Plusieurs questions, d'abord sur la question européenne. Vous avez dit, Madame, que le président Biden avait de l'attachement ou de l'affection pour l'Union européenne en tant qu'organisation supranationale. Est-ce que ça n'est pas plutôt - de manière un peu pragmatique, voire cynique, ce qui en politique internationale de la part des Etats-Unis n'est pas non plus une injure - le fait de bien s'accommoder de ce que, comme l'expliquait Pierre Manent dans un entretien publié il y a une quinzaine de jours, l'Europe, à travers son impuissance, préserve son innocence ? Est-ce que ce n'est pas par-là plutôt que les Etats-Unis voient d'un bon oeil la coopération avec l'Union européenne en se disant qu'au moins les institutions européennes ne leur feront pas mal dans le développement de leur propre politique ? C'est le premier point. Le deuxième qui en découle : sur des sujets majeurs comme celui par exemple d'une utilisation détournée de son objet initial de l'extraterritorialité du droit américain, Joe Biden va-t-il se comporter différemment de ses prédécesseurs - je ne parle pas que de Donald Trump - et par exemple sur des enjeux comme ceux de Nord Stream, est-ce qu'il faut s'attendre à une inflexion ou pas ? Dernière question : on met des étiquettes sur les dirigeants et parfois on personnalise les politiques nationales afin de les comprendre ; M. Sellin a introduit beaucoup de nuances et de recul par rapport au « portrait » de Joe Biden ou en tout cas par rapport à ce qu'on pouvait attendre de lui au regard de son parcours. On a parlé de « Joe La Gaffe » un certain nombre de fois. Quand un président des Etats-Unis d'Amérique dit tout tranquillement que le président d'un pays membre du Conseil de sécurité est un tueur, est-ce une gaffe ou est-ce un acte réfléchi ? Dans les deux cas, c'est grave. Mais quelle est votre opinion là-dessus ?