Intervention de Guillaume Gontard

Réunion du 30 mars 2021 à 14h30
Respect des principes de la république — Question préalable

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

Monsieur le ministre de l’intérieur, il est invraisemblable de prétendre conforter les principes de la République en les bafouant ainsi.

Au travers d’un seul texte, mal écrit, alternant dispositions inutiles et dispositions liberticides, quand ce n’est pas l’un et l’autre, vous foulez aux pieds les grandes lois fondatrices de la République française.

Je pense d’abord à la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse. Vous muselez cette dernière, en réintroduisant le funeste article 24, masqué derrière l’article 18 du présent texte.

Je pense également à la loi du 28 mai 1882 portant sur l’organisation de l’enseignement primaire, qui a instauré l’instruction obligatoire, que vous dévoyez en supprimant la liberté d’instruction en famille.

Je pense ensuite à la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, que vous écrasez sous, au mieux, une innommable lourdeur bureaucratique ou, au pire, un serment d’allégeance à la norme politique dominante.

Je pense enfin à la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, car vous entravez la liberté de croire ou de ne pas croire en déployant des moyens inédits de contrôle du culte.

Ces lois ont été bâties grâce au compromis républicain de la fin du XIXe siècle, qui avait enfin permis d’installer durablement la République dans notre pays. Elles ont été si parfaitement écrites que leur colonne vertébrale est restée inchangée depuis plus d’un siècle. Quelle arrogance, quel mépris que de vouloir en modifier ainsi la substance, sans aucun mandat du peuple !

Relisez les Lettres persanes de Montesquieu, monsieur le ministre : « il est quelquefois nécessaire de changer certaines lois. Mais le cas est rare ; et lorsqu’il arrive, il n’y faut toucher que d’une main tremblante ». Votre texte fait exactement l’inverse ; semblable à un marteau qui chasse une mouche, il manquera immanquablement sa cible et causera d’inutiles destructions. Il ne renforce aucun des principes républicains que sont la liberté, l’égalité et la fraternité. Il ne répond à aucune des problématiques qui déchirent le pacte social et nourrissent le communautarisme. Exit la mixité sociale dans le logement ; exit la mixité scolaire ; exit tout ce qui permettrait de lutter contre la principale forme de séparatisme qui gangrène notre pays : le séparatisme social.

Puisque vous l’appréciez, je citerai Jean Jaurès, qui déclarait : « Je n’ai jamais séparé la République des idées de justice sociale, sans laquelle elle n’est qu’un mot. » Voilà le seul et unique chemin pour conforter la République, a fortiori quand la France compte 10 millions de pauvres et qu’elle semble se préparer à un reconfinement dramatique.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera donc cette motion tendant à opposer la question préalable.

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