Intervention de Bertrand Faure

Délégation aux Collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 18 février 2021 à 9h00
Audition de M. Bertrand Faure professeur de droit public à l'université de nantes sur l'évolution du droit applicable aux collectivités territoriales

Bertrand Faure, professeur de droit public à l'Université de Nantes :

La question est celle de l'équilibre et de l'efficacité de notre territoire. À cet égard, l'image du millefeuille territorial est un raccourci trompeur. En réalité, chez nos proches voisins, le nombre de niveaux locaux d'administration est relativement identique. Vous trouverez partout un niveau communal, un niveau régional et un niveau intermédiaire. La singularité de la France est davantage dans le fait que ces différents niveaux d'administration y sont égaux, chacun demeurant maître de sa politique, de ses deniers et de ses décisions.

Nous pratiquons ainsi un statut uniforme des collectivités territoriales. Au niveau régional, départemental ou communal, nous conservons des modes d'organisation, de gouvernance, de tutelle et de détermination des ressources relativement identiques, ce qui aboutit à une superposition et non à une imbrication ou à une complémentarité.

L'enjeu serait donc de réfléchir, non pas au nombre de nos niveaux d'administration, mais à leur articulation. Nous pourrions ainsi imaginer une forme de fédération des collectivités territoriales, dans laquelle les niveaux inférieurs mettraient en oeuvre, avec une marge d'autonomie, les politiques déterminées aux niveaux supérieurs, le cas échéant au niveau régional. Tel était un peu l'objectif de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite « loi NOTRe »), avec la mise en place des schémas. Cependant, cette idée n'a pas abouti, au nom du principe constitutionnel selon lequel aucune collectivité ne peut exercer de tutelle sur une autre.

Ce principe constitutionnel est révélateur du caractère conservateur de nos institutions - sans que le terme de « tutelle » puisse être clairement défini juridiquement. Nous nous interdisons ainsi de donner à la région un pouvoir quasi-législatif, pour élaborer de premières applications de la loi que les départements, communes ou intercommunalités auraient ensuite en charge de décliner, le cas échéant avec des élus communs aux différentes collectivités.

À cet égard, l'échec de la mise en place du conseiller territorial est également révélateur. Ce dispositif inabouti échappait au schéma du fédéralisme, en introduisant une confusion totale entre la région et les départements, tout en préservant une séparation totale entre leurs compétences.

J'estime pour ma part qu'il conviendrait de pousser la réflexion vers un tel fédéralisme, à même de porter une réelle modernisation de nos institutions locales.

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