Intervention de Olivier Jacquin

Délégation aux entreprises — Réunion du 6 mai 2021 à 9h00
Table ronde sur « les travailleurs des plateformes »

Photo de Olivier JacquinOlivier Jacquin, sénateur :

Merci Monsieur le président. Je tiens d'abord à saluer l'invitation faite à Monsieur Dufour et Madame Chagny pour ce sujet, car leur ouvrage est une véritable référence.

Je voudrais pointer les trois termes que sont l'asymétrie dans la relation, la différence entre l'autonomie et l'indépendance, la distinction entre les activités de livraison et de VTC.

Je voudrais aussi pointer cinq temps dans nos débats sénatoriaux :

- tout d'abord, la loi d'orientation des mobilités, dont l'article 20 a été supprimé à la quasi-unanimité, car les sénateurs ne trouvaient pas raisonnable de traiter du droit du travail avec des spécialistes de la mobilité. Elle est revenue avec l'insistance du Gouvernement pour tenter de protéger les plateformes ;

- l'arrêt de la Cour de cassation qui, même s'il peut être interprété à la manière de Madame Charpentier, était un message très fort sur la question des indépendants ;

- le débat autour de propositions de loi au Sénat, notamment celle de Pascal Savoldelli sur la possibilité du salariat ; j'invite les collègues à être créatifs, car il existe en effet des solutions dans le droit du travail pour légiférer ; il ne faut pas constater que les nouveaux outils numériques nous dispenseraient de chercher des solutions conformes à notre modèle socioéconomiques;

- le rapport de nos collègues de la commission des Affaires sociales, qui a entraîné un consensus au Sénat pour ne pas créer un tiers statut entre l'indépendant et le salarié, comme dans le rapport Frouin ;

- la déclaration de Just Eat qui affirme qu'il est possible de faire autrement.

Je voulais aussi évoquer une start-up récente de ma région qui exploite la pénurie de personnel hospitalier en proposant des infirmiers autoentrepreneurs. Ainsi, des directions d'hôpital réalisent des économies, face à des infirmiers hospitaliers totalement subordonnés qui vont perdre une bonne partie de leur retraite. Cette start-up met en évidence la nécessité de supprimer les distorsions de concurrence liées au statut d'autoentrepreneur, ce qui est l'objectif de l'article 2 de ma proposition de loi évoqué par Madame Gomes. J'aurais d'ailleurs souhaité interroger M. Novelli à ce propos.

Madame Chagny interrogeait aussi le lien entre le droit à la concurrence et cette notion d'indépendant. Or, une ordonnance atypique risque d'être bientôt promulguée, car, après un passage au Conseil d'État, il a été décrété que le prix ne pouvait être négocié durant le dialogue social. De fait, étant indépendants, les travailleurs s'exposaient à une condamnation pour entente. Cela témoigne de la limite entre le droit de la concurrence et le statut d'indépendant « fictif » (d'après la Cour de cassation).

Je terminerai en évoquant la directive européenne « Digital Service Act » qui entend porter un certain nombre de régulations sur ces points. Nous pourrons poursuivre nos débats relatifs à la proposition de loi le 27 mai.

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