Intervention de Gérard Leseul

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 9 décembre 2020 à 16h05
Audition publique ouverte à la presse d'organisations régionales de professionnels de santé : dr antoine leveneur président de l'urml normandie Mme Isabelle Varlet présidente de l'urps infirmiers libéraux nouvelle aquitaine et M. François Martial président de l'urps pharmaciens nouvelle aquitaine

Gérard Leseul, député, rapporteur :

Vous pensez que la communication a été un peu rapide, mais nos voisins anglais commencent à vacciner. J'ai déjà des remarques venant du terrain sur le thème : « Que fait la France ? Ne sommes-nous pas capables d'accélérer le mouvement ? Que font nos autorités médicales ? On vaccine en Angleterre et nous ne sommes pas capables de vacciner en France. » Nous avons deux sentiments contradictoires, qui ne sont pas illégitimes. J'entends bien la volonté de vouloir poser davantage les choses, sans se précipiter. Vous avez peut-être raison sur le fait qu'il ne faille pas s'engager sur une vaccination dès le 4 janvier ; mais dans le même temps, une partie de la population, notamment les personnes se sentant fragiles ou approchant 70 ou 75 ans qui se sentent encore en bonne santé, mais sont peut-être déjà un peu vulnérables, n'a pas envie d'attendre le mois de mars pour être vaccinée.

Dr Antoine Leveneur. - Je comprends que dans chaque cas de figure, on peut avoir des arguments pour et contre. Après tout, c'est la décision politique qui compte. Vous citez le Royaume-Uni et je ne connais pas tout le processus organisationnel là-bas. En revanche, je peux vous dire que la Suisse a l'attitude inverse.

Deux questions majeures se posent aujourd'hui. Premièrement, que sont ces vaccins ? En tant que professionnels, qu'allons-nous injecter à la population ? Cela renvoie à la question de la responsabilité que j'évoquais tout à l'heure.

Deuxièmement, la logistique, la chaîne du froid, toutes les contraintes que l'on a identifiées pour un déploiement efficace de la vaccination seront-elles bien cadrées dès le début du mois de janvier ? On peut s'interroger. Je ne suis pas un spécialiste, mais je vois que ce sera un peu compliqué. Pfizer a communiqué sur des problèmes de fabrication et sur le fait qu'il ne pourrait vraisemblablement pas assurer l'intégralité de la commande pour le mois de janvier en France. C'est un premier point.

Par ailleurs, je crois comprendre qu'il y a deux flux : un flux pour les EHPAD publics qui sera géré par des plateformes hospitalières dans le cadre des groupements hospitaliers de territoire (GHT), et un flux pour le « gros du bataillon », les EHPAD privés, les résidences seniors, les résidences services. Ceux-ci seront approvisionnés par les officines du territoire qui commanderont directement les doses à Santé publique France. Ces deux flux fonctionneront-ils en parallèle ? Il y aura sans aucun doute une mobilisation très importante au niveau logistique. Mon métier est de vacciner ou de ne pas vacciner, en tout cas d'entraîner l'adhésion de mes confrères et de mes patients, pour peu que nous ayons les éléments nous permettant de nous forger une opinion.

J'attends que l'on me donne les moyens d'être convaincu. Je suis un médecin et, avec tous mes confrères, nous sommes des vaccinateurs : nous le faisons tous les jours, nous n'avons pas de souci là-dessus, mais nous connaissons les vaccins employés et nous en avons l'habitude. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à de nouveaux procédés de fabrication, à des vaccins innovants. Vous avez parlé de l'ARN messager, de l'adénovirus, de formes inactivées, etc. Toutes les techniques seront disponibles.

J'ai oublié une interrogation importante : des vaccins seront-ils davantage indiqués pour certaines populations que pour d'autres ? Aujourd'hui, nous ne le savons pas. Ces questions sont en suspens et c'est là-dessus que l'effort doit porter. L'on peut se demander si au lendemain du réveillon, tout le monde aura bien digéré les dernières informations qui seront arrivées.

Si vous avez compris mes propos, nous avons tout de même quelques craintes.

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