Mesdames, Messieurs, chers collègues, je remercie tout d'abord nos invités de s'être rendus disponibles pour participer à cette table ronde, dans cette salle ou à distance. Je précise que nos travaux de ce matin font l'objet d'une diffusion vidéo en direct sur le site Internet et sur le compte Facebook du Sénat.
Cinq ans après l'adoption de la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, il nous a paru indispensable qu'une réunion de notre délégation manifeste l'importance que nous attachons à cet anniversaire. L'organisation de cette réunion a d'ailleurs été décidée dès l'adoption de notre programme de travail en fin d'année dernière et nous avons notamment tenu à aborder, aujourd'hui, la question spécifique de la prostitution des mineurs. Ce sujet est revenu souvent durant nos séances de travail et est de plus en plus présent dans l'actualité. Laurence Cohen, ici présente, est fortement mobilisée sur cette question.
En avril 2018, nous avions marqué le deuxième anniversaire de l'adoption de cette loi par une table ronde sur le parcours de sortie de la prostitution, mesure phare du texte et de son volet social.
Aujourd'hui, avec cinq ans de recul, nous avons souhaité dresser un tableau complet de l'application de la loi dans son ensemble en mettant autour de la table les parlementaires ayant oeuvré à l'adoption de la loi et de nombreux acteurs concernés par son application : associations de terrain, ministère de l'intérieur, magistrats, mais aussi les auteurs du rapport d'évaluation inter-inspections de décembre 2019, qui ont réalisé le bilan d'étape de l'application du texte, prévu par la loi elle-même.
Nous nous intéresserons notamment aux chiffres : peut-on aujourd'hui évaluer le nombre de personnes prostituées en France, en distinguant celles qui se prostituent « dans la rue » et celles qui se prostituent sur Internet ? Quel est le bilan statistique du volet répressif de la loi concernant notamment la pénalisation du client ?
Nous nous pencherons également sur les évolutions récentes majeures de la prostitution en France que constituent par exemple la moindre visibilité des personnes prostituées (recrudescence de la prostitution sur Internet et les réseaux sociaux ; développement d'un « proxénétisme des cités »), mais aussi et surtout le développement préoccupant de la prostitution des mineurs.
Je souhaite donc la bienvenue au Sénat, pour nous éclairer sur les conditions d'application de la loi du 13 avril 2016, sur les moyens nécessaires à sa pleine application mais aussi, plus spécifiquement, sur le développement inquiétant de la prostitution des mineurs, à :
- notre collègue la sénatrice Michelle Meunier, qui fut rapporteure de la proposition de loi au nom de la commission spéciale du Sénat chargée d'examiner ce texte. Je précise que Michelle Meunier succéda, en tant que rapporteure, en avril 2014, à notre collègue Laurence Rossignol, membre de la délégation, lorsque cette dernière fut nommée secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie ;
- notre ancienne collègue députée, Maud Olivier, qui fut coauteure et rapporteure de la proposition de loi au nom de la commission spéciale de l'Assemblée nationale chargée d'examiner ce texte. Elle interviendra à distance ;
- pour représenter les trois inspections auteures du récent rapport d'évaluation de la loi du 13 avril 2016 : Amélie Puccinelli, au titre de l'Inspection générale de l'administration (IGA), Pierre Loulergue, au titre de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), et Catherine Gay, magistrate, au titre de l'Inspection générale de la justice (IGJ) ;
- pour représenter le ministère de l'intérieur, Elvire Arrighi, chef de l'Office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH) à la Direction centrale de la police judiciaire ;
- Claire Quidet et Stéphanie Caradec, respectivement présidente et directrice du Mouvement du Nid ;
- enfin, pour évoquer la question cruciale de la prostitution des mineurs :
- Catherine Champrenault, procureure générale près la cour d'appel de Paris, présidente du groupe de travail sur la prostitution des mineurs mis en place par le Gouvernement fin septembre 2020 ;
- le « binôme » du Haut Conseil à l'égalité que notre délégation connaît très bien, et qui nous conseille souvent de manière pertinente, Ernestine Ronai et Édouard Durand, qui coprésident la commission Violences du HCE ;
- enfin, Arthur Melon, secrétaire général de l'association Agir contre la prostitution des enfants (ACPE).
Comme vous pouvez le constater, notre table ronde est particulièrement riche ce matin. C'est pourquoi j'invite l'ensemble de nos participants à la concision et au respect du temps de parole qui leur avait été indiqué en amont afin de permettre ensuite un temps d'échanges avec les membres de la délégation.
C'est donc avec beaucoup de plaisir que j'invite d'abord Michelle Meunier puis Maud Olivier à ouvrir ces échanges en évoquant devant nous la genèse de la loi du 13 avril 2016 ainsi que le contexte de son adoption.
Chère collègue Michelle Meunier, vous avez la parole.