Intervention de Lucie Becdelièvre

Mission d'information Lutte contre la précarisation et la paupérisation — Réunion du 23 mars 2021 à 14h30
Précarité des travailleurs et « mal-emploi » — Audition de M. Paul Bazin directeur général adjoint en charge de la stratégie et des affaires institutionnelles Mme Firmine duRo directrice des partenariats et de la territorialisation de pôle emploi Mm. Martin daVid-brochen secrétaire adjoint de l'union nationale des missions locales président de la mission locale de lille et de l'association régionale des missions locales des hauts-de-france alain frouard vice-président mmes marlène cappelle déléguée générale de cheops bénédicte lefèvre vice-présidente et lucie becdelièvre déléguée générale d'alliance villes emploi

Lucie Becdelièvre, déléguée générale d'Alliance Villes Emploi :

Notre réseau national est présent sur l'ensemble du territoire métropolitain et dans les départements d'Outre-mer. Les collectivités membres de notre réseau portent les PLIE et les Maisons de l'emploi, et animent le réseau des facilitateurs de l'action sociale.

En France, on compte 147 PLIE et 78 Maisons de l'emploi. Les PLIE ont été créés à Lille il y a 30 ans. Le dispositif s'est diffusé à la fin des années 1990, notamment grâce à l'investissement des collectivités locales et à la mobilisation du Fonds social européen.

Depuis leur création, les PLIE s'adressent aux personnes les plus précaires et éloignées de l'emploi, indépendamment de leur statut ou des aides dont elles peuvent bénéficier par ailleurs. Il suffit d'habiter un territoire qui participe à un PLIE et de répondre aux critères de priorité qui ont été établis sur la base d'un diagnostic territorial. La dimension d'inconditionnalité relative pour pouvoir accéder aux services du PLIE et la durée moyenne de l'accompagnement (deux ans) me semblent importantes à souligner.

Au cours des dernières années, nous avons constaté une précarité croissante des publics qui entrent en accompagnement et une augmentation du nombre de femmes, qui représentent55 % de femmes de ces publics. Le nombre de demandeurs d'emplois de longue durée affiche également une augmentation. À l'inverse, nous observons une diminution du nombre de jeunes, mais celle-ci est corrélée à la montée en charge de la garantie jeunes. Pour les moins de 26 ans, ce sont en effet majoritairement les missions locales qui ont pris en charge l'accompagnement.

En miroir, nous constatons une montée en charge des publics dits « seniors ». Les plus de 45 ans représentent une part croissante des publics accompagnés par nos outils territoriaux. Il faut rappeler que ce sont les salariés âgés qui sont le plus concernés par les PSE. En termes de politique publique et de réflexion collective, le sujet des personnes les plus âgées, éloignées durablement de l'emploi ou amenées à perdre leur emploi dans les prochains mois, représente un vrai sujet.

Je partage également le constat de la montée en charge de l'intérim. Un point d'attention doit également être porté sur la nécessité d'« aller vers. » Longtemps, nos institutions ont suivi des logiques de prescription publique, démarche toujours pertinente mais insuffisante, car une part croissante de la population se trouve « hors des radars ».

Il est donc nécessaire de monter en compétences collectivement pour atteindre ces publics. Au niveau des PLIE, nous développons des partenariats avec des associations en lien avec les personnes en grande précarité, tels que les Restos du Coeur, ou le Secours populaire.

Parmi les points d'attention, la situation des travailleurs précaires est à souligner. Une certaine typologie de publics n'est ni demandeuse d'emploi ni inactive. Par exemple, une femme seule avec des enfants qui travaille dans l'entretien 15 heures par semaine nécessite un accompagnement en matière de compétences, d'accès et de maintien dans l'emploi. Or une telle personne n'est pas éligible à l'ensemble des dispositifs, au motif qu'elle est salariée.

Je souhaite également mettre en évidence l'importance de l'action partenariale et territoriale. Il nous semble qu'au niveau du réseau AVE, le territoire pertinent - mais non exclusif - pour assurer un continuum entre insertion, emploi et développement économique est celui du bassin d'emploi.

Le partenariat entre acteurs nous paraît extrêmement important ; la convention que nous avons signée avec Pôle Emploi il y a quelques mois en est le reflet. Il est important de penser les sujets en termes de politique publique territorialisée, même si nous sommes conscients des réalités institutionnelles et des missions spécifiques propres à chacun.

En outre, je souhaite mettre en avant le levier, en partie porté par les pouvoirs publics, que constitue l'intégration de clauses sociales, notamment en matière d'insertion de personnes éloignées de l'emploi, dans les contrats de la commande publique mais également et de plus en plus dans les commandes des donneurs d'ordresprivés. Si de telles clauses ont pu être perçues comme une contrainte supplémentaire par certaines entreprises, il apparaît aujourd'hui que ce levier peut constituer un outil de ressources humaines à même de résoudre des problématiques de tension sur certains segments du marché du travail. Il permet également aux entreprises d'embaucher des personnes dont elles n'auraient autrement jamais retenu le CV.

S'agissant des enjeux de sécurisation des parcours évoqués lors des interventions précédentes, l'accompagnement par les PLIE se poursuit pendant six mois après la sortie d'une personne du dispositif. Nous pourrions imaginer que cette poursuite de l'accompagnement soit étendue à d'autres types de dispositifs.

Dans le pic de la crise liée au premier confinement, notre réseau est resté tout à fait mobilisé, y compris lorsque les structures ont dû fermer leur accueil physique, en réinventant des modalités d'intervention et d'accompagnement.

L'accompagnement s'est en grande partie structuré autour du soutien psychologique, de l'accompagnement et du maintien du lien. Nous avons été frappés par l'explosion des problématiques de logement, d'aide alimentaire et de situations administratives au moment du premier confinement. Même si nous connaissions ces difficultés, nous en avons pris la mesure à cette occasion.

Les collectivités qui portent les PLIE et les Maisons de l'emploi ont témoigné d'une forte proactivité et d'un volontarisme en matière de soutien alimentaire, de logement, d'aide financière d'urgence, etc., afin que les personnes n'abandonnent pas leur parcours, qui pouvait être ascendant avant la crise.

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