Intervention de Jean-François Husson

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 24 mars 2021 à 10h30
Audition de M. Jean Arthuis président de la commission sur l'avenir des finances publiques

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson, rapporteur général :

Merci messieurs les présidents, mes chers collègues. Tout d'abord, je salue le président Arthuis, ainsi que vos collègues de la commission pour l'avenir des finances publiques, pour le travail produit. Elle a permis d'associer des experts d'horizons et de pays différents, jetant ainsi un regard intéressant sur l'avenir des finances publiques.

J'aurai cinq questions, portant sur la méthode comme sur le contenu.

D'abord, j'éprouve une satisfaction à voir que plusieurs des axes de la stratégie budgétaire que vous proposez reprennent des orientations que j'ai pu moi-même formuler lors de l'examen du budget. C'est le cas s'agissant du nécessaire redressement des comptes publics, qui se ferait à partir de 2023, c'est-à-dire au moment où nous espérons que le PIB sera revenu au niveau d'avant-crise, ainsi que de l'invitation à privilégier la maitrise de la dépense en écartant les hausses d'impôts. Je regrette toutefois que votre commission ne se prononce pas sur un objectif de dette ou de déficit à moyen terme. Elle se contente d'établir des scénarios, qui ne sont pas toujours aisés à appréhender. Ma première question porte sur ce sujet. Est-ce que vous pensez qu'il faut se contenter de stabiliser l'endettement ou chercher à le réduire - et si oui, à quel rythme ?

J'ai une deuxième question, portant plutôt sur la loi organique relative aux lois de finances. Votre commission propose d'adopter une nouvelle règle en dépense, alors même que nous en avons déjà plusieurs et que le pacte de stabilité européen est en cours de renégociation. Qu'apporterait cette règle par rapport aux règles existantes, qu'il s'agisse de la norme de dépense européenne ou de la règle d'effort structurel ? La règle que vous proposez risque par ailleurs d'entrer en compétition ou de s'opposer aux futures règles européennes.

Je partage avec vous le constat de la nécessité de maîtriser les dépenses publiques, voire de les réduire une fois la crise passée. Je souscris également à votre intention de définir des « dépenses d'avenir », qui seraient préservées de la mise sous norme. Je pense néanmoins que la solution proposée, à savoir la fixation d'un niveau plancher de « dépenses d'avenir », n'est pas assez ambitieuse. En effet, nous devrons, lors du prochain quinquennat, relever fortement le verdissement de nos investissements si nous voulons respecter nos objectifs climatiques. La vérité, c'est qu'il faudra articuler en même temps une hausse des dépenses de croissance et une baisse des dépenses courantes. Est-ce que cela constituera une articulation vertueuse ou un porte-à-faux ? J'aimerais avoir votre avis sur ce sujet.

Par ailleurs, déterminer les dépenses dites « d'avenir » sera crucial, car le rapport n'est pas très précis sur les dépenses susceptibles d'être concernées. Ce serait intéressant de vous entendre sur les matières sur lesquelles des efforts de réduction des dépenses doivent être portés. C'est bien là le travail de nos assemblées de débattre de ces arbitrages.

Je finirai avec deux questions courtes.

D'abord, vous proposez d'élargir le nombre de collectivités locales concernées par les contrats de Cahors définis à l'article 29 de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Je rappelle qu'elles sont aujourd'hui au nombre de 322, et représentent près de 70 % de la dépense locale de fonctionnement. Elles ont démontré qu'elles savaient très bien tenir leurs comptes, et ce beaucoup mieux que l'État. Quelle serait pour vous la part de dépenses qui serait concernée par le dispositif que vous proposez d'élargir ? Cette proposition n'est d'ailleurs pas sans conséquence pour l'autonomie locale dans notre République décentralisée.

Enfin, vous proposez de consacrer un temps plus long à la programmation pluriannuelle en début de mandature, et ce pour cinq ans. Je ferai une première remarque : il suffit d'observer le quinquennat en cours pour se rendre compte qu'une telle loi peut être assez vite prise en défaut et frappée d'obsolescence. Par ailleurs, si l'on fixe l'adoption de la loi de programmation avant le premier budget, comment concilier ce souhait avec un calendrier budgétaire déjà contraint ? L'Assemblée nationale dispose de 40 jours, nous disposons de 20 jours. Nous pouvons certainement améliorer certains éléments dans la procédure, mais il faut faire attention à ne pas cadenasser l'examen du budget. Je ne souscris pas à une réduction du temps consacré à l'examen de la loi de finances initiale. Je rappelle enfin que le contrôle budgétaire se fait tout au long de l'année au Sénat, et de manière très approfondie.

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