Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a bien voulu déléguer à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées l’examen sur le fond de l’article 28 relatif aux minerais de conflit.
Je l’en remercie, car le règlement européen qui nous est soumis vise à adapter en droit national le contrôle du devoir de diligence des importateurs de l’Union européenne à l’égard de la chaîne d’approvisionnement de l’étain, du tantale, du tungstène et de l’or provenant de zones de conflit ou à haut risque. C’est un sujet qui concerne notre diplomatie, mais aussi notre industrie de défense.
Tout d’abord, il faut se féliciter de cette étape importante dans la lutte contre le financement des guerres civiles et des groupes armés non étatiques par le commerce de ces minerais. Elle marque l’aboutissement de plus d’une décennie de négociations internationales et européennes. Ce règlement s’inspire de la prise de conscience internationale qui avait conduit, au début des années 2000, les pays de la région des Grands Lacs africains, puis l’Organisation des Nations unies, à lutter contre le trafic des « diamants du sang » et ses conséquences dévastatrices pour les populations.
Le règlement européen impose aux importateurs un devoir de diligence pour assurer la transparence de la chaîne d’approvisionnement et la traçabilité de ces minerais, qui sont indispensables à l’industrie, à l’électronique, aux équipements civils, mais aussi militaires.
Il s’agit d’un mécanisme juridique différent de la prohibition ou de l’embargo. Au lieu d’évincer des régions entières du commerce international, au risque d’engendrer davantage de fraudes et de fragiliser encore plus les populations, il place directement les entreprises devant leur responsabilité sociale et leur devoir d’information du client et du public.
Le règlement repose donc sur une logique de compliance, c’est-à-dire de conformité au devoir de diligence. Le Gouvernement propose de mettre en place un système de contrôles a posteriori privilégiant l’incitation par rapport à la sanction. En cas de manquement, l’autorité administrative pourra enjoindre aux intéressés d’appliquer des mesures correctives sous peine d’exécution d’office et d’astreintes administratives pouvant aller jusqu’à 1 500 euros par jour de retard.
On peut s’interroger sur l’efficacité d’un tel dispositif dépourvu de sanction pénale, mais nous avons considéré qu’il n’y avait pas lieu sur ce point de « suradapter » notre législation.
Par ailleurs, il faut reconnaître deux vertus à ce règlement.
Sa première vertu est de contrôler le commerce de ces quatre minerais. C’est un dispositif européen porteur d’espoir, qui ouvre aussi une réflexion, sous un angle environnemental, concernant d’autres secteurs, dans le domaine des terres rares et de minerais comme le cobalt, nécessaire à la fabrication des batteries.
La seconde vertu, qu’il faut signaler, est la clause de « revoyure » prévue en janvier 2023 pour que la Commission européenne réexamine l’efficacité du dispositif et étudie la nécessité ou non d’adopter des mesures plus contraignantes.
Pour conclure, je vous propose d’adopter l’article 28 du présent projet de loi tel que nous l’avons modifié en commission, d’une part pour préciser le périmètre des contrôles sur la documentation devant être tenue par les importateurs, d’autre part pour nous assurer de la proportionnalité du montant des astreintes administratives à la gravité des manquements et à la situation financière des entreprises.