Intervention de Michel Barnier

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 16 février 2021 à 17h35
Accord de retrait et accord de commerce et de coopération signés entre le royaume-uni et l'union européenne — Audition de M. Michel Barnier conseiller spécial de la présidente de la commission européenne

Michel Barnier, conseiller spécial de la présidente de la Commission européenne :

Pascal Allizard a évoqué les intérêts français. Dès que je serai dégagé de mes responsabilités européennes, vous n'aurez pas beaucoup à attendre pour entendre mes idées sur la stratégie industrielle et les leçons du Brexit. Le sentiment populaire qui y a mené existe chez nous, beaucoup plus qu'on ne le croit. Il y a eu à Bruxelles, pendant trop d'années, une forme d'ultralibéralisme qui a consisté à déréguler, ouvrir toutes les portes et toutes les fenêtres, ce que ne faisaient pas les Américains, les Russes et les Chinois. On a baissé la garde, notamment dans le domaine de la régulation financière. La crise de 2008 a heurté de plein fouet un continent européen qui s'était désarmé. Devenu Commissaire européen aux services financiers en 2010, j'ai présenté avec mon équipe pas moins de quarante-et-une lois de régulation financière en cinq ans pour remettre de la lumière sur des gens qui ne l'aiment pas beaucoup, ainsi qu'un peu de morale et d'éthique là où elles avaient disparu. On aurait tort d'oublier le choc de la crise. Je pourrais aussi parler des excès de la bureaucratie. À l'échelle nationale, on a désindustrialisé au profit des services, au Royaume-Uni et en France. Cela n'a pas été le cas en Allemagne, en Italie ou en Suède. Dans notre monde global, on a intérêt à réarmer l'Europe. C'est pourquoi je suis très heureux du portefeuille confié à Thierry Breton et de son action sur l'industrie numérique et du Fonds européen de défense qui affectera de l'argent à ce secteur, pour la première fois dans l'histoire de l'Union.

Nous devons aussi déplorer la faiblesse du débat démocratique européen. Le général de Gaulle disait : « Il faut combattre la démagogie par la démocratie. » Nous devons être capables de mener un débat démocratique. Les peuples sont intelligents et doivent disposer des éléments pour décider.

Jean-Marc Todeschini parlait du transport. De nouvelles lignes de fret directes entre Cherbourg et l'Irlande se développent. L'Irlande est demandeuse à cet égard, dans le secteur des transports mais aussi de l'énergie. La Commission est prête à soutenir le renforcement de ces liens.

La stratégie de la Chine existe, Brexit ou pas Brexit. Mais ne soyons pas naïfs vis-à-vis de la Chine, comme des États-Unis. Il faut absolument préserver le marché unique et éviter le cherry picking. C'est principalement pour notre marché unique que les Américains et les Chinois nous respectent.

Le dessin de Plantu me faisait dire : « Si vous avez compris ce que je disais, c'est que je me suis mal exprimé. » J'espère que ce n'est pas votre sentiment aujourd'hui !

Les universités et les laboratoires continueront à coopérer parce que le Royaume-Uni a accepté de participer aux programmes de recherche. Mais ce ne sera pas le même cadre financier ni juridique qu'avant.

Peut-être que mon adjointe Clara Martinez pourra répondre à Olivier Cadic. Toutes ces problématiques sont soumises à l'agenda du comité conjoint lorsqu'elles nous sont rapportées.

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