Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 30 mars 2021 à 14h30
Respect des principes de la république — Discussion générale

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte aurait pu porter le nom de Samuel Paty. Il aurait aussi pu porter le nom d’Arnaud Beltrame, auquel, par le hasard du calendrier, nous avons rendu hommage aux Invalides voilà trois ans presque jour pour jour.

Nombre d’entre nous ont formé le vœu, dans cette cour minérale des Invalides, que son courage soit aussi le courage de la France. En réalité, la seule question que nous ayons à nous poser pour jauger ce projet de loi et ses mesures est la suivante : le courage est-il au cœur du texte ?

Nous le savons, la situation est gravissime. Tous les sondages, toutes les études nous le démontrent. Aurons-nous le courage qu’impose la difficulté de la situation ?

J’aurais, monsieur le ministre, aimé répondre « oui ». Je dois à la vérité de dire que, si nous voterons certaines mesures, qui sont utiles, le vrai courage n’est pas au cœur de ce texte. Je vais vous le démontrer rapidement.

Le courage, pour moi, est d’aller au bout et au fond des choses.

Or vous n’allez pas au bout des choses quand vous vous arrêtez à mi-chemin sur la neutralité et sur la laïcité. Vous n’osez pas parler du voile. Dans notre histoire récente, des gouvernements ont fait un autre choix, et le temps leur a donné raison.

Mes chers collègues, qui s’oppose aujourd’hui à la loi de 2004 ou à celle de 2010 ? Très peu de personnes, si ce n’est, précisément, les islamistes ! Or on n’en parle pas.

Vous n’allez pas non plus au fond des choses. En réalité, le séparatisme islamiste ne vient pas de nulle part : il a été encouragé par le communautarisme, qui l’a lui-même été par une immigration massive dont on a perdu le contrôle, par la panne de l’intégration, mais aussi par notre renoncement à l’assimilation.

Assimiler, c’est l’inverse de séparer. Bien sûr, l’assimilation est une contrainte pour les nouveaux venus, mais c’est surtout une promesse pour la citoyenneté, pour la République française : la promesse donnée à chacun, quelles que soient sa couleur de peau ou sa confession, de devenir pleinement français.

Monsieur le ministre, citant l’immigration, vous avez déclaré voilà quelques jours dans un quotidien que vous auriez aimé que ce texte portât plus d’ambition. Chiche ! Nous serons à vos côtés pour vous aider à effacer ce regret s’il est sincère.

D’où vient ce manque d’ambition ? Du « en même temps », qui consiste à faire un peu, mais pas trop, et, souvent, à sembler faire tout en faisant semblant.

N’est-ce pas le Président de la République qui, en avril 2018, déclarait que le voile était contraire à la civilité de notre société ? Nous approuvons les mots, mais nous attendons les actes.

Ces hésitations s’expliquent peut-être également par la peur d’être traité d’islamophobe. Je sais que certains usent souvent de cette rhétorique, qu’il faut bien entendu dénoncer.

Mais du coup, pour éviter cette peur, ce texte bascule vers une contrainte à l’encontre de ceux qui ne font pas peur : les familles qui, honnêtement, élèvent, éduquent, instruisent leurs enfants à leur domicile.

Je ne pense pas que ce texte instaure un régime de liberté à l’égard des autres cultes. Il provoque même des dommages collatéraux : d’abord, à la laïcité – heureusement, notre commission des lois rééquilibrera un certain nombre de points pour faire en sorte que les cultes qui ne posent aucun problème à la République ne soient pas victimes collatérales.

Quelle drôle d’idée a eue le Président de la République de confier au CFCM (Conseil français du culte musulman) la création d’un institut pour les imams français ! C’est contraire à la définition que je me fais de la laïcité. On sait, depuis longtemps en réalité, que le CFCM est tiraillé entre un islam consulaire, sujet aux influences étrangères, et un islam « fréro-salafiste », radical et politisé.

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