Monsieur le président, madame la ministre des armées, mes chers collègues, en 2017, la France et l’Allemagne lançaient deux projets ambitieux : le futur système de combat aérien – le SCAF, ou système de combat aérien du futur –, dont nous aurions le pilotage, et le futur char de combat – le Main Ground Combat System, ou MGCS –, sous pilotage allemand.
Ces projets permettaient, d’une part, de consolider la coopération franco-allemande, dans la lignée du traité d’Aix-la-Chapelle, et, d’autre part, de concrétiser notre vision d’une défense européenne forte et autonome, sur laquelle il existe, en tout cas en France, un consensus.
Néanmoins – je le dis sous le contrôle de mes collègues de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées –, nous observons depuis longtemps, lors de nos nombreuses rencontres avec les parlementaires allemands, que notre vision de l’autonomie stratégique européenne ne semble pas partagée outre-Rhin, ni par le Bundestag ni, d’ailleurs, par la ministre allemande de la défense.
Entendons-nous s’exprimer ces réserves de l’Allemagne, dont les objectifs géopolitiques et les besoins militaires, donc opérationnels, sont très différents des nôtres ?
Pas vraiment, puisqu’il aura fallu attendre la médiatisation de l’entretien de l’un de nos grands industriels, suivie de l’audition, au Sénat, des présidents de Dassault Aviation et d’Airbus Defence and Space, pour révéler au grand jour la situation de blocage dans laquelle nous nous trouvons.
Nous avons donc, d’un côté, une France pour qui l’avenir est européen, donc franco-allemand, qualificatif que nous étendons au secteur de la défense, et, de l’autre, une Allemagne qui demeure profondément attachée aux liens transatlantiques et à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, l’OTAN.
Ces projets industriels seraient-ils au service de l’affichage de l’entente parfaite avec l’Allemagne, à laquelle nous aspirons tant ?
Finalement ma question est simple : qui, en France, décide de la politique industrielle de défense ? Brienne ? Le Quai d’Orsay ? Les deux, peut-être ? Plus généralement, jusqu’où sommes-nous prêts à fragiliser notre base industrielle au service d’un projet politique qui semble, malheureusement, de moins en moins partagé par notre partenaire, ce dont nous nous désolons ?