Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la République est une belle idée, un bel idéal, celui d’une communauté nationale une et indivisible dans laquelle chacun a sa place, quelle que soit son origine, ses moyens, ses talents.
C’est la raison pour laquelle, comme le disait Montesquieu, et comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, il ne faut toucher aux lois, en particulier celles qui concernent la République, que d’une main tremblante.
Nous ne sommes pas sûrs que votre projet de loi respecte ces précautions élémentaires. Nous craignons que le texte qui sortira du Sénat n’aggrave encore ce sentiment.
Pourtant, plusieurs dispositions vont dans la bonne direction. Je pense à celles qui sont relatives au respect de la laïcité, si essentielle pour nous mais malheureusement trop souvent attaquée, et à celles qui confortent la neutralité du service public.
Nous approuvons aussi l’idée de mieux contrôler les financements étrangers des associations cultuelles, ainsi que le fonctionnement des établissements hors contrat.
Toutefois, des ambiguïtés subsistent dans votre projet de loi. Nous aurions aimé y trouver des mesures pour renforcer la mixité sociale à l’école, car c’est là que tout commence pour inculquer les principes de la République. Mais, depuis quatre ans, rien n’a été fait dans cette direction, alors que notre école, sur de nombreux plans, est porteuse de ségrégation et de séparatisme. Votre texte reste, hélas ! muet sur ce sujet.
Pour nous, l’instruction c’est d’abord à l’école de la République. L’école, c’est le creuset de la République où commence l’apprentissage de la citoyenneté, enrichie par la mixité sociale et le vivre-ensemble. C’est non seulement à l’école que commence à se construire la communauté nationale, mais aussi grâce aux activités associatives, pendant les temps périscolaires, et dans les colonies de vacances, trop peu soutenues aujourd’hui pour que les enfants de ce pays apprennent à se connaître, à se respecter et à vivre ensemble.
Ce n’est pas la création d’un service national universel, coûteux et inutile, qui résoudra la question de la formation citoyenne des jeunes. Certes, par l’article 21, vous souhaitez resserrer les contraintes sur l’instruction en famille pour que les enfants qui en auraient été éloignés retrouvent l’école de la République. Mais, parallèlement, vous encouragez leur inscription dans des établissements privés hors contrat, auxquels votre texte n’impose pas le même régime d’autorisation qu’à l’instruction en famille. N’est-ce pas incohérent ?
La droite sénatoriale ayant supprimé cet article 21 en commission, le groupe socialiste va soutenir le Gouvernement. Nous proposerons de rétablir cet article, que nous améliorerons.
En contrepartie, nous attendons votre soutien pour enfin légiférer sérieusement sur la création des établissements d’enseignement scolaire privés hors contrat, en exigeant l’autorisation préalable de l’État et du maire avant toute ouverture, par simple cohérence et parallélisme des formes avec votre article 21 originel.
Monsieur le ministre, l’engagement associatif sous toutes ses formes est sans aucun doute l’un des piliers les plus authentiques de la démocratie et l’un des exercices les plus aboutis de la citoyenneté.
Par l’article 6 de votre projet de loi, vous souhaitez mettre en place un contrat d’engagement républicain, qui reste flou et dont l’utilité est tout à fait discutable. Il nous semble plus opportun de reconnaître dans la loi la « charte des engagements réciproques », qui remplit déjà ce rôle contractuel depuis 2001. Pourquoi voulez-vous encore corseter un monde associatif fragilisé et en souffrance par des contraintes inadaptées et contraires à l’esprit de la loi de 1901 ?
Quant à l’article 8, il fait peser de nouvelles responsabilités écrasantes et injustes sur les épaules des dirigeants associatifs, et notamment les jeunes, au motif qu’un comportement inadapté d’un membre pénaliserait l’association tout entière, ainsi que ses dirigeants. Les associations s’en inquiètent. Il me semble que la réglementation actuelle permet déjà d’intervenir.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous serons attentifs au sort réservé aux amendements que nous avons déposés.