Intervention de Delphine Deserier

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 25 mars 2021 : 1ère réunion
Table ronde sur l'entreprenariat des femmes dans les territoires ruraux

Delphine Deserier, membre du réseau Femmes chefs d'entreprise France (FCE), ancienne présidente de la délégation FCE 31 :

gérante du Cottance café (Loire), membre du réseau Femmes chefs d'entreprise France (FCE), ancienne présidente de la délégation FCE 31. -Merci beaucoup. Madame la présidente, Monsieur le ministre, Messieurs les sénateurs et Mesdames les sénatrices, je suis très heureuse de témoigner aujourd'hui.

Je suis cheffe d'entreprise depuis plus de quinze ans ainsi que membre du réseau FCE depuis une dizaine d'années. J'ai été présidente de la délégation de Toulouse pendant trois ans. J'ai également essayé de créer une délégation dans l'Ariège, avec beaucoup de difficultés puisque des hommes chefs d'entreprises ont fait barrage car ils ne voyaient pas l'intérêt d'un réseau féminin de dirigeantes. Nous n'étions pas très nombreuses en Ariège à l'époque.

J'ai aujourd'hui changé de vie ; je suis revenue dans ma région d'origine, la Loire. J'ai repris la gérance d'un café, commerce de proximité, dans un petit village de 730 habitants. Il est intéressant pour moi de témoigner aujourd'hui car j'ai connu la gestion d'une entreprise à la fois dans une grande ville comme Toulouse et dans un petit village. Je peux effectuer un comparatif intéressant.

Lorsque j'écoute les témoignages de Marie Eloy et de Carole Jung, je constate que les mêmes freins sont toujours à l'oeuvre, dans une grande ville comme dans un petit village. Ces freins renvoient à l'accès à l'entreprenariat et au fameux plafond de verre que nous nous imposons avant la création d'une entreprise. Il existe aussi des résistances sur le plan financier, en lien avec certaines aides ou les réticences dont peuvent faire preuve les banques à l'égard d'une femme.

Le réseau Femmes chefs d'entreprise est le plus vieux réseau féminin de dirigeantes au monde. Il a été créé en 1945 après que des femmes avaient dû reprendre l'entreprise de leur mari décédé ou blessé à la guerre. Ces femmes ont d'emblée mis en avant la nécessité de s'entraider, de partager et d'échanger sur les difficultés rencontrées au niveau de l'entreprise mais aussi sur le plan personnel. Ce réseau est très développé puisqu'il est présent dans plus de soixante départements en France et dans plus de cent pays dans le monde.

Je suis très fière d'appartenir à ce réseau. Notre objectif est le même que celui de toutes les personnes qui ont déjà témoigné : parler de mixité, d'échanges et de la place de la femme entrepreneure dans le tissu économique local et national, sujets majeurs pour nous.

À mon sens, entreprendre dans un petit village est une démarche dont la spécificité tient à la dimension locale de l'accompagnement qui vous est apporté, ceci à travers le maire, l'équipe municipale et les habitants. Cette spécificité a également trait à la possibilité d'échanger avec la communauté de communes et les petites villes situées à proximité. Ce maillage particulier permet des échanges différents de ceux qui peuvent avoir lieu dans une grande ville. La possibilité d'être impliqué localement avec les producteurs et les fournisseurs, que je découvre depuis quelques mois, me semble très intéressante. Connaître ces deux dimensions, rurale et urbaine, présente également un intérêt.

Dans ma région, je rencontre de nombreuses femmes impliquées dans le secteur agricole, qu'elles soient conjointes de chefs d'exploitation ou créatrices et exploitantes. Dans la Loire, un grand nombre de femmes sont à la tête d'élevage de bovins ou de volailles. La région compte également un certain nombre de femmes agricultrices produisant des produits locaux, notamment du fromage et du miel.

La principale difficulté tient au fait que ces femmes utilisent souvent le statut d'autoentrepreneur. Se faire connaître et trouver une place dans l'économie locale leur est difficile, ce qui constitue sans doute un frein important. Comment rencontrer suffisamment d'acteurs pour être connue sur le terrain ?

Les freins auxquels se heurte l'entreprenariat féminin en milieu rural sont les mêmes que dans une grande ville : le manque d'intégration, une présence insuffisante sur les réseaux locaux ou les freins financiers.

Dans le cadre de l'ouverture du Cottance Café situé dans le petit village de Cottance, entre Lyon et Roanne, je fais également partie du réseau 1 000 cafés. Ce réseau a été fondé par le groupe SOS, qui conduit de nombreuses actions en matière d'entreprenariat social et solidaire. Le réseau compte vingt-sept cafés ouverts à ce jour sur les mille espérés, dans des communes de moins de 3 500 habitants. Parmi les propriétaires de ces vingt-sept cafés, la parité est réelle puisqu'on y dénombre quatorze femmes et treize hommes.

Je répondrai avec plaisir à vos questions.

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