Intervention de Louis Gallois

Mission d'information Lutte contre la précarisation et la paupérisation — Réunion du 30 mars 2021 à 14h30
Audition de M. Louis Gallois président du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée

Louis Gallois, président du Fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée :

Madame Puissat, le vivier dont vous parliez est un sas, un lieu de passage vers l'emploi de droit commun. À TZC nous avons admis que cette période pouvait être différente selon les personnes. Il faudrait aussi appliquer ce principe aux SIAE pour lesquels nous avons proposé de créer des CDI de mission, c'est-à-dire des contrats qui s'arrêteraient au moment où la personne retrouve un emploi, le bénéficiaire, n'ayant pas la possibilité de refuser un emploi jugé raisonnable en termes de qualification, de rémunération et d'éloignement du domicile. On voit bien ce que le CDI apporte aux gens, une diminution du stress et la possibilité d'ajuster leur période à leurs caractéristiques propres. Je ne suis pas contre l'idée que, si le marché de l'emploi s'améliore de façon considérable, on réduise le nombre de PEC ou le nombre de places en insertion. C'est une appréciation de caractère politique qui ne relève pas de mon domaine mais plutôt du vôtre ! Toutefois, il ne faut pas commencer à réduire le nombre de places avant de constater une amélioration de la situation de l'emploi. Si les chômeurs de longue durée retrouvent leur chance sur le marché du travail, on peut concevoir un ajustement sur les emplois aidés.

Le SPIE est une bonne chose. Le service public de l'emploi, ne peut pas faire convenablement son travail avec les chômeurs de longue durée. On n'est pas dans une pathologie qui ne concerne que l'emploi : il y a d'autres dimensions. C'est un travail de dentellière que n'a pas le temps de faire Pôle Emploi. Je caricature un peu la situation. Mais l'idée d'un service public qui s'adresse à des populations très éloignées de l'emploi me semblait plutôt une bonne mesure. Toutefois, je ne connais pas actuellement la consistance du SPIE et ne peux donc pas encore porter de jugement.

Sur l'adossement aux entreprises, si les structures de l'ESS ne peuvent monter en régime suffisamment vite, il faut demander aux entreprises de les aider. Encore une fois, il ne s'agit pas de pervertir l'ESS en y mettant des logiques entrepreneuriales. Il s'agit d'un partenariat qui doit se faire dans le cadre de la politique de RSE des entreprises.

Sur les contrats courts, je partage l'avis de ceux qui considèrent que le bonus-malus s'applique à un nombre de secteurs trop limité. Je suis favorable à un dispositif plus large, même si je reconnais que cela pose de réelles difficultés pour certains métiers et notamment l'hôtellerie.

Je ne vais pas aborder les questions industrielles, qui mériteraient une longue discussion. Nous étions sur une courbe en amélioration fin 2019. Quelles vont être les conséquences de la crise actuelle ? Le gouvernement a mis en oeuvre des mesures qui ont permis de passer l'année 2020 mais les véritables échéances sont en 2021 et 2022.

J'ai un jugement assez négatif sur la réforme de l'assurance chômage, en particulier sur la modification de la durée de cotisation et le calcul des allocations. Cela porte sur les populations les plus fragiles sur le plan de l'emploi. Par contre, je n'ai pas trouvé scandaleux l'effort demandé aux cadres. Pour les personnes en grande précarité vis-à-vis de l'emploi, l'intermittence mis à part, la part revenant à ces gens était trop forte. Je trouve que ce n'est pas à eux de payer le prix de leur précarité.

Je suis parti d'un constat sur l'impôt de solidarité. La situation des 20 % les plus pauvres s'est dégradée. Leur taux d'endettement s'est accru. En revanche, les 20 % les plus aisés, dont je fais partie, ont vu leur épargne augmenter de plus de 70 milliards d'euros en 2020. Non pas qu'ils se soient enrichis, mais comme ils n'ont pas eu l'occasion de consommer, ils ont accumulé cet épargne. Leur situation tranche avec celle des 20 % les moins riches. Je ne trouve pas anormal de demander, dans une situation aussi exceptionnelle avec des populations en très grande difficulté, que l'on relève les tranches supérieures de l'impôt sur le revenu. Je n'ai pas voulu m'attaquer aux impôts sur les successions, auxquels on ne peut pas y toucher en France ! J'ai même proposé d'affecter la somme directement collectée au soutien des personnes en grande fragilité et notamment au financement d'une garantie jeunes plus longue ou à l'extension du RSA, dans des conditions à définir aux 18-25 ans.

Je pense que le pays a besoin de manifestations de solidarité dans cette période. Il ne s'agit pas de pénaliser des gens dont la situation ne s'est pas dégradée en 2020, mais de les inviter à répondre à un appel à contribution en faveur de ceux qui connaissent d'extrêmes difficultés.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion