Intervention de Colette Mélot

Commission des affaires européennes — Réunion du 8 avril 2021 à 8h30
Éducation — Audition de M. Jean Arthuis ancien ministre président d'euro app mobility et du cercle erasmus et communication de Mme Colette Mélot et M. Jean-Michel Arnaud sur le programme « erasmus + » pour l'éducation la formation la jeunesse et le sport

Photo de Colette MélotColette Mélot, rapporteure :

Monsieur le Ministre, c'est un plaisir de vous revoir ici ! Merci de venir nous apporter votre expertise sur ce projet dont vous êtes un ardent défenseur.

En septembre 2020, la Commission européenne a fait du renforcement d'Erasmus + le premier axe de la mise en place de l'Espace européen de l'éducation. Elle a également souligné l'importance de l'éducation dans la construction de l'avenir de l'Europe. Le contexte de la pandémie de covid-19 a accéléré la nécessité d'évolutions comme celle de l'éducation à distance. Erasmus + est ainsi au coeur du plan d'action pour l'éducation numérique 2021-2027. Il est également un pilier de la stratégie européenne pour la jeunesse et du plan de travail de l'Union européenne pour le sport. L'ambition du programme est claire. L'objectif est celui établi depuis le Conseil européen de Barcelone, en mars 2002, de deux langues parlées en plus de la langue maternelle. Il a été depuis réaffirmé constamment. Dans son guide Erasmus + 2021, la Commission européenne souligne ainsi que : « Passer du temps dans un autre pays pour étudier, apprendre et travailler devrait être la norme, ainsi que parler deux autres langues en plus de sa langue maternelle ».

Trois grandes orientations guident l'exécution du programme pour la période 2021-2027 : l'inclusion, le numérique et l'environnement. L'inclusion comporte un volet cohésion : elle vise en effet les personnes moins favorisées mais également celles vivant dans des zones rurales et isolées. La gestion de la pandémie a rendu d'autant plus nécessaire d'accompagner la transition verte et numérique par une inclusion accrue : le développement accéléré des outils de l'éducation à distance à la faveur de la crise a mis en lumière de fortes inégalités dans leur accessibilité et leur usage. Une recommandation sur l'enseignement à distance et en ligne devrait d'ailleurs être présentée d'ici la fin de l'année par la Commission.

S'ajoute à ces trois orientations un axe jeunesse afin d'élargir les possibilités d'échanges et de coopération dans le cadre de nouvelles activités de participation des jeunes à la vie démocratique à l'échelle locale, nationale et européenne. Deux dispositifs font ainsi désormais pleinement partie d'Erasmus + : d'une part, DiscoverEU qui offre aux jeunes âgés de 18 ans la possibilité de voyager en train dans toute l'Europe et, d'autre part, le Corps européen de Solidarité, lancé fin 2018, qui leur permet de se porter volontaires ou de travailler à des projets solidaires dans leur pays ou à l'étranger. L'initiative « Un parcours vers le succès scolaire » pourrait proposer dès 2021 des échanges de bonnes pratiques par le biais d'une consultation, en vue d'une recommandation du Conseil au second trimestre 2022.

Comment se concrétisent ces grandes orientations ?

Le programme se décline principalement en trois actions clés : les projets de mobilité à des fins d'apprentissage ; les projets de partenariat pour l'innovation et l'échange de bonnes pratiques ; enfin, le soutien à la réforme politique dans les domaines-clés du programme, qui est un ensemble plus large. Cette action 3 est mise en oeuvre directement par la Commission européenne ou via des appels à propositions spécifiques gérés par l'agence exécutive de Bruxelles. Au sein de cette action, le « dialogue pour la jeunesse » favorise les rencontres, conférences ou séminaires entre jeunes et décideurs. Les deux premières actions se concrétisent quant à elles par l'allocation de financements, par les agences nationales, à des porteurs de projets. En France, ces financements sont gérés par l'Agence Erasmus France Éducation et Formation pour le volet Éducation et Formation, qui concentre à lui seul 94 % des crédits. Pour l'action 1, c'est-à-dire les projets de mobilité, 943 millions d'euros ont été alloués par l'Agence pour la période 2014-2020, soit 77 % des fonds dont elle a disposé. Pour l'action 2, c'est-à-dire les projets de partenariat, elle a accordé 282 millions d'euros, soit 23 % du total.

L'Agence Erasmus France Jeunesse et Sport, qui a fusionné avec l'Agence du service civique, est chargée du second volet, qui bénéficie de 6 % des financements. En 2020, elle gérait 15 millions d'euros, contre 255 millions pour l'Agence Erasmus France Éducation et Formation. Ces deux agences se consacrent à la mobilité sortante, la partie accueil étant gérée par une troisième agence : Campus France. Je déplore cette dichotomie entre mobilité entrante et mobilité sortante, qui a été critiquée par la Cour des comptes dans un rapport de 2019. Elle explique en partie l'écart entre le succès de la France, premier pays d'envoi, et sa moindre attractivité, qui en fait effectivement le cinquième pays d'accueil des apprenants européens.

La mobilité reste donc le premier levier d'action d'Erasmus +, mais la situation a évolué. Depuis l'année scolaire 2017-2018, en France, la mobilité étudiante a été devancée par la mobilité de stage, ce qui confirme l'infléchissement du programme vers plus d'insertion professionnelle. Environ le tiers de ces stages se conclut d'ailleurs par l'embauche du jeune par l'organisme d'accueil. Grâce à l'augmentation des budgets, cette évolution n'a pas porté atteinte aux bons résultats de la mobilité de l'enseignement supérieur. Il reste cependant à accélérer l'accès des publics les plus fragiles à Erasmus +.

Le programme devrait bientôt concerner plus d'adultes et d'apprenants en formation professionnelle initiale ou continue. La récente mise en place de procédures d'accréditation simplifiée a facilité l'accès aux financements pour le secteur scolaire, pour le secteur de l'éducation des adultes et pour celui de la formation professionnelle. Les accréditations délivrées le sont désormais l'ensemble de la période 2021-2027, ce qui devrait rassurer les porteurs de projets. Des politiques d'accompagnement des publics visés ont également été mises en oeuvre. Par exemple, la mise en place d'un parcours spécial d'accompagnement à la candidature pour les acteurs de l'économie sociale et solidaire et de l'action sociale a permis en 2020, en France, une augmentation de 44 % du nombre des porteurs de projet de ce secteur pour le volet mobilité.

En ce qui concerne la formation professionnelle, se développe aujourd'hui un réseau de 50 centres européens d'excellence professionnelle qui pourraient devenir le pendant des universités européennes. À ce jour, il existe 41 universités européennes, et 32 établissements français sont impliqués dans 28 de ces alliances. De la même manière, les centres d'excellence professionnelle pourront former des alliances transnationales dites « plateformes de coopération » en y incluant des entreprises.

Par ailleurs, tout comme le processus de Bologne a permis le développement du Système européen de transfert et d'accumulation de crédits (ECTS), le Système européen de crédits d'apprentissage pour l'enseignement et la formation professionnels (ECVET) permet d'obtenir la reconnaissance des acquis d'apprentissage des apprenants de la voie professionnelle obtenus dans un autre pays d'Europe. Toutefois, cette reconnaissance a progressé moins vite pour la formation professionnelle que pour l'enseignement supérieur.

En 2018, j'avais encouragé le projet Erasmus Apprentis encore dit Erasmus Pro en présentant avec Patricia Schillinger un avis politique visant à lever les obstacles à son développement. Je suis heureuse de constater aujourd'hui que les choses évoluent.

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