Intervention de Yannick Bodin

Réunion du 6 février 2008 à 15h00
Libertés et responsabilités locales — Adoption des conclusions du rapport d'une commission tendant à ne pas adopter une proposition de loi

Photo de Yannick BodinYannick Bodin :

À l'évidence, cela a entraîné des effets pervers qui, aujourd'hui, préoccupent une grande majorité des communes de France.

La question fondamentale est celle-ci : pourquoi accorder à l'enseignement privé des droits nouveaux, droits qui, par ailleurs, sont soumis à des conditions très strictes lorsqu'elles concernent des établissements publics ?

Vous le savez, les communes n'ont obligation de financer les écoles publiques d'une autre commune que lorsqu'elles ne peuvent scolariser leurs enfants sur leur territoire. M. Jean-Marc Todeschini l'a rappelé tout à l'heure, les conditions pour cela sont précises : que la commune ne possède pas d'école publique susceptible d'accueillir les enfants, que le maire de la commune de résidence ait donné son accord préalable à l'inscription de l'enfant et que des raisons médicales, professionnelles ou familiales justifient la scolarisation de l'enfant dans une autre commune. C'est l'article L. 212-8 du code de l'éducation.

Avec l'article 89, le principe de la contribution à l'enseignement privé ne reprend pas les conditions applicables à l'école publique. Il va sans dire que, sans ces mêmes conditions, l'égalité entre l'enseignement public et l'enseignement privé est largement rompue.

Pis, sur le terrain, il en résulte un profond déséquilibre dont beaucoup d'élus se sont émus, puisque c'est en effet une atteinte au principe de laïcité.

Il est d'ailleurs significatif de constater qu'un grand nombre de communes ou bien ne remplissent pas aujourd'hui cette obligation légale ou bien annoncent qu'elles ne le feront pas. Si le nombre de contentieux n'est pas énorme à ce jour, je le reconnais, monsieur le rapporteur, je crains qu'il ne cesse de grandir au fur et à mesure des exigences de l'enseignement privé et de l'exaspération des communes concernées.

Il ne s'agit pas, vous le comprenez bien, d'une question politicienne, puisque ce refus de se conformer à cet article de la loi d'août 2004 concerne aussi bien des communes de droite que des communes de gauche. J'en veux pour preuve l'attitude exprimée par l'Association des maires de France.

Dans mon propre département, la Seine-et-Marne, devant l'émoi fortement exprimé par les maires lors de leurs deux derniers congrès annuels, notre collègue Michel Houel, président de l'Union des maires de Seine-et-Marne, s'est exprimé fortement. Je le reconnais et je l'approuve !

Selon lui, « ce texte annonce une série de conflits entre les communes et les établissements privés ». Il estime de plus que « les communes ne doivent participer que lorsqu'elles n'ont pas les capacités d'accueil nécessaires ou que les élèves relèvent des cas dérogatoires qui s'appliquent au secteur public ». Reportez-vous au journal de l'Union des maires de Seine-et-Marne ou au compte rendu du congrès.

Michel Houel maintiendra donc sa position initiale au moment du congrès suivant en disant : « on ne peut pas imposer à une commune bien équipée en établissements scolaires de payer pour des familles qui ont choisi d'inscrire leurs enfants ailleurs ; une commune ne doit pas payer deux fois, pour sa propre école et pour une autre. C'est là un simple principe d'équité et de justice. Il faut également tenir compte du fait que certaines communes rurales ont du mal à maintenir ouverte leur école publique. La nouvelle circulaire ne règle donc rien et de nombreux maires refuseront de payer. »

Et pour ne pas le mettre dans l'embarras, je n'ajouterai pas ce qu'il a dit ensuite, à savoir : « En tout cas, moi, dans ma commune, je ne paierai pas ! »

En conclusion, monsieur le ministre, il est nécessaire que le Gouvernement prenne ses responsabilités et propose une solution qui puisse satisfaire l'ensemble des parties intéressées.

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