Nous regrettons que le Sénat n'ait pas été consulté sur la suppression d'ici deux ans de la capacité des CAUE à former les élus locaux, décidée par une ordonnance du 21 janvier 2021. Nous déplorons de perdre notre capacité à contribuer à la formation des élus.
Nous ne pouvons que soutenir la constitution d'instances d'experts locaux. Néanmoins, il ne conviendrait pas de les solliciter uniquement pour la remise d'un avis circonstancié en fin de parcours. En effet, lorsque nous avons apporté notre contribution sur la reconstruction post-Irma à Saint-Martin, nous avons constaté que le CSTB et les organismes à qui cette mission était confiée se sont présentés avec un canevas totalement inadapté puisque reposant sur des formes architecturales et constructives sans rapport avec le territoire. Par conséquent, si les experts locaux ne sont pas impliqués en amont des études, nous perdons du temps et n'obtenons pas d'amélioration.
Il existe une forme d'ingénierie capable de mener à bien non seulement les concepts mais également leur réalisation et leur suivi. Certaines études revèlent les faiblesses de l'ingénierie locale. Il convient néanmoins de bien sérier la question de l'ingénierie pour ne pas la limiter à la maîtrise d'ouvrage ou à la maîtrise d'oeuvre. Il existe en effet des bailleurs qui maîtrisent parfaitement les sujets du logement social et réalisent des prouesses avec les faibles moyens dont ils disposent. Quelques réglages sont certes nécessaires, comme pour la reconstruction de Saint-Martin.
Nous constatons en revanche l'apparition d'un nombre croissant de sociétés commerciales, inscrites à la Chambre de commerce, ne possédant aucune compétence dans le bâtiment sachant qu'il ne leur est plus nécessaire de s'inscrire à la Chambre des métiers pour exercer. Dans nos territoires soumis à des risques et à des contraintes sévères, cette liberté donnée à toute société de construire des logements sans qualification peut être considérée comme une mise en danger de la population. Nous constatons l'apparition de logements respectant parfaitement les normes européennes mais totalement inadaptés aux configurations des Antilles. Les règles de financement de l'ANAH par exemple sont exigeantes en matière d'hygiène et de salubrité mais ne tiennent pas compte des principes de construction parasismiques et paracycloniques.
Il me paraît important de signaler certains éléments concernant le logement social. L'INSEE considère que la population éligible au logement social représente près de 60 à 70 % des demandeurs de logement aux Antilles. Or, le patrimoine du logement social se résume essentiellement au parc des bailleurs sociaux. L'habitat vernaculaire, appartenant à des familles, souvent sur des terrains squattés, n'est pas pris en compte dans le parc social. Il faudrait concevoir des dispositifs innovants permettant d'intégrer ces logements au parc social et aux opérations de résorption de l'habitat insalubre.