L'isolement existe en ville pour les personnes âgées et les familles monoparentales en chambres d'hôtel. On a vu des problèmes de malnutrition. Pendant le premier confinement, on a vu des mères incapables d'aller acheter le nécessaire pour leur famille. Et comme les bénévoles sont souvent des gens à la retraite, certaines associations comme les Restos du coeur ou le Secours populaire, ont fermé. Puis, ils ont rouvert avec un volume d'activité plus faible. Les grosses structures de distribution d'aide alimentaire n'ont pas fonctionné à plein régime. Il faudrait pouvoir aller chez les gens car beaucoup ne peuvent pas se déplacer. Certaines associations le font comme Les Petits Frères des Pauvres. Cela mérite d'être développé. Dans le cadre de TZC, l'entreprise à but d'emploi de Paris 13e fait de la distribution à domicile pendant cette période. Un certain nombre d'antennes se sont mobilisées pour aller au domicile des personnes. C'est le meilleur moyen de rompre l'isolement et d'éviter les difficultés alimentaires.
Je constate que les associations assurent une véritable mission de service public. L'État est incapable de faire cela. Il n'est pas outillé. Les associations devraient être reconnues comme porteuse d'une mission de service public, d'autant qu'un certain nombre d'entre elles ne reçoivent aucune aide. C'est apparu très clairement pendant la période de crise.
Je ne souhaite pas focaliser mon propos sur TZC. Je ne veux pas donner l'impression que c'est la panacée. C'est une des solutions qui sont intéressantes car elle permet d'indiquer de nouvelles directions. Mais ce n'est pas la seule. Cela ne doit pas se faire au détriment de l'insertion par l'activité économique.
Sur le front de l'emploi, le chômage de longue durée avant la crise concernait environ 2,5 millions de personnes. Nous n'avions pas encore assisté à une régression de ce chômage de longue durée malgré l'amélioration de la situation de l'emploi. Il y a toujours un décalage car les entreprises commencent par employer les chômeurs de courte durée. On voyait cependant que les entreprises commençaient à regarder ce vivier. Mais la crise a effacé tout cela. Nous allons voir son impact dans cette situation, dans les prochains mois. Il est probable que le taux de chômage augmente. Dans cette situation, les entreprises embaucheront d'abord, naturellement, les personnes les plus proches de l'emploi. J'ai pratiqué cela en tant que chef d'entreprise ! Je m'attends à ce que le chômage de longue durée progresse dans les mois qui viennent.
La seule solution est l'économie sociale et solidaire (ESS). Elle représente 10 % de l'emploi en France. Elle a toujours crée de l'emploi, même en 2008 et 2009. C'est un ensemble très vaste et diversifié qui va des grandes mutuelles aux structures d'insertion et aux PEC (parcours emploi compétences). La caractéristique commune est que l'on n'a pas les mêmes exigences de productivité car c'est un secteur qui n'est pas exposé à la concurrence internationale, ni les mêmes exigences de rentabilité car il n'y a pas d'actionnaires. Et c'est un secteur pour lequel Bruxelles admet les aides publiques. Ce secteur peut être créateur d'emplois et peut aller chercher les chômeurs de longue durée.
J'avais écrit une tribune dans Le Monde en juillet dernier dans laquelle nous demandions de passer de 100 000 à 300 000 PEC. C'est une mouture améliorée des emplois aidés. Les PEC seraient très utiles actuellement en soutien des populations fragiles. Nous avons proposé de passer le nombre des structures d'insertion par l'activité économique (SIAE) de 140 000 en 2019 à 500 000 en 2022. On nous répond que ces structures ne peuvent absorber une telle masse. Il faudrait créer par conséquent des structures en faisant appel aux entreprises de l'économie sociale et solidaire mais aussi de droit commun, dès lors qu'elles ne sont pas majoritaires, afin de ne pas introduire une logique de profit. Je pense qu'un certain nombre d'entreprises sont devenues des partenaires de SIAE. Elles peuvent le faire dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises (RSE),
C'est dans ce cadre que je place TZC. L'expérimentation a plusieurs spécificités qui la rendent intéressante. D'une part, on ne sélectionne pas les personnes que l'on embauche, et d'autre part, les personnes sont mises en situation de travailler. Il faut faire attention à ne pas être dans l'occupationnel ou la sous-activité. Le dernier élément central est la territorialité. L'expérimentation prise en main par les collectivités locales, même si elles sont bien sûr aidées par l'État qui finance une partie des rémunérations. Et tout cela dans le cadre d'un CDI. Je pense que TZC doit fonctionner en partenariat avec les autres solutions, et notamment avec l'insertion par l'activité économique qui va apporter sa capacité de gestion. proches. Certains disent que je me trompe, mais je pense que les publics sont assez proches. À l'inverse, TZC apporte aux structures d'insertion la dimension territoriale. Je me demande s'il ne faudrait pas créer un comité local de l'emploi solidaire afin d'étudier toutes les solutions disponibles. Il faut éviter que chacun ne travaille que dans sa direction. Il faut travailler ensemble. Nous avons actuellement des SIAE qui servent d'appui à des entreprises à but d'emploi. Ces dernières sont adossées à la SIAE pour leurs fonctions support, ressources humaines, finances, et soutenues sur le plan du management. Cette coopération permet à la structure d'insertion de retrouver un ancrage territorial. C'est le constat que j'avais fait dans le cadre de la FAS, le plus grand réseau de l'insertion par l'activité économique : nous étions un peu « hors-sol ». Des apports croisés entre TZC et les structures d'insertion peuvent donc être très utiles.