Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, sans doute pour démontrer son exemplarité en matière de transposition, alors que la France s’apprête à prendre la présidence du Conseil de l’Union européenne au début de l’année prochaine, le Gouvernement a décidé de recourir à un « texte balai » d’adaptation au droit de l’Union européenne. Si l’on peut parfaitement comprendre cette volonté, il en résulte inévitablement un texte touffu et technique portant sur de nombreux domaines.
La commission des finances dispose sur ce texte d’une délégation au fond pour le dernier des cinq chapitres, qui rassemble les dix articles portant sur le droit économique et financier. On peut distinguer, parmi ces articles, deux catégories.
La première comporte des dispositions techniques visant à remédier à des difficultés d’explication et d’articulation avec les règles européennes existantes. Celles-ci font donc suite à de précédentes transpositions en droit interne ou à des aménagements décidés pour préparer le Brexit. C’est le cas des articles 33, 37, 38, 39, 40 et 42.
Ces articles, de nature essentiellement technique, ne nous ont pas paru poser de difficultés. La commission des finances a donc adopté uniquement trois amendements rédactionnels et de coordination.
La seconde catégorie d’articles rassemble, à l’inverse, des dispositions visant à adapter notre droit économique et financier à de nouvelles évolutions du droit de l’Union européenne. C’est le cas des articles 34, 35, 36 et 41. Sur les quatre articles, deux procèdent à des transpositions « en dur », tandis que deux autres sollicitent une habilitation à recourir aux ordonnances.
Ainsi, les articles 34 et 35 transposent directement deux articles d’une même directive de 2019 qui mettent en œuvre les conclusions de l’exercice de revue des autorités européennes de supervision mené en 2019. Ils ne soulèvent pas de difficultés et ont seulement fait l’objet d’amendements rédactionnels en commission.
En ce qui concerne les deux articles sollicitant une habilitation à légiférer par ordonnance, nous avons fait preuve d’une grande vigilance, en vérifiant qu’ils se justifiaient par l’absence de marge de manœuvre du législateur et l’impossibilité d’intégrer directement dans la loi les mesures de transposition.
Il nous a semblé que ces deux conditions étaient pleinement remplies pour l’article 36, qui vise à transposer la série de mesures de relance par les marchés de capitaux contenues dans la directive 2021/338 du 16 février 2021.
À l’inverse, l’article 41 nous a paru emporter un risque majeur de dessaisissement du Parlement. Il visait en effet initialement à habiliter le Gouvernement non seulement à mettre notre droit national en conformité avec le nouveau règlement européen sur le financement participatif, mais également « à adapter et moderniser », notion très large, les dispositions encadrant les activités de financement participatif ne relevant pas du droit européen.
En effet, le règlement européen n’encadre qu’une partie des activités de financement participatif aujourd’hui admises en droit interne. Or cette habilitation très large pourrait permettre au Gouvernement de durcir les conditions d’exercice et même de supprimer certaines activités de financement participatif qui n’entrent pas dans le cadre européen.
De tels choix très lourds en termes de conséquences pour les acteurs concernés et nullement imposés par le législateur européen doivent faire l’objet d’un débat public et nous semblent relever par essence d’un vote au Parlement.
Aussi, pour éviter tout dessaisissement du Parlement, la commission des finances a adopté un premier amendement visant à restreindre le champ de l’habilitation à la mise en conformité avec le règlement européen et à des évolutions ciblées des activités nationales pour l’ouverture des financements participatifs aux sociétés civiles agricoles, mais également pour lutter contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Il s’agit, par cet amendement, de contraindre le Gouvernement à préserver les activités non régulées par le droit européen.
Enfin, un second amendement, essentiel, est venu assouplir les conditions d’accès des collectivités territoriales au financement participatif. Si les collectivités territoriales peuvent déjà recourir au financement participatif, elles le peuvent uniquement pour financer un service public culturel, éducatif, social ou solidaire. Ce champ nous paraît inutilement restrictif au regard de la variété des projets susceptibles d’être financés.
En outre, il existe aujourd’hui une incertitude juridique sur la possibilité pour les collectivités territoriales de recourir au financement participatif en émettant des obligations. Cet amendement répond donc à une préoccupation exprimée de longue date par les élus, notamment par l’Association des maires de France.
Au total, mes chers collègues, la commission des finances a donc adopté sept amendements, dont deux de fond.