Intervention de Jean-Baptiste Blanc

Réunion du 24 mars 2021 à 15h00
Dépôt du rapport annuel de la cour des comptes suivi d'un débat

Photo de Jean-Baptiste BlancJean-Baptiste Blanc :

Monsieur le président, monsieur le Premier président de la Cour des comptes, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le rapport public annuel de la Cour des comptes. C’est un moment important, qui traduit la qualité des liens unissant les juridictions financières et le Parlement.

Le Sénat, tout comme votre juridiction, monsieur le Premier président, est très attaché au contrôle de l’action du Gouvernement. Nous savons combien vous êtes mobilisé.

Nos travaux se complètent et s’enrichissent parfaitement ; nous partageons les mêmes attentes : plus de transparence et de pédagogie dans la mise en œuvre et dans les résultats des politiques publiques, plus d’attention portée au coût et à la qualité des services publics, financés par les contributions, et plus de responsabilisation pour les décideurs publics.

Cette année, vous avez décidé de consacrer la première partie de votre rapport à différents thèmes liés à la crise du covid-19 ; cela se comprend parfaitement.

Vous avez notamment dressé un bilan des deux principales mesures mises en place pour soutenir les entreprises : le fonds de solidarité et l’indemnisation de l’activité partielle.

Permettez-moi, à l’occasion de ce débat, de revenir plus particulièrement sur cette mesure d’urgence prise par le Gouvernement pour éviter la faillite d’entreprises, prévenir les licenciements et soutenir le revenu des demandeurs d’emploi.

Le Gouvernement a eu un recours massif à l’activité partielle. Comment pouvait-il en être autrement alors qu’il fallait sauver nos entreprises mises à l’arrêt du jour au lendemain ?

Toutefois, ce recours massif et les aides exceptionnelles aux demandeurs d’emploi auront mis à mal le système financier de l’assurance chômage, qui était déjà en déséquilibre, avec une dette de 36, 8 milliards d’euros à la fin de l’année 2019.

Ainsi, à la fin 2020, la dette devrait se creuser à 54, 2 milliards d’euros, avec un déficit de 17, 4 milliards d’euros, dont 9, 2 milliards d’euros affectés au financement de l’activité partielle. Il convient donc de s’interroger sur le coût réel de cette dernière.

Durant cette crise, de nombreux Français ont eu recours au chômage partiel ; nous avons pu suivre, semaine après semaine, le nombre de demandes et le coût afférent, soit une trentaine de milliards d’euros.

A contrario, nous n’avons pas pu observer son équivalent dans la fonction publique d’État, dans les agences et les opérateurs de l’État, mais aussi dans les collectivités locales.

Nous ne savons pas encore à ce jour combien de personnels ont eu recours à l’autorisation d’absence, qui équivaut au chômage partiel, durant la crise sanitaire. De fait, nous ne connaissons pas son coût.

De toute évidence, nous avons là un problème de transparence, laquelle est pourtant si chère à votre juridiction et au Sénat, ainsi qu’un problème d’information en temps réel des citoyens et du Parlement. Fort heureusement, la Cour des comptes et le Sénat sont là !

Je veux également souligner l’émergence d’un problème d’équité entre les salariés du privé, qui perçoivent une indemnité de leur employeur représentant une partie de leur rémunération, et les salariés du public, qui bénéficient d’autorisations d’absence et perçoivent la totalité de leur salaire.

Nous pouvons nous interroger sur le choix de ne pas avoir fait converger les modalités de rémunération entre le public et le privé. En tout état de cause, ce manque de transparence du Gouvernement pose question, le coût réel des mesures ne pouvant être estimé.

La Cour des comptes devrait poursuivre ses investigations sur ce sujet. En effet, si nous ne disposons pas de toutes les informations nécessaires, comment pourrions-nous, comme vous le demandez, redéfinir véritablement une trajectoire financière et statuer sur le niveau et les modalités de reprise d’une partie de la dette ?

C’est cette transparence et cette pédagogie qu’il faudra bien poursuivre dans la mise en œuvre et dans les résultats des politiques publiques.

Il s’agit d’un principe fondamental, qui contribue à renforcer la confiance entre responsables politiques et citoyens, mais aussi à construire des politiques publiques plus efficientes et plus proches des besoins des usagers. Mais encore faut-il que nous discutions sur la base de véritables chiffres, en temps réel et en toute transparence.

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