Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui, déposée par notre collègue députée Annie Vidal, vise à sécuriser les droits à protection sociale des assistants maternels et des salariés des particuliers employeurs. Après son adoption par l’Assemblée nationale le 18 mars dernier, ce texte a recueilli les suffrages unanimes de la commission des affaires sociales.
Particulièrement attendue par les partenaires sociaux de ces deux secteurs professionnels, son adoption permettra d’adapter le circuit de recouvrement des cotisations sociales des assistants maternels et des salariés des particuliers employeurs dans le respect des exigences constitutionnelles et des particularités de ces professions.
En France, quelque 3, 4 millions de particuliers emploient 1, 4 million de salariés et d’assistants maternels. Ce secteur est structuré autour de deux branches professionnelles : celle des assistants maternels, dont la convention collective date de 2004, et celle des salariés des particuliers employeurs dont l’accord collectif remonte à 1999.
Du fait de la forte instabilité des situations professionnelles des assistants maternels et des salariés des particuliers employeurs dans le temps, liée aux changements fréquents d’employeurs au cours d’une même carrière et de l’absence d’entreprises dans le secteur, la déclaration et le paiement des cotisations sociales doivent être adaptés et simplifiés.
Aussi les services Pajemploi et CESU ont-ils été déployés par les Urssaf et mis à la disposition des employeurs afin d’assurer, pour leur compte, la déclaration du salarié et l’émission des bulletins de salaire, ainsi que le calcul et le recouvrement de l’ensemble des cotisations. Les Urssaf en reversent ensuite le produit aux caisses et organismes de protection sociale.
En vertu des clauses de désignation insérées dans les conventions collectives des deux branches, le groupe Ircem, organisme de protection sociale complémentaire, se voit reverser par les organismes chargés du recouvrement le produit des cotisations complémentaires de santé et de prévoyance.
Néanmoins, en 2013, ces clauses de désignation ont fait l’objet de la censure du Conseil constitutionnel, considérant qu’elles portaient une atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle et à la liberté d’entreprendre. En effet, en désignant de manière contraignante un organisme de protection sociale complémentaire pour les salariés, celles-ci entravaient excessivement la liberté de choix des employeurs.
Désormais, de simples clauses de recommandation permettent de proposer aux employeurs de chaque branche professionnelle l’adhésion à un organisme de protection sociale complémentaire en particulier, mais ces clauses ne sauraient revêtir un caractère contraignant.
Ce cadre juridique permettrait, en théorie, à chaque particulier employeur de choisir individuellement l’organisme d’affiliation de son salarié. Dans ce contexte, les salariés du secteur pâtiraient d’une protection sociale complémentaire particulièrement fragmentée, qui nuirait à la lisibilité et à l’effectivité de leurs droits.
Le 26 mars dernier, après dix-huit mois de négociations pour faire converger les deux branches professionnelles du secteur, les partenaires sociaux ont conclu un accord sur une convention collective commune, qui devrait être effective le 1er janvier 2022.
Conformément à la loi, cette nouvelle convention ne contient pas de clause désignant un organisme de prévoyance. Elle confie toutefois la gestion du régime de protection sociale complémentaire des assurés à l’APNI, créée en 2018 dans le but de coordonner la mise en œuvre d’actions sociales, culturelles et de formation professionnelle à destination des salariés des deux branches.
Ainsi, à défaut de désignation d’un organisme particulier par la convention collective de la branche unifiée, l’APNI sera chargée de désigner elle-même l’organisme de protection sociale complémentaire auquel seront affiliés les assistants maternels et les salariés des particuliers employeurs, par appel d’offres et dans le respect des règles du droit de la concurrence.
Or ce circuit de recouvrement ne peut être mis en œuvre sans intervention du législateur pour permettre à l’APNI de percevoir le produit des cotisations sociales complémentaires collectées par les Urssaf. Elle les reversera ensuite à l’organisme de protection sociale désigné.
Par conséquent, mes chers collègues, en adoptant cette proposition de loi, nous unifierons explicitement dans la loi le mode de recouvrement des cotisations sociales des assistants maternels et des salariés des particuliers employeurs, déjà identique en pratique. Nous autoriserons aussi l’APNI à percevoir le produit des cotisations sociales complémentaires recouvrées par les Urssaf. Enfin, nous maintiendrons les dispositifs Pajemploi et CESU comme guichet unique des employeurs, en y intégrant ce nouveau circuit de recouvrement.
Par leur adhésion obligatoire à ces dispositifs, les particuliers employeurs confieront à l’APNI la charge de recouvrer en leur nom les cotisations sociales complémentaires de santé et de prévoyance de leurs salariés. Certes, l’APNI demeurera une instance d’exercice indirect, via les partenaires sociaux, des droits des particuliers employeurs et de leurs salariés, mais cette forme de représentation est absolument indispensable eu égard à la grande pluralité des acteurs du secteur et doit donc être regardée comme nécessaire et proportionnée à la spécificité de la future branche professionnelle.
La proposition de loi sera applicable à compter du 1er janvier 2022, date à laquelle la convention collective unifiée, actuellement soumise à extension, doit entrer en vigueur.
Au total, mes chers collègues, l’adoption de ce texte me paraît nécessaire dans la perspective de la création de cette nouvelle branche professionnelle unifiée.
Au cours de mes auditions, j’ai eu l’occasion d’échanger avec l’ensemble des acteurs du secteur, des représentants des particuliers employeurs et de leurs salariés aux organismes de recouvrement en passant par l’administration. Ils ont unanimement plaidé en faveur de cette proposition de loi, dont le dispositif, à la fois technique et consensuel, permettra de sécuriser les droits sociaux des assistants maternels et des salariés des particuliers employeurs au sein de la future branche professionnelle unifiée, de conserver un circuit de recouvrement des cotisations sociales complémentaires adapté à l’exigence de simplicité liée à la pluralité et à la fragilité des acteurs du secteur et, enfin, de garantir le respect des prescriptions constitutionnelles et du droit de la concurrence.
Par conséquent, la commission vous propose d’adopter cette proposition de loi sans modification.