Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi que votre assemblée examine aujourd'hui a été adoptée hier à l'Assemblée nationale, non sans qu'un certain nombre des questions qu'elle soulève aient été amplement évoquées.
Il est vrai que la modification du droit un an seulement après l'adoption de la loi qui l'avait précédemment établi contrevient au principe de stabilité et de sécurité juridique, auquel je fais souvent référence à la fois en tant que juriste et en tant que responsable politique.
Il est vrai aussi que l'usage républicain veut que les règles d'une élection ne soient pas modifiées lorsque la campagne a, en pratique, déjà commencé ; il convient toutefois de relever que, en l'occurrence, il ne s'agit pas de l'élection à proprement parler.
Il est vrai, enfin, qu'une modification tardive du code électoral peut toujours être mal comprise ou mal perçue par nos concitoyens.
Mais il est non moins vrai que la lisibilité des textes et des institutions nous oblige à légiférer.
La loi du 31 janvier 2007 institue, pour les élections cantonales, un « ticket paritaire » : le candidat doit avoir un remplaçant éventuel de sexe différent.
Les possibilités, pour le suppléant ou la suppléante, d'accéder au mandat de conseiller général sans recourir à une élection partielle y sont clairement limitées.
La présente proposition de loi vise à élargir ces possibilités au cas de la démission d'un parlementaire qui, nouvellement élu au conseil général, se trouve dans une situation de cumul de mandats prohibée par le code électoral.
Comme je l'ai indiqué devant les députés, si cette proposition de loi soulève des difficultés, elle ouvre néanmoins de nouvelles perspectives en matière d'égalité entre les hommes et les femmes et, sans doute aussi, prend en compte la désaffection de nos concitoyens à l'égard des élections partielles.
Quelles sont, brièvement rappelées, les difficultés que soulève cette proposition de loi ?
Lors de l'élaboration du projet de loi qui est devenu la loi du 31 janvier 2007 tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, l'intention initiale du Gouvernement était de ne prévoir le remplacement, par son suppléant, du conseiller général élu que dans une seule hypothèse : celle de son décès. Ce cas de vacance de siège est en effet, aujourd'hui, et de loin, le plus fréquent.
En revanche, le remplacement par le suppléant était exclu dans tous les cas de démission. Cette règle se calquait sur celle qui s'impose aux suppléants des députés et des sénateurs élus au scrutin majoritaire.
Le Gouvernement a toutefois accepté, lors du débat, une proposition d'origine parlementaire aux termes de laquelle cette possibilité serait élargie à deux cas de remplacement consécutif à la démission du conseiller général : d'une part, lorsque l'élu est détenteur de plus de deux mandats locaux ; d'autre part, lorsqu'il est détenteur de deux mandats locaux et d'un mandat de représentant au Parlement européen.
Il existait donc déjà une exception à la règle qui avait été primitivement fixée.
Aujourd'hui, il s'agit d'étendre cette exception aux parlementaires nationaux : un parallèle s'établirait ainsi entre, par exemple, un candidat élu conseiller général et conseiller municipal à l'occasion des élections de mars 2008, qui devrait automatiquement renoncer à l'un de ses deux mandats s'il venait à être élu député européen en juin 2009, et un parlementaire national élu conseiller général et conseiller municipal. Si cette proposition de loi est adoptée, cet élu pourra immédiatement démissionner de son nouveau mandat de conseiller général au profit de son suppléant ou de sa suppléante.
Je l'ai dit, cette proposition de loi, même si elle entraîne une sorte de parallélisme des formes entre députés européens et parlementaires nationaux ne va pas sans poser quelques difficultés. La question est maintenant de savoir si nous sommes prêts à les surmonter.
J'entends les arguments qui nous invitent à l'action et qui ont d'ailleurs été à l'origine de cette proposition de loi, arguments dont l'esprit, je m'empresse de le dire, était partagé sur quasiment tous les bancs de l'Assemblée nationale.