Intervention de Nicolas Bernet

Mission d'information Méthanisation — Réunion du 6 avril 2021 à 16h30
Table ronde avec les professionnels de la recherche agronomique

Nicolas Bernet, directeur de recherche à l'INRAE et directeur du laboratoire de biotechnologie de l'environnement (LBE) :

Je vous remercie de nous donner l'occasion de participer à cette table ronde. Je précise tout d'abord que l'INRAE résulte de la fusion, en 2020, de deux instituts de recherche : l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA). Cette fusion nous a permis de renforcer la recherche sur la thématique de la méthanisation, sur laquelle travaillaient déjà des laboratoires dans les deux anciens instituts.

Le document « INRAE 2030 », fournissant les perspectives de recherche et les orientations scientifiques du nouvel Institut à dix ans, en constitue une illustration. Parmi ces cinq orientations, l'une est intitulée « une bioéconomie basée sur une utilisation sobre et circulaire des ressources », dans laquelle la méthanisation rentre pleinement, avec notamment des approches des problématiques sur les cycles du carbone, de l'azote et du phosphore dans les écosystèmes terrestres. S'y ajoute la question du traitement et des usages des biomasses, co-produits, eaux usées et résidus organiques. Cela témoigne de notre fort intérêt pour le sujet. Je commencerai par vous présenter la partie « amont » qui concerne les procédés, et ma collègue Sabine Houot poursuivra avec la valorisation agronomique des digestats.

Je suis directeur d'un laboratoire qui travaille sur la méthanisation, et plus généralement, sur la valorisation des déchets et des résidus organiques, également appelée « bio-raffinerie environnementale ». La méthanisation est intégrée à cette approche. L'idée consiste à donner de la valeur aux déchets, que l'on veut désormais considérer comme des ressources. Ainsi, la fermentation de ces ressources pour produire, non pas du méthane mais de l'hydrogène, représente un exemple de procédé intéressant pour l'avenir. Si ce sujet n'est pas aussi mûr que la méthanisation, nous y travaillons.

Même si la thématique de la méthanisation est considérée comme « mature », des sujets de recherche, en particulier sur l'amélioration des procédés, demeurent. La méthanisation a beaucoup évolué depuis vingt-cinq ans. Elle était à l'époque principalement utilisée pour traiter des effluents agroalimentaires et les boues de stations d'épuration, mais on se pose désormais des questions de valorisation énergétique, de conversion de biomasse pour faire de l'énergie.

Les procédés et les recherches évoluent. On travaille ainsi sur la méthanisation en voie sèche, ou voie solide. Elle se distingue de celle qui est la plus utilisée aujourd'hui : la méthanisation en voie humide, c'est-à-dire en milieu liquide. L'intérêt de la méthanisation en voie sèche repose sur le fait que, lorsque l'on doit méthaniser des biomasses et qu'on n'a pas d'effluents liquides en guise de co-produits, on peut le faire sans avoir à ajouter d'eau. La technique est proche du compostage, mais en conditions anaérobies et en milieu fermé.

La question des digestats représente également un sujet très important, à l'interface des procédés et de l'agronomie. Jusqu'à ces dernières années, on travaillait la méthanisation essentiellement pour valoriser les biomasses sous forme de biogaz. La question des digestats est désormais centrale, car le digestat est le produit principal de la méthanisation. Si on raisonne en termes de masse, l'essentiel de ce qui rentre dans un méthaniseur ne ressort pas sous la forme de biogaz, mais sous celle d'un digestat. Il y a quelques années, nous avons recruté une chercheuse pour travailler sur cette thématique et faire le lien entre le procédé, le digestat et sa valorisation. On se penche sur le procédé et les intrants - qu'on rentre dans le méthaniseur - pour jouer sur la qualité de ce digestat. Ce dernier reflète la qualité de ce qu'on met dans le méthaniseur.

Je voulais également aborder un dernier point préliminaire : la méthanisation est l'un des trois procédés destinés à produire du « gaz vert », en remplacement du gaz fossile.

La méthanisation à l'horizon 2050 pourrait ainsi produire environ 30 % de ce gaz vert, les 70 % restant étant produits par pyrogazéification - procédé thermochimique qui utilise plutôt des biomasses sèches comme le bois - et par méthanation - le power-to-gas, qui vise à transformer l'hydrogène et le CO2 en méthane. On travaille également sur ces procédés et sur leur couplage avec la méthanisation.

Ma collègue Sabine Houot peut désormais compléter mon intervention, par un éclairage sur le digestat et sur la valorisation agronomique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion