et transparente, c'est la seule façon pour nous d'emmener une majorité de professionnels et de médecins vers la vaccination.

Toujours en préambule, il est important de clarifier le statut juridique et assurantiel du médecin libéral qui sera engagé dans la vaccination. Aujourd'hui, notre réflexion prend en compte deux éléments : premièrement, à notre connaissance, les laboratoires ont signé une clause d'irresponsabilité avec l'Union européenne ; deuxièmement, la vaccination n'est pas obligatoire. La question de la responsabilité du médecin vaccinateur se pose donc. Elle a été posée au ministre qui, à nos yeux, s'en est tiré par une pirouette en disant que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam) était fait pour ça. Ce n'est pas aussi simple. Ce le serait si la vaccination était obligatoire. Or elle ne l'est pas et nous attendons la publication d'arrêtés, comme au moment de l'épidémie de grippe H1N1, où il était dit qu'en cas de menace sanitaire grave, la vaccination était recommandée. Dès lors, les médecins seraient protégés. Si ces arrêtés n'étaient pas publiés rapidement, il nous faudrait obtenir le statut de collaborateur occasionnel du service public, comme l'est un médecin libéral régulateur d'un centre 15 lorsqu'il y fait des vacations.

Ce sont les deux conditions qu'il me paraît important de réunir : une information et un statut juridique et assurantiel qui nous protègent. À mes yeux, c'est ce qui va conditionner l'adhésion des médecins libéraux à la vaccination, en tout cas dans la région Normandie.

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