Intervention de Marie Evrard

Réunion du 26 mai 2021 à 15h00
Élevage éthique juste socialement et soucieux du bien-être animal — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Marie EvrardMarie Evrard :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons vise selon ses auteurs la mise en place d’un élevage éthique, juste socialement et soucieux du bien-être animal. La commission des affaires économiques a examiné son texte le 12 mai et ne l’a pas adopté.

Si nous rejoignons l’esprit et les objectifs de vos propositions, mes chers collègues, nous sommes en désaccord avec la méthode et la temporalité que vous proposez. On le sait, l’enfer est souvent pavé de bonnes intentions !

Tout d’abord, le choix du titre de votre proposition de loi n’est pas anodin. Il favorise le soupçon à l’égard des agriculteurs, ce qui est regrettable.

En tant qu’agricultrice, je puis vous assurer que la très grande majorité des membres de notre profession placent le bien-être de leurs animaux au cœur de leurs préoccupations.

Les agriculteurs voient naître et grandir leurs animaux ; ils les font souvent passer avant leur bien-être personnel. On ne peut pas se servir de cas isolés de maltraitance animale pour discréditer toute une profession, a fortiori dans le contexte difficile auquel les agriculteurs font face avec courage.

Les trois premiers articles de cette proposition de loi contiennent de multiples nouvelles interdictions et limitations : l’interdiction, au 1er janvier 2026, de la construction ou de l’extension de bâtiments d’élevage si la densité de peuplement n’est pas limitée et que l’accès à un espace de plein air n’est pas permis ; l’interdiction, au 1er janvier 2040, de toute exploitation ne respectant pas ces critères : la limitation à huit heures de la durée de transport des animaux sur le territoire national ; enfin, l’interdiction de l’élimination, sauf en cas d’épizootie, des poussins mâles et des canetons femelles vivants, à partir de 2022.

Ces interdictions et limitations font fi des efforts réalisés et fixés par les différentes filières pour améliorer le bien-être animal. Elles se limitent au cadre national, alors que l’échelle idoine est européenne. Enfin, leurs auteurs ne se préoccupent pas de leurs conséquences néfastes pour les agriculteurs : les contraintes connaîtraient une complexification croissante et de nouvelles distorsions de concurrence seraient induites.

En proposant ces interdictions et limitations, on fait comme si le Gouvernement n’avait pris aucune mesure concrète pour améliorer le bien-être des animaux d’élevage. Au contraire, la mobilisation gouvernementale a permis d’acter, sans légiférer, l’interdiction de la castration à vif des porcelets et de l’élimination à terme des poussins mâles dans la filière pondeuse.

Quant à l’article 4 de cette proposition de loi, qui crée un fonds de soutien pour le bien-être animal, il est déjà satisfait : le plan de relance permet à l’État d’apporter des financements pour accélérer la transition vers un modèle agricole respectueux du bien-être animal.

Ce volet du plan de relance est en cours de déploiement sur le terrain, via le plan de modernisation des abattoirs, comme j’ai pu le constater au début de ce mois lors de ma visite de l’abattoir du groupe Sicarev, à Migennes, dans l’Yonne. Cela se traduira concrètement par la création d’une bergerie avec des mangeoires et des abreuvoirs, la mise en place de quais d’accessibilité, l’extension de l’abattoir pour améliorer le confort des animaux, l’installation d’un système de vidéosurveillance et la mise en place de formations sur le bien-être animal pour les salariés.

Pour toutes ces raisons, en responsabilité, notre groupe ne pourra pas voter en faveur de ce texte. Pour ma part, comme un certain nombre de mes collègues, je m’y opposerai.

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