Je voudrais, à titre de propos liminaire sur l’article 1er, répondre aux interpellations qui m’ont été faites, à commencer par celles du groupe Les Républicains et singulièrement de Mme Micouleau sur la question des moyens qui sont donnés aux maires pour appliquer les dispositions relatives à leur autorité.
Madame la sénatrice, la police administrative, dont vous savez qu’elle est celle à la fois de la tranquillité publique et de la salubrité, participe de l’autorité du maire. En outre, je rappelle, à l’attention du dernier intervenant notamment – notre divergence n’est pas une divergence d’opinion, mais une différence de constat –, que la loi de la République accorde au maire une compétence qu’il ne partage avec personne d’autre, celle qui a trait à la vidéoprotection.
La police et la gendarmerie nationales sont également là pour faire respecter les arrêtés du maire, dont je rappelle qu’il est à la fois un élu de la République, évidemment, et un agent de l’État. À ce titre, même s’il n’est pas véritablement – chacun le sait – officier de police judiciaire, il possède des compétences de police judiciaire qui ne sont reconnues qu’à lui et pas aux autres élus locaux.
Je conviens avec vous que le montant des amendes prévues n’est pas à la hauteur des enjeux. Un attroupement, la consommation d’alcool sur la voie publique, tous ces « petits faits », comme dirait Stendhal, relatifs aussi au bruit ou à la salubrité, renforcent l’insécurité de nos concitoyens. Je me suis donc engagé devant l’Assemblée nationale à augmenter certaines de ces amendes. La proportionnalité devra évidemment être au rendez-vous, mais je réitère cet engagement devant vous.
J’ai proposé pas plus tard qu’hier – je vois le garde des sceaux demain et nous aurons peut-être l’occasion d’en reparler lundi dans le cadre du Beauvau de la sécurité – un décret que nous pourrions prendre en commun dans les jours qui viennent, en accompagnement de cette proposition de loi, que, j’espère, vous voudrez bien adopter. Ce décret prévoira une augmentation très importante des amendes afférentes au pouvoir de police du maire. Vous avez parfaitement raison : 35 euros pour des gens qui se regroupent intempestivement et créent un désordre souvent lié au trafic de stupéfiants, ce n’est pas dissuasif ; j’ai moi-même connu cette situation très frustrante.
Madame Cukierman, je partage avec vous, peut-être parce que nous sommes élus de territoires similaires, l’idée que les classes populaires, les classes travailleuses, ont besoin de sécurité. Vous souhaitez une augmentation des effectifs de police, notamment dans les quartiers dits « politique de la ville », qui sont en fait souvent, comme vous l’avez dit, des oubliés des politiques publiques depuis bien longtemps. Permettez-moi de constater que cela veut dire – je ne le dis pas pour vous, mais pour l’ensemble de la Nation – que tout le monde aime les policiers, puisque tout le monde en réclame au ministère de l’intérieur ; c’est sans doute une bonne chose.
À ces policiers il faut évidemment adjoindre une nouvelle politique d’urbanisme et une nouvelle politique du logement. Il y a évidemment un lien entre l’insalubrité des logements ou un urbanisme conçu autour de venelles à l’ancienne, d’une part, et le renforcement de l’insécurité, d’autre part : ces facteurs poussent un certain nombre de personnes à commettre des actes délictueux en lien avec le chômage, la misère, la non-éducation et, parfois, la mauvaise intégration sur le territoire national, et ils empêchent les policiers et les gendarmes d’intervenir dans des conditions normales.
Les effectifs seront bien sûr au rendez-vous. Les créations de postes souhaitées par le Parlement – avant tout, je vous prie de m’en excuser, par la majorité de l’Assemblée nationale – se concrétiseront partout sur le territoire de la République. Mais, si l’on veut qu’ils soient plus efficaces, ces effectifs de police doivent être accompagnés de moyens supplémentaires, juridiques mais aussi matériels – les policiers ont besoin de matériel pour intervenir, ce que les maires doivent prendre en considération.
Je n’arrête pas de souligner et de répéter que, s’il n’y a pas de caméras de vidéoprotection dans une ville, on peut bien ajouter 200 ou 300 policiers : les seconds ne seront jamais aussi efficaces que les premières dans l’élucidation et dans la prévention, étant précisé que les caméras ne résolvent évidemment pas tout et ne sauraient remplacer le contact humain, essentiel, primordial, que doit assurer la police de la République. Les deux vont ensemble : davantage d’effectifs, mais aussi des moyens techniques, donc des caméras de vidéoprotection.
Vous le savez bien, l’article 1er n’est en fait qu’une expérimentation émanant de la volonté des élus. Je ne comprends d’ailleurs pas très bien la dernière intervention : les dispositions de cet article sont fondées sur la territorialisation, qui est souhaitée, me semble-t-il, par le Sénat, sur l’expérimentation, que permet désormais la Constitution de la République, et sur la volonté des élus. On ne peut donc pas dire que nous imposions grand-chose ; l’État n’est pas jacobin sur ce point, c’est le moins qu’on puisse dire.
C’est le respect des libertés locales et de la démocratie qui prévaut : dans certains endroits, les citoyens ont voulu plus de sécurité et voté pour des maires qui s’engagent en ce sens ; dans d’autres, les élus avaient clairement dit, en tant que candidats, qu’ils n’installeraient pas de caméras de vidéoprotection et qu’ils ne souhaitaient pas s’occuper des questions de sécurité. Nous respectons évidemment la légitimité populaire, tout en constatant que ce n’est pas toujours dans ces derniers endroits que ça se passe le mieux – c’est le moins qu’on puisse dire…
Lorsque la police municipale arrête un véhicule dans le cadre d’un contrôle routier – c’est un acte qui relève de la vie de tous les jours –, songez que les trois policiers municipaux que la ville a embauchés – elle fait des efforts considérables pour cela – doivent appeler le commissariat de police nationale pour avoir accès au fichier des véhicules ou à celui des permis de conduire et ainsi savoir si le véhicule est ou non volé ! Cela fait perdre du temps à tout le monde : aux policiers municipaux, qui pourraient faire davantage, du point de vue de la proximité notamment, aux policiers nationaux – ils n’ont pas vocation à faire du standard téléphonique – et à la personne contrôlée, qui se demande pourquoi on passe un coup de fil pour savoir ce qu’il en est de son permis de conduire. Cet article 1er est aussi concret que cela : point d’idéologie là-dedans.