Le texte que nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture a une histoire assez longue, puisqu'il a effectivement été déposé par vous-même, madame la secrétaire d'État, et par plusieurs de vos collègues, lorsque vous étiez députée, en octobre 2018 ; le Sénat l'a adopté en première lecture en juillet 2019.
J'indique d'emblée que le texte adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture répond au souhait qu'avait émis le Sénat de préserver l'équilibre entre collectivités territoriales et associations. J'aurais souhaité pouvoir vous proposer d'adopter ce texte sans modification, et donc définitivement, mais des considérations de pure cohérence législative, que je regrette, nous interdisent de le faire, alors même que nous sommes parvenus à un accord. En effet, la longueur du processus législatif nous contraint à rappeler en discussion un article adopté conforme afin de le supprimer, car il a été adopté dans un autre texte.
Je rappelle rapidement la position du Sénat en première lecture. Nous partagions la volonté d'accompagner les associations, dont le financement a tendanciellement baissé en quinze ans et qui agissent au quotidien dans les communes. Nous avions adopté quatre articles conformes et les autres dispositions avaient fait l'objet de modifications surtout techniques.
À l'initiative de la commission des lois, le Sénat avait toutefois refusé d'inscrire dans la loi la possibilité, pour les associations, de conserver un « excédent raisonnable » correspondant à tout ou partie d'une subvention non utilisée. Il avait jugé cette notion trop imprécise et avait estimé que les obligations créées à l'article 1er pour déterminer le montant de cet « excédent » étaient de nature à alourdir inutilement le travail des collectivités. Dans la même logique, le Sénat avait supprimé l'article 1er bis, qui prévoyait une obligation de versement des subventions accordées en soixante jours, à partir de la notification de l'accord. Enfin, le Sénat avait refusé d'exclure du droit de préemption les aliénations à titre gratuit au profit des organisations non lucratives et avait donc supprimé l'article 4 bis.
Par ailleurs, nous avions enrichi le texte de plusieurs articles additionnels à l'initiative de nos collègues Henri Leroy, Maryse Carrère, Michel Canevet et Nathalie Goulet Il s'agissait d'élargir la liste des associations pouvant bénéficier de l'excédent du compte de campagne, de clarifier les règles de publication des comptes des associations, de garantir le maintien de l'agrément des associations qui proposent l'enseignement de la conduite des véhicules dans le cadre de leur activité dans le domaine de l'insertion ou de la réinsertion sociale et professionnelle, lorsqu'elles deviennent des fondations, et d'aligner les obligations financières des associations ayant un objet cultuel et relevant de la loi de 1901 sur celles des associations relevant de la loi de 1905.
L'Assemblée nationale a conservé la plupart des apports du Sénat et a pris en compte nos réserves sur plusieurs articles. Elle a ainsi maintenu la suppression de l'article 4 bis empêchant les communes de faire usage du droit de préemption sur les biens cédés à titre gratuit aux associations ayant la capacité de recevoir des libéralités.
Elle a adopté une nouvelle rédaction de l'article 1er prévoyant non plus la possibilité, pour les associations, de conserver un « excédent raisonnable », mais la définition, dans le cadre des conventions signées entre une collectivité et une association, des conditions dans lesquelles celle-ci peut conserver « tout ou partie d'une subvention n'ayant pas été intégralement consommée ».
L'article 1er bis a également fait l'objet d'une nouvelle rédaction, prévoyant que le délai de versement d'une subvention à une association « est fixé à soixante jours à compter de la date de la notification de la décision portant attribution de la subvention à moins que l'autorité administrative, le cas échéant sous forme de convention, n'ait arrêté d'autres dates de versement ou n'ait subordonné le versement à la survenance d'un évènement déterminé ».
Tout en maintenant le souhait de permettre aux associations de bénéficier de facilités de trésorerie et d'une plus grande prévisibilité sur le versement des subventions qui leur ont été allouées, ces nouvelles rédactions préservent les compétences des collectivités territoriales et ne créent ni un droit à la conservation d'une subvention non consommée ni de nouvelles obligations disproportionnées ou de nature à bouleverser les liens établis entre les communes et le monde associatif.
Plus directement incompatible avec le texte soumis à l'examen du Sénat, le contenu de l'article 4, relatif à la mise à disposition de biens immobiliers saisis lors de procédures pénales à des associations, des fondations ou des organismes concourant aux objectifs de la politique d'aide au logement, figure désormais à l'article 4 de la loi du 8 avril 2021 améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale. Il y avait été introduit par la commission des lois du Sénat, en raison de l'incertitude entourant l'avenir la présente proposition de loi.
Par conséquent, bien que l'article 4 de la proposition ait été adopté conforme par les deux chambres, il a été nécessaire de le rappeler en discussion, conformément aux dispositions de l'article 44 bis du Règlement du Sénat, afin d'assurer la coordination avec la loi précitée, déjà en vigueur. Je vous en proposerai donc la suppression.
Puisque nous n'adoptons pas conforme le présent texte, je proposerai aussi deux amendements de coordination. En outre, un amendement de notre collègue Cécile Cukierman, qui tend à ajuster la période sur laquelle doit porter le rapport demandé à l'article 5 pour tenir compte du temps « perdu » depuis la première lecture me paraît opportun ; j'y serai favorable. Vu le nombre très faible d'articles restant en discussion, la fin de la navette devrait s'en trouver facilitée.
Le contexte de 2021 n'est plus celui de 2019 et le projet de loi confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme aura un impact important pour les associations. Ce texte, qui donne satisfaction à notre collègue Nathalie Goulet sur l'alignement des obligations de transparence financière pour toutes les associations qui gèrent une activité cultuelle, impose en outre le contrat d'engagement républicain aux associations qui sollicitent des subventions publiques. Cette réforme, que nous avons approuvée, permettra de lutter contre les dérives que l'on a pu constater dans une toute petite, mais malheureusement très active, partie du monde associatif.