Intervention de Moutin

Délégation aux entreprises — Réunion du 11 mars 2021 à 9h00
Audition plénière — Table ronde avec les syndicats de salariés

Moutin :

Depuis un siècle, la question de la réparation a été prépondérante. On peut obtenir des indemnités financières, mais elles ne compensent pas la perte de la santé. Si on veut mettre en avant la prévention primaire, il faut l'ancrer dans le droit. Plus la prévention est organisée en amont dans les entreprises, avec une prise en compte des conditions de travail, mieux cela se passe. Les deux premiers chapitres de l'ANI concernent d'ailleurs la prévention. C'est pourquoi nous sommes vigilants sur la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail.

Il a été difficile de mettre en place l'équipe pluridisciplinaire, avec le médecin du travail comme animateur. L'important est de faire le lien entre le suivi médical et les conditions de travail, pour intervenir en amont en prévention. Il faut que les services de prévention et de santé au travail s'organisent pour accompagner les entreprises, notamment les plus petites, dans le repérage des risques et leur évaluation, et pour les aider à mettre en oeuvre des actions adaptées de prévention. Cette dimension est centrale dans l'ANI, y compris pour prévenir la désinsertion professionnelle : on privilégie aujourd'hui, dans le meilleur des cas, le maintien dans l'emploi, mais le risque est que les chômeurs deviennent inaptes au travail et ne puissent plus retrouver de travail. L'enjeu, pour nous, est que le médecin du travail et l'équipe pluridisciplinaire puissent alerter l'entreprise sur les situations pathogènes. Nous sommes tout à fait favorables à une délégation des tâches au sein de l'équipe pluridisciplinaire, pourvu que domine une approche collective, et non une approche par spécialité.

La question des conditions de travail est à peine évoquée dans les formations initiales. Agir pour la santé au travail ne doit pas se résumer à permettre à l'employeur de satisfaire à ses obligations juridiques, il faut mettre l'accent sur la prévention, qui est centrale.

En ce qui concerne la fusion de l'Anact et de l'Aract, nous participions aux travaux de concertation. L'idée est de conserver des échelons territoriaux de proximité, auprès des entreprises, pour mieux développer les compétences et faciliter les transferts de connaissance dans les entreprises.

Le dialogue social dans les TPE-PME est toujours compliqué, mais de belles expériences ont vu le jour, autour notamment des observatoires départementaux du dialogue social. Je suis ainsi sollicitée par des entreprises pour les accompagner dans la mise en place du télétravail.

Oui, il est possible de réconcilier qualité de vie au travail et développement économique ! C'est ce que nous prônons depuis longtemps. Les entreprises se plaignent parfois du désengagement des salariés, mais il faut les associer davantage ! Les pratiques managériales doivent évoluer, pour ne plus consister uniquement à gérer des indicateurs de performance et à faire du reporting, mais à appréhender à la fois la performance économique et la qualité de vie au travail. Les managers doivent aussi être mieux formés à l'animation d'équipes, surtout à l'heure où certains travaillent en présentiel et d'autres en télétravail.

Quant à l'inscription des risques psychosociaux dans un tableau des maladies professionnelles, la CFDT n'y est pas nécessairement favorable. Cela reviendrait à admettre l'échec de la prévention. En revanche, nous sommes favorables à un assouplissement de la reconnaissance des risques psychosociaux par la voie complémentaire, en abaissant le taux d'incapacité permanente (IPP). Nous pourrions ainsi avoir une meilleure vision des risques et des pathologies, dans toute leur diversité. Un tableau risquerait, dans l'immédiat, d'oublier un certain nombre de personnes.

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