Intervention de Anne-Catherine Loisier

Réunion du 4 mai 2021 à 14h30
Souveraineté économique de la france — Débat interactif

Photo de Anne-Catherine LoisierAnne-Catherine Loisier :

Alors que l’exécutif soutient l’impérieuse reconquête de notre souveraineté numérique, comment expliquer, madame la ministre, les choix faits ces derniers mois de confier des données stratégiques sensibles à des entreprises américaines ?

Je pense bien sûr à la plateforme des données de santé (PDS), également appelée « Health Data Hub » (HDH), que l’État français a choisi d’attribuer à une firme américaine, Microsoft, et ce, a priori – vous nous le confirmerez –, sans aucun appel d’offres.

Je pense également à l’aérospatiale, avec la firme américaine de big data Palantir Technologies et l’avionneur Airbus, alors même que celui-ci est en plein conflit avec l’américain Boeing.

Je pense au renseignement français – direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) – pour le traitement de leurs données sensibles, confiées toujours et encore à l’américain Palantir.

Je pense enfin aux prêts garantis par l’État (PGE), confiés à Amazon Website, qui dispose donc aujourd’hui d’informations stratégiques sur les entreprises françaises et peut ainsi cibler les acquisitions opportunes pour des investisseurs étrangers hors Union européenne.

Ces géants américains du numérique, nous le savons, ont un savoir-faire technologique indéniable. Amazon investit chaque année 22 milliards d’euros dans la recherche et le développement.

Mais nul besoin, madame la ministre, de rappeler les dispositions extraterritoriales du Cloud Act en matière de transfert des données aux États-Unis. Nul besoin non plus de rappeler qu’Amazon Website gère le cloud de la CIA et de l’organisme américain chargé de la régulation et du contrôle des marchés financiers.

Si nous voulons réellement, au-delà des mots, reconquérir notre souveraineté numérique et donc économique, l’achat public doit devenir le levier majeur de la politique industrielle française, y compris pour le numérique, comme les États-Unis le pratiquent eux-mêmes depuis des années avec le succès que l’on connaît.

L’État ne doit-il donc pas, madame la ministre, soutenir et privilégier davantage les offres souveraines existantes et équivalentes ou presque à l’offre américaine et dépasser cette forme de défiance que nous avons à l’égard de nos propres acteurs français de l’écosystème et que l’on observe malheureusement depuis un certain nombre d’années ?

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