La Cour n'a pas souhaité, et ce n'était pas l'objet d'un rapport de certification, se prononcer sur l'opportunité des mesures décidées par le gouvernement en réponse à la crise. En revanche, nous nous sommes attachés à leur justification sur le plan juridique et à leur traitement comptable. Or, nous constatons un risque sur la bonne répartition des résultats entre 2020 et 2021 : on déplore un manque d'exhaustivité sur les produits des prélèvements sociaux des travailleurs indépendants : cela signifie que des montants significatifs sont susceptibles d'être enregistrés en 2021, au titre de 2020, et d'améliorer ainsi la physionomie des comptes de 2021, au détriment de 2020. Il en va de même des produits comptabilisés au titre des exonérations et de l'aide au paiement « covid ». Ces réserves ne sont pas uniquement le fait de la Cour. L'Insee a ainsi procédé, lorsqu'elle a communiqué à Eurostat les éléments relatifs à la situation financière des administrations publiques en 2020, à des corrections significatives des comptes des administrations de sécurité sociale, notamment en ce qui concerne les produits des prélèvements sociaux des travailleurs indépendants et des exonérations et aides au paiement « covid ». Ses corrections sont d'ailleurs plus importantes que celles que nous avons chiffrées dans notre rapport.
Les chantiers conduits par l'Acoss sont très nombreux. Nous les avons décrits avant la crise dans notre rapport d'octobre 2020 sur l'application les lois de financement de la sécurité sociale : nous constations que beaucoup de chantiers étaient en cours, mais que peu étaient aboutis. L'extension du recouvrement de l'Acoss à la quasi-totalité de la sphère sociale comporte une série de sous-chantiers importants et consommateurs de ressources, pour s'adapter aux spécificités de tous les publics. Nous avions des interrogations sur le transfert du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco : nous soulignions la nécessité d'un maintien du calcul des droits à la retraite par salarié en fonction des cotisations déclarées par les employeurs, spécificité du régime de retraite complémentaire par points. La CNAV ne fait ainsi pas de rapprochements systématiques entre les cotisations déclarées par les employeurs et les salaires reportés au compte des salariés. C'est sans doute un motif d'insuffisance du produit des cotisations, que nous avions souligné dans notre communication à votre commission sur la fraude. Il est donc essentiel que le transfert du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco s'accompagne du maintien d'une individualisation des droits. Les enjeux ne sont pas négligeables. Chaque année Agirc-Arrco procède ainsi à une régularisation en sa faveur d'environ 1,5 milliard d'euros. Nous proposons que le transfert soit repoussé si l'individualisation des droits ne pouvait être assurée dans de bonnes conditions. Il n'y a pas à avoir de fétichisme des délais en la matière. Chacun a en tête le précédent de l'interlocuteur social unique des travailleurs indépendants, où deux systèmes d'information existaient, celui du recouvrement et celui du RSI, entraînant des problèmes de communication et des anomalies en série, difficiles à résorber.