La proposition de loi propose une réforme d'ampleur des relations entre auteurs et éditeurs, et, plus largement, vise à adapter le monde de l'édition au monde contemporain.
Avant de débuter cette présentation, je précise que la proposition de loi est placée sous les meilleurs auspices. Le président du Sénat a saisi le Conseil d'État, ce qui a donné à Mme Laure Darcos l'opportunité à la fois grisante et épuisante de défendre son texte devant une assemblée générale que l'on imagine conquise.
Le Conseil d'État a rendu un avis extrêmement positif et très précieux, avec de nombreuses propositions d'amélioration de la rédaction, en particulier concernant l'article 5. Par ailleurs, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur le texte, ce qui augure d'un heureux dénouement à l'Assemblée nationale.
Le principal objectif de la proposition de loi est d'adapter le monde du livre à l'ère numérique et de rééquilibrer les relations, toujours complexes, entre auteurs et éditeurs, en procédant à des réformes ciblées, très attendues par la profession. Je précise que nous avons organisé de nombreuses auditions et tables rondes, qui ont montré l'excellent accueil réservé à cette initiative.
L'article 1er propose plusieurs adaptations destinées à assurer le respect de la loi du prix unique - la loi Lang de 1981. Afin d'établir les conditions d'une concurrence équitable entre libraires et plateformes en ligne, des frais de port minimum seront fixés par arrêté ; ainsi cessera l'avantage concurrentiel le plus évident d'Amazon, qui pèse également sur les autres distributeurs en ligne, contraints de s'aligner.
Cet article 1er propose également de mieux distinguer, sur les sites, livres neufs et livres d'occasion. En effet, cette distinction n'apparaît pas toujours de manière satisfaisante et peut laisser à penser que les livres sont à des prix différents en fonction de l'endroit où ils sont vendus.
Les ventes directes réalisées par les éditeurs seront également régulées pour ne pas laisser subsister, là encore, une ambiguïté sur le prix unique. Enfin, toujours pour assurer le respect de la loi de 1981, le contrôle sera transféré des agents du ministère de la culture à ceux de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), mieux armés pour y procéder.
L'article 2 donne aux collectivités la possibilité d'accorder une subvention pour les librairies indépendantes. Il s'agit d'une simple faculté, qui s'apparente au dispositif de la loi Sueur pour les cinémas.
L'article 3 transpose dans la loi des dispositions de l'accord interprofessionnel du 29 juin 2017 entre le Syndicat national de l'édition (SNE) et le Conseil permanent des écrivains (CPE) qui vient encadrer certaines pratiques de l'édition. Le dernier accord sur le contrat d'édition à l'ère du numérique remontait à mars 2013. Pour l'essentiel, les modifications renforcent les droits des auteurs dans le cas d'une cessation d'activité de l'éditeur, ainsi qu'en encadrant les pratiques de la provision pour retour et de la compensation intertitre. Des dispositions spécifiques sont également créées pour l'édition musicale.
L'article 4 propose d'élargir la saisine du Médiateur du livre aux auteurs et à leurs représentants.
Enfin, l'article 5 adapte le dépôt légal à l'ère numérique. Les responsables de cette opération patrimoniale essentielle - la Bibliothèque nationale de France (BNF), le Centre du cinéma et de l'image animée (CNC) et l'Institut national de l'audiovisuel (INA) - sont actuellement confrontés à des difficultés d'accès sur les parties d'Internet protégées par des mots de passe ou des protections spécifiques. L'article 5 actualise l'état du droit pour offrir les moyens juridiques et techniques de mener à bien cette mission.
Comme vous le constatez, ces dispositions embrassent un champ large, mais cohérent dans sa volonté d'adapter l'édition au monde contemporain.
Avant de conclure, il me revient de vous présenter le périmètre d'application de l'article 45 de la Constitution retenu pour ce texte. Ce périmètre pourrait comprendre : le cadre des relations contractuelles entre éditeurs et auteurs ; les conditions de concurrence dans le secteur du livre entre ventes en ligne et ventes dans les commerces ; la saisine du Médiateur du livre ; les conditions d'octroi d'une aide financière aux librairies indépendantes par les collectivités ; le dépôt légal.
Il en est ainsi décidé.