Mes chers collègues, Mesdames et Messieurs. La délégation aux droits des femmes a décidé de procéder, en 2021, à un bilan de la situation des femmes dans les territoires ruraux, en abordant des sujets aussi divers que l'orientation scolaire et universitaire, l'égalité professionnelle, la santé, la lutte contre les violences et, bien sûr, la participation des femmes à la vie politique locale, l'accès des élues aux responsabilités mais aussi le rôle des élus, de façon générale, pour faire avancer l'égalité femmes-hommes dans les territoires ruraux, thème de notre table ronde de ce matin.
Je précise que notre délégation a désigné, pour mener à bien ce travail, une équipe de huit rapporteurs représentant tous les groupes politiques de notre assemblée et des territoires très divers : la Vienne, la Drôme, la Lozère, le Rhône, les Hautes-Alpes, la Haute-Garonne, le Finistère et la Dordogne.
Je rappelle également que cette réunion est diffusée en direct sur le site du Sénat et qu'elle est organisée à la fois au Sénat et à distance, en visioconférence. Je remercie ceux qui se sont connectés et les membres de la délégation aux collectivités territoriales qui sont avec nous ce matin également.
Notre table ronde aujourd'hui poursuit un double objectif : d'une part, faire le point sur l'accès des femmes élues aux responsabilités dans les collectivités des territoires ruraux et, plus généralement, sur le degré de participation des femmes à la vie politique locale dans ces territoires ; d'autre part, aborder le rôle et l'engagement des élus dans ces territoires pour faire avancer l'égalité entre les femmes et les hommes et faire valoir les bonnes pratiques locales en la matière.
Le premier axe de notre réflexion aujourd'hui concerne l'engagement politique des femmes et l'accès des élues aux responsabilités dans les collectivités territoriales des zones rurales.
À cet égard, nous aborderons notamment, avec nos invités, la question de la parité intégrale à l'échelon municipal et les conditions d'un plus grand accès des femmes aux responsabilités intercommunales. Nous verrons également comment les assemblées départementales ont été transformées par la parité, au point que celles et ceux qui y étaient autrefois opposés sont aujourd'hui acquis à la parité de ces assemblées.
Je rappelle que le 17 janvier 2019, notre délégation avait organisé une table ronde sur la question de la parité dans les intercommunalités. L'une des spécificités de ces instances communautaires réside en effet dans la faible représentation des femmes élues en leur sein, qui résulte notamment de la faible féminisation de la fonction de maire. La nécessité d'agir sur le levier municipal pour favoriser la féminisation des instances communautaires, où le plafond de verre reste très présent, semblait alors être une évidence, a fortiori parce que les communes de moins de 1 000 habitants représentent près des trois quarts des communes françaises.
Parmi les recommandations formulées en 2019 auprès de la délégation, figuraient notamment : l'extension des règles paritaires à toutes les communes, y compris aux communes de moins de 1 000 habitants actuellement non concernées par la parité ; l'élection des adjoints au maire sur une liste paritaire dans toutes les communes ; l'adoption du principe selon lequel le premier adjoint et le maire sont de sexe différent ; la mise en place d'une liste alternée paritaire pour les élections communautaires.
Nous nous étions également posé la question du « fléchage » des représentants des communes dans les intercommunalités et avions toutefois constaté que les organes délibérants des Établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ne sauraient être détachés de la réalité municipale dans laquelle ils doivent restés ancrés.
S'agissant plus spécifiquement des territoires ruraux, sujet qui nous importe aujourd'hui, nous notons que plus de 20 % des maires de communes rurales sont des femmes contre 18 % pour les communes urbaines : c'est donc une dimension importante de la réflexion sur la ruralité. Cette proportion reste toutefois très insuffisante, de même que celle des femmes maires qui, depuis les élections municipales de 2020, est passée de 16 % à près de 20 %, soit une augmentation modeste même si cela représente 1 000 communes de plus confiées à une femme maire par rapport à la fin du mandat précédent.
Avec nos invités aujourd'hui, nous verrons si la réflexion a évolué depuis notre table ronde de 2019 et si les esprits sont mûrs pour évoluer dans le sens d'un égal accès aux responsabilités des femmes et des hommes dans toutes les collectivités. La question de la parité intégrale aux élections municipales, en faisant sauter le verrou des 1 000 habitants, sera notamment au centre de nos réflexions ce matin.
