Monsieur le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, vous affichez régulièrement votre attachement aux éleveurs.
Vous rendez, à juste titre, hommage à ceux qui travaillent 70 heures par semaine pour nourrir les Français, tout en vivant avec quelques centaines d’euros par mois.
Vous dites votre fierté du modèle d’élevage bovin « à la française », extensif, familial, herbager, reconnu comme le plus durable au monde, bien loin des feedlots canadiens ou brésiliens, qui concentrent des milliers d’animaux élevés aux antibiotiques, mais qui pénètrent toujours plus les marchés européen et français par le cheval de Troie que constituent les traités commerciaux.
Monsieur le ministre, votre soutien est précieux, mais vos actes sont déterminants.
Aujourd’hui, la situation des éleveurs, notamment des 80 000 éleveurs bovins, continue de se dégrader. Ils s’enfoncent dans la pauvreté et le désespoir, jusqu’à l’acte ultime, comme l’analyse le rapport de nos collègues Françoise Férat et Henri Cabanel, qui vous a été remis, me semble-t-il, ce matin.
Trois ans après son vote, la loi Égalim (loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous) se révèle impuissante à garantir à ces éleveurs des prix couvrant leurs coûts de production. « La faute de la filière qui n’arrive pas à s’organiser », selon vous, ou « à l’Europe qui empêche la France d’imposer les coûts de production comme socle des négociations commerciales ».
Pourtant, dans les débats qui s’engagent sur la politique agricole commune, la PAC, il semblerait que vous vous apprêtiez à priver ces éleveurs de près de 250 millions d’euros d’aides selon la filière, oubliant ainsi vos promesses de redistribution vers les agriculteurs les plus démunis, vers les zones à faibles rendements, qui n’ont pas ou peu d’autres options et qui sont déjà les mal-lotis des PAC antérieures. C’est la triple peine !
Ce choix n’est ni celui de la filière ni celui de l’Europe. Est-il donc le vôtre, monsieur le ministre ? En avez-vous mesuré les conséquences humaines, économiques et sociales ? Au-delà, quelle est finalement votre vision de l’avenir de l’élevage en France ?