Rappelons d'ailleurs, à cet égard, que l'article 28 de la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique dispose qu'« avant le 31 décembre 2021, les dispositions du code électoral relatives à l'élection des conseillers municipaux et des conseillers communautaires sont modifiées pour étendre l'égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives dans les communes et leurs groupements ».
Le second axe de réflexion de notre table ronde a trait aux bonnes pratiques des collectivités territoriales pour faire avancer l'égalité dans les territoires ruraux, dans des domaines aussi divers que l'aide à la mobilité ou l'accueil des jeunes enfants, entre autres exemples.
Le renforcement de l'accès des femmes aux mandats et responsabilités électives constitue un gage d'égalité entre les femmes et les hommes qui souhaitent s'engager en politique. La féminisation des instances de décision favorise aussi une meilleure prise en compte, par les collectivités territoriales, des besoins spécifiques des femmes, à tous les âges de la vie, et des enjeux de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Je me tourne donc maintenant vers nos invités afin qu'ils nous éclairent, par leur expérience et leurs témoignages, d'une part sur la spécificité du parcours des femmes élues dans les territoires ruraux, et d'autre part sur la prise en compte, par ces territoires, de l'égalité dans la mise en oeuvre des politiques publiques locales.
Ces témoignages nous aideront à formuler des recommandations destinées à renforcer l'engagement des femmes dans la vie politique locale ainsi qu'à favoriser l'égalité femmes-hommes dans les territoires ruraux.
Je les remercie d'être à nos côtés ce matin, dans cette salle au Sénat ou à distance derrière leur écran, et leur souhaite la bienvenue au Sénat.
Nous accueillons ainsi Nadine Kersaudy. Vous êtes maire de Cléden-Cap-Sizun dans le Finistère et représentez l'Association des maires ruraux de France (AMRF). Votre témoignage sera particulièrement éclairant pour notre délégation puisque vous êtes une élue des territoires ruraux, qui sont au coeur de nos travaux. Nous vous écouterons avec attention.
Nous donnerons ensuite la parole à l'Association des maires de France (AMF), représentée par Cécile Gallien, vice-présidente de l'AMF et maire de Vorey en Haute-Loire, et Édith Gueugneau, maire de Bourbon-Lancy en Saône-et-Loire, que notre délégation connaît bien. Nous les avons d'ailleurs entendues il y a quelques semaines sur la spécificité de la lutte contre les violences faites aux femmes dans les territoires ruraux.
Puis nous entendrons l'association Elles aussi, représentée par ses deux co-présidentes : Danièle Bouchoule et Reine Lépinay. Cette association avait alerté notre délégation, avant les élections municipales de 2020, sur les conséquences des fusions d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) en termes de dégradation de la féminisation des instances intercommunales,.
L'Assemblée des communautés de France (AdCF) sera représentée par Catherine Louis, trésorière de l'AdCF, présidente de la Communauté de communes Forêts, Seine et Suzon. Elle nous apportera un éclairage indispensable sur l'échelon intercommunal.
L'Assemblée des départements de France (ADF) interviendra par la voix de Jean Galand, conseiller départemental de la Gironde, et de Perrine Forzy, vice-présidente du département de l'Eure. Ils partageront avec nous l'expérience d'assemblées entièrement paritaires depuis les élections des conseils départementaux de 2015 et donc à l'avant-garde institutionnelle en matière de parité.
Enfin, nous sommes ravis d'accueillir Julia Mouzon, présidente du réseau Élues locales qui est à mes côtés ce matin au Sénat. Elle fera notamment une présentation synthétique des premiers constats ayant émergé des réponses au questionnaire élaboré par notre délégation dans le cadre de son travail sur les femmes dans les territoires ruraux, diffusé à l'ensemble de ses adhérentes via la plateforme Elueslocales.fr.
Je donne donc tout d'abord la parole à Nadine Kersaudy, que je remercie une nouvelle fois, comme tous nos invités, de s'être rendue disponible pour nous ce matin